Le Ha’chœur est un chœur neurodivers* composé d’adolescents autistes, de soignants et de choristes amateurs. Il est né en 2021 sous l’impulsion d’un service du Centre hospitalier Le Vinatier spécialisé dans le neurodéveloppement de l’enfant et de l’adolescent, en partenariat avec le chœur lyonnais des Phonies Polies. L’objectif : donner accès à une pratique culturelle et artistique aux adolescents du service, dans un environnement accueillant propice à leur épanouissement. Immersion en images au sein d’une répétition. Pour le son, rendez-vous aux concerts !
Par Clémentine Vignon, journaliste.
Photos : Vincent Noclin
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RÉPÉTITIONS
Les répétitions du Ha’chœur ont lieu tous les mercredis après-midi à la Maison de la Guillotière (Lyon 7e). Face à l’enthousiasme général, cette initiative qui devait être ponctuelle s’est pérennisée. « C’est déjà la quatrième saison, et nous continuerons tant qu’il y aura de la motivation ! », affirme Maude Georges, la cheffe de chœur.

© Vincent Noclin
UN CADRE POUR PLUS DE LIBERTÉS
Les répétitions suivent toujours le même déroulé. Après un tour de présentation, Maude Georges propose un échauffement corporel puis vocal. Vient, ensuite, l’heure de travailler les morceaux. « Cette structure canalise beaucoup les jeunes, explique Nicolas Petit, orthophoniste et docteur en sciences cognitives au Vinatier, à l’origine du projet. En créant de la prédictibilité, on leur permet également d’être plus disponibles pour tout ce qui se passe en-dehors du cadre. » Les adolescents ont, en effet, besoin de s’exprimer à travers des temps plus informels, au cours des répétitions.

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CHOIX DES MORCEAUX
Le répertoire musical est varié. « J’ai envie de leur faire découvrir différentes esthétiques et époques », explique Maude Georges. Des canons de la renaissance, des extraits d’opéra, des pièces contemporaines, il y en a pour tous les goûts. « Parfois les morceaux sont un peu compliqués, mais on s’adapte ! », témoigne William, 13 ans.

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PASSION PARTAGÉE
Maude Georges met toute sa passion au service du Ha’chœur, qui lui apporte en retour une vraie bouffée d’oxygène. « C’est un chœur où l’on crée beaucoup ensemble, de nombreuses propositions émergent de manière spontanée et apportent de la fraîcheur à l’interprétation. » Elle constate avec joie que certains adolescents se sont vraiment appropriés le chant choral et se sentent désormais complètement dans leur élément. « C’est devenu leur pratique, leur culture, ça leur appartient », indique la cheffe de chœur. Pour certains, il s’agit de la toute première activité de loisir qu’ils pratiquent en autonomie, sans leurs parents.
INTERGÉNÉRATIONNEL
Plus qu’un chœur neurodivers, le Ha’chœur est un chœur intergénérationnel. Pour Michel (à gauche), c’est l’occasion de se remettre au chant, une activité qu’il n’avait pas pratiquée depuis plus de 60 ans… « Mais aussi de ne pas rester qu’entre octogénaires ! »

© Vincent Noclin

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PLAISIR AVANT TOUT
Certains jeunes comme Elfie (à gauche) font partie du choeur depuis ses débuts. « J’ai découvert le chant avec Maude, je m’amuse bien ici », raconte l’adolescente. Des entretiens réalisés auprès des jeunes ont mis en évidence une satisfaction unanime et un sentiment de forte connexion sociale au sein du groupe. « Bien que l’objectif de ce projet soit avant tout artistique, les bénéfices thérapeutiques sont importants », rapporte Nicolas Petit, qui entend maintenant les formaliser dans le cadre d’un programme de recherche.

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LUMIÈRE SUR LA NEURODIVERSITÉ
À la chorale, soignants et jeunes sont sur un pied d’égalité. « Les adolescents ont autant de choses à apporter que nous, voire plus », souligne Nicolas Petit (à droite). Cette expérience l’incite à réfléchir sur sa posture de soignant. « Pour aider les gens, la médecine a traditionnellement tendance à essayer de corriger les différences, reconnaît Nicolas. Ce chœur est un bon exemple de ce que l’on peut mettre en place pour enrichir nos pratiques cliniques et les aligner avec le mouvement de la neurodiversité. » Cette réflexion a fait l’objet d’un article scientifique publié en 2024**.
Notes
* Le terme neurodivers renvoie au concept de neurodiversité qui désigne la diversité dans le fonctionnement cognitif des humains.
** Petit, N., Jurek, L., Choir as a Metaphor for Neurodiversity, JAACAP (2024).
POUR ALLER PLUS LOIN
Mieux reconnaître la diversité de pensée, par Clémentine Vignon, Pop’Sciences Mag #15, été 2025.