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Santé[s] - One Health

Le Jardin des Mélisses : un espace de nature au cœur de l’hôpital

Depuis 2015, le Jardin des Mélisses offre aux patients du pôle psychiatrie du Centre Hospitalier Universitaire de Saint-Étienne un véritable espace de ressourcement. Conçu comme un outil de soin, ce jardin thérapeutique est un lieu où les patients, accompagnés par une équipe de soignants, peuvent renouer avec la nature et ses bienfaits. À travers des séances de médiation, ils cultivent, récoltent et cuisinent ensemble pour favoriser la guérison et le lien social.

Par Marie Privé, journaliste

 

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©Visée.A

 

LE SITE

Conçu pour offrir un espace accueillant et ressourçant, le Jardin des Mélisses est un lieu de soin qui représente un outil précieux pour le rétablissement des patients hospitalisés en psychiatrie. Deux fois par semaine, des médiations d’hortithérapie[1] , thérapie par les plantes, y sont proposées à un petit groupe de patients, encadrées par des infirmiers.

© Vincent Noclin

 

LES PROFESSIONNELS

Anne-Sophie, Léa et Nathan, les trois infirmiers en charge de la séance du jour, se préparent pour la médiation. Au programme : taille de la lavande, désherbage et plantation des oignons. « C’est un excellent moyen pour sortir les patients de l’inactivité et du repli sur soi, explique Nathan. On leur fait remplir une feuille d’émotions avant la médiation pour savoir comment ils se sentent. Ils la remplissent à nouveau après la séance, et on observe quasi systématiquement une évolution positive. » Une étude scientifique[2] , menée sur le Jardin des Mélisses pendant quatre semaines avec des patients hospitalisés en psychiatrie, a mis en évidence que l’hortithérapie avait significativement réduit l’anxiété par rapport aux soins de santé standards, soutenant ainsi l’intégration de cette pratique dans les soins psychiatriques.

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L’ACCOMPAGNEMENT

© Vincent Noclin

 

 

 

Nathan guide Noëlle dans la taille des lavandes. Les patientes proposent ensuite de les faire sécher, pour qu’elles puissent parfumer leurs placards avec. « C’est merveilleux ce qu’il se passe ici, affirme Nathan. En participant aux tâches, les patients s’ouvrent et apprennent à collaborer, ne serait-ce que pour demander un outil, alors qu’en temps normal, certaines de ces personnes sont totalement mutiques. »

LE TEMPS DE LA MÉDIATION

Dans le jardin, les infirmiers proposent aux trois patientes de choisir entre tailler la lavande et désherber. Elles optent finalement pour la lavande, dont le doux parfum embaume le jardin dès les premiers coups de sécateur. « On s’adapte aux patients, selon leur état du jour, explique Blandine Cherrier, cadre de santé. Certains sont très volontaires, d’autres préfèrent simplement observer et sentir. Mais même ce simple contact avec le jardin est thérapeutique : cela apaise et ravive des souvenirs. »

© Vincent Noclin

UN JARDIN TRÈS VIVANT

© Vincent Noclin

 

 

Le jardin est aussi un lieu de projets collaboratifs. Les étudiants du lycée horticole de Montravel ont ainsi contribué en 2024 à la création de quatre carrés des sens (toucher, odorat, goût, vue), offrant aux patients de nouvelles expériences sensorielles. Une collaboration avec la Ligue de protection des oiseaux (LPO) est également en préparation pour recenser les oiseaux du jardin et installer des pancartes informatives. Le jardin accueille, chaque année, des événements comme la fête de la courge, des illuminations festives et même des concerts.

DU POTAGER À L’ASSIETTE

Les légumes cultivés dans le jardin sont cueillis et cuisinés par les patients. La semaine précédente, ils ont récolté des tomates vertes qu’ils ont ensuite préparées en velouté. Teresa ajoute : « On a aussi cueilli de la verveine. Maintenant, elle sèche, et on pourra ensuite la récupérer pour faire de la tisane. »

© Vincent Noclin

UNE BULLE DE BIEN-ÊTRE POUR LES PATIENTS… 

Pour Teresa, le jardinage est une activité profondément apaisante. « C’est très thérapeutique, j’aime beaucoup venir ici, confie-t-elle. Ma maman a un jardin aussi, au Mexique. Ça me fait penser à elle. »

© Vincent Noclin

… ET POUR LES SOIGNANTS

 

Anne-Sophie trouve aussi du réconfort dans le jardinage : « C’est un moment de plaisir, une pause qui change du quotidien. Cela permet aussi de créer des liens autrement avec les patients. » La boucle est vertueuse pour tous. Le Jardin des Mélisses a inspiré la création du Diplôme Universitaire « Santé et jardins » à l’Université Jean Monnet Saint-Étienne, en place depuis 2023. En prenant soin des patients comme des soignants, les jardins thérapeutiques s’inscrivent en plein cœur de la démarche One Health : ils représentent un levier pour structurer de nouveaux parcours de soin plus performants et favoriser la promotion de la santé au travail, tout en s’intégrant dans une démarche environnementale.

 


Notes

[1] Selon l’American Horticultural Therapy Association (AHTA), « l’hortithérapie consiste à utiliser les plantes et le végétal comme médiation thérapeutique sous la direction d’un professionnel formé à cette pratique pour atteindre des objectifs précis adaptés aux besoins du participant ».

[2] Joubert, A., Jankowski-Cherrier, B., Rossi, A. et al., Impact of horticultural therapy on patients admitted to psychiatric wards, a randomised, controlled and open trial, Scientific Reports, 14, 14378 (2024).


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