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EN SAVOIR PLUS

La nuit est belle – Édition 2023

LLa nuit est belle – Édition 2023

Après deux éditions de l’événement sur le territoire rhodanien en 2021 et 2022, La nuit est belle! est de retour à l’automne 2023 avec une édition dédiée à « l’Humain et la nuit ».  Toujours organisé en lien étroit avec l’équipe du Grand Genève, initiatrice de l’opération la nuit est belle! en 2019.

L’événement a pour but d’attirer l’attention sur les fortes nuisances de la pollution lumineuse. La pollution du ciel nocturne a des répercutions négatives dans de nombreux domaines. Les raisons d’éteindre l’éclairage public sont donc multiples…

Pour associer la population à cet événement, des animations variées et gratuites pour le public seront proposées dans les communes qui éteindront. Le thème 2023 de « l’Humain, la nuit » ouvre sur deux grands sujets : la santé humaine et la sécurité des usagers la nuit. Nous devons pouvoir dormir dans un environnement sombre, mais comment voir et être vu quand on se déplace la nuit.

La nuit du 22 au 23 septembre 2023 marquera l’équinoxe d’automne (précisement le 23 septembre à 8h50) avec une durée égale de 12h de jour et 12h de nuit. La Lune au premier quartier sera observable en début de nuit puis, à partir de 21h, nous pourrons admirer Saturne et Jupiter (proche d’Uranus et des Pléïades) dans un ciel noir..

Mobilisons-nous pour retrouver la nuit !

Organisé par : Centre de recherche astrophysique de Lyon – CRAL,  Société astronomique de Lyon – SAL, Grand Genève, CLEA, et l’ensemble des communes participantes sur le département Rhône et la Métropole de Lyon.

Pour en savoir plus et consulter le programme :

La nuit est belle 2023

  • Les effets néfastes de la pollution sur la santé humaine

Conférence de Mme Ouria Dkhissi-Benyahya, spécialiste de chronobiologie à l’Inserm / SBRI.| Briscope de Brignais le 22 sept. à 19h.

Cette conférence sera retransmise en direct dans les communes participantes qui le souhaitent via ce lien
https://www.youtube.com/live/9-35nky_F9E?si=vNQ7912hjjtHCekL

PPour aller plus loin

> Préserver la nuit : un enjeu de science pour nous tous, article #4 du dossier Pop’Sciences « Quand la lumière éclaire le vivant » – Juin 2023.

Quand la lumière éclaire le vivant | Un dossier Pop’Sciences

QQuand la lumière éclaire le vivant | Un dossier Pop’Sciences

Pour son dossier consacré à la lumière, Pop’Sciences est allé à la rencontre des scientifiques et professionnels des métiers de la lumière de la région Lyon Saint-Étienne. Un dossier sous les feux de la rampe … Un dossier en clair-obscur !

« Ce n’est pas Versailles ici ! ». Au-delà du slogan publicitaire qui nous enjoint, à juste titre, d’appliquer des gestes éco-responsables, la lumière, et l’absence de lumière, a de multiples implications dans le monde vivant. Action sur notre biorythme, innovations en matière d’éclairages, impact environnemental, mise en lumière dans les arts de la scène, pollution lumineuse… sont quelques unes des multiples facettes que Pop’Sciences vous propose de découvrir tout au long de ce dossier.

  Les articles du dossier

  • #1 Comment la lumière régule notre santé

©Pixabay

Comment la lumière agit-elle sur notre biorythme ? Pour le savoir, des dispositifs expérimentaux ont été spécialement conçus à Lumen, la Cité de la lumière de Lyon. À la clé, une étude qui s’intéresse aux troubles du sommeil des travailleurs de nuit. Reportage.

Lire l’article #1

 

  • #2 En ville, innover pour éclairer mieux et moins 

©PxHere.com

Double innovation de rupture, la led présente des atouts qui permettent d’envisager son utilisation dans l’éclairage urbain en limitant au mieux ses impacts sur l’environnement. Mais d’autres solutions innovantes émergent qui utilisent la capacité du vivant à émettre de la lumière, sans électricité.

Lire l’article #2

 

  • #3 Concevoir la lumière et faire rêver les spectateurs, tout un art 

©Ensatt

Illuminer un sujet, savamment, c’est le mettre en valeur. C’est vrai pour les paysages nocturnes lyonnais, mais aussi, et surtout, pour une pièce de théâtre. Un exercice qui demande d’avoir l’œil sensible et de suivre certaines règles pour créer l’émotion, comme l’explique Christine Richier, éclairagiste et responsable du master Conception Lumière à l’École nationale supérieure des arts et techniques du théâtre – Ensatt – de Lyon.

Lire l’article #3

 

  • #4 Préserver la nuit : un enjeu de sciences pour nous tous

L’environnement lumineux de Lyon la nuit. / monlyon – free download

Responsable d’effets en cascade sur la biodiversité et de dégradation de la qualité du ciel, la pollution lumineuse s’est accentuée au cours de la dernière décennie. Des solutions technologiques existent pour en diminuer les impacts en ville. À nous toutefois de redécouvrir comment la nuit est belle !

Lire l’article #4

 

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MMerci !

Ce dossier a été réalisé grâce à la collaboration de différents chercheuses et chercheurs en sciences de l’Université de Lyon :

  • Raphaël Labayrade, chercheur au Laboratoire de Tribologie et Dynamique des Systèmes – LTDS (École Nationale des Travaux Publics de l’État – ENTPE, École Centrale de Lyon, CNRS Rhône Auvergne) ;
  • Dominique Dumortier, chercheur en physique au LTDS ;
  • Claude Gronfier, spécialiste en chronobiologie chercheur au Centre de recherche en neurosciences de Lyon – CRNL, au sein de l’équipe Waking (UMR CNRS, Inserm, Université Claude Bernard Lyon 1) ;
  • Christine Richier, spécialiste conception lumière, chercheuse au Laboratoire Passages Arts et Littérature – XX-XXI – de l’Université Lumière Lyon 2 ;
  • Isabelle Vauglin, astrophysicienne au Centre de recherche en astrophysique de Lyon – CRAL (CNRS / Université Claude Bernard Lyon 1 / ENS de Lyon).

Ainsi qu’avec la participation de :

  • Philippe Badaroux, président du Cluster Lumière, Lyon ;
  • François Brunet, directeur général du Cluster Lumière, Lyon ;
  • Hélène Foglar, écologue et conseillère en éclairage public au sein du bureau d’étude Athena-Lum, membre de l’Observatoire de l’environnement nocturne (CNRS) ;
  • Pascal Moeschler, biologiste, ex-conservateur au Muséum d’histoire naturelle de Genève et co-fondateur de la noctilogie ;
  • Éric Achkar, ex-président de la société astronomique de Genève et co-fondateur de la noctilogie.

Nous les remercions pour le temps qu’ils nous ont accordé.

Un dossier rédigé par : Caroline Depecker, journaliste scientifique, pour Pop’Sciences.

 

 

En ville, innover pour éclairer mieux et moins | #2 Dossier Pop’Sciences « Quand la lumière éclaire le vivant »

EEn ville, innover pour éclairer mieux et moins | #2 Dossier Pop’Sciences « Quand la lumière éclaire le vivant »

Article #2 – Dossier Pop’Sciences Quand la lumière éclaire le vivant 

Double innovation de rupture, la led présente des atouts qui permettent d’envisager son utilisation dans l’éclairage urbain en limitant au mieux ses impacts sur l’environnement. Mais d’autres solutions innovantes émergent qui utilisent la capacité du vivant à émettre de la lumière, sans électricité.

Un article de Caroline Depecker, journaliste scientifique, rédigé
pour Pop’Sciences – 29 juin 2023

Efficaces en énergie, modulables à souhait, déclinables selon toutes les couleurs, les diodes électroluminescentes – ou leds- ont débarqué sur le marché de l’éclairage il y a une quinzaine d’années et en ont bousculé les codes. L’emploi excessif qui en serait fait n’est pas sans poser de souci. Renforçant un sur-éclairage constaté en ville, elles contribuent à une pollution lumineuse qui est pointée du doigt pour ses méfaits sur la biodiversité et les activités humaines (lire l’article #1 du dossier). Un usage raisonné des leds est à imaginer alors, qu’à l’instar de la bioluminescence, de nouvelles solutions innovantes émergent pour un éclairage plus « doux » de la nuit.

« En tant qu’innovation de rupture, la led a fortement déstabilisé la filière éclairage à son arrivée. On découvrait un éventail incroyable de nouveaux usages pour cette technologie qui, aujourd’hui, est mature », explique François Brunet, directeur du Cluster Lumière, un réseau qui regroupe sur Lyon les professionnels de la lumière impliqués dans l’éclairage et l’ensemble de sa chaîne de valeur. La led présente deux avantages majeurs par rapport à ses concurrentes passées (les ampoules halogènes et fluorescentes1) : un rendement énergétique et une durée de vie et, en tant que composant électronique, un possible pilotage à distance.

Deux atouts : rendement énergétique et digitalisation

À éclairement lumineux identique, la gamme de puissance des leds va de 4 à 10 watts alors que les solutions précédentes (les lampes à décharge, ndlr) affichent des valeurs entre 60 et 100 watts. « Pour une collectivité, remplacer son parc de lampes à sodium par des sources lumineuses LED, c’est l’occasion de faire entre 30% et 60% d’économies d’énergie », commente François Brunet. Le gisement est énorme. Les lampes les plus énergivores, à vapeur de mercure ou de sodium utilisées historiquement dans l’éclairage extérieur, sont condamnés à disparaître en application de la directive européenne 2009 qui en interdit la vente. Or, à ce jour, seul 25% du parc public est équipé en leds.

©Samuel Challeat,- Observatoire environnement nocturne – CNRS -GEODE

Parce qu’on peut ajuster sa puissance d’alimentation depuis un ordinateur, la led est devenue un éclairage digital. « C’est la seconde innovation de rupture qui accompagne la led. Avec l’envolée des coûts énergiques, cet aspect prend une valeur considérable pour réaliser des économies d’énergie », argumente Philippe Badaroux, président du Cluster. Piloter un parc à leds, c’est définir les horaires à partir desquels l’intensité des diodes est abaissée – en milieu de nuit par exemple – ou au contraire rehaussée – au petit matin. La mise en place de capteurs de présence associés aux lampadaires permet d’augmenter l’éclairage lors du passage transitoire d’un véhicule dans la zone pour davantage de visibilité. Ce type de solution est en cours d’expérimentation dans les quartiers lyonnais du Point-du-Jour et de Monchat depuis deux ans.

Grâce au pilotage intelligent des leds, il serait encore possible de diviser par deux la consommation énergétique d’un éclairage extérieur. De quoi faire réfléchir les collectivités qui ont le budget nécessaire pour faire face aux investissements requis par ces équipements derniers cris. « Attention aux effets pervers toujours possibles en cas d’innovation technologique, tempère Philippe Badaroux. L’effet rebond en est un qui consiste ici à surestimer le nombre de leds à installer alors que leur efficacité énergétique les rend économiquement attractives ».

Créer un éclairage mimant la lumière du Soleil

Au sein du cluster, un groupe de travail a été créé afin de voir comment prendre en compte les problématiques de sobriété énergétique et, lumineuse. Son objectif : faire réfléchir conjointement fabricants d’éclairage et grands consommateurs pour définir des usages pertinents à la lumière tout en intégrant sa qualité environnementale. La réflexion suppose de battre en brèche certaines idées acquises comme l’éclairage systématique des chaussées sur leur linéaire entier. « Plutôt que penser l’éclairage conditionné par des trames noires, difficiles à cerner vu la complexité des interactions entre les espèces nocturnes et la nuit, nous défendons l’idée d’optimiser les trames éclairées. Philippe Badaroux déroule le questionnement. Y’a-t-il réellement besoin d’éclairage ? À quel moment ? Pour quel objectif ? Dans l’affirmative, avec quelle intensité ? »

La digitalisation de la led libère l’imagination des concepteurs lumière. Qu’il s’agisse d’éclairer la ville, de soigner une mise en scène ou encore de proposer des environnements de travail dits « capacitants », c’est-à-dire favorisant une meilleure santé et le développement des capacités individuelles. Dans les Alpes-Maritimes, le fabricant de luminaires Résistex© a ainsi développé une solution d’éclairage créant l’illusion d’un puits de lumière. Dédiés aux espaces dépourvus de fenêtre ou à faible éclairage, le « Waouh » reproduit un faisceau lumineux identique à celui du soleil et variant comme lui au cours de la journée, voire des saisons.  Capable de se synchroniser avec l’astre solaire, l’éclairage adopte un cycle circadien qui, dans ses variations de lumière et d’obscurité, respecterait au mieux le fonctionnement de notre horloge biologique. L’occasion d’optimiser nos capacités cognitives tout en préservant notre rythme veille-sommeil.

Puits de lumière artificielle proposé par l’entreprise Résistex pour éclairer des pièces borgnes : éclairage pour le matin, au zénith et le soir. / ©C. Depecker

 

Changement de paradigme, autre innovation de rupture : un éclairage sans ampoule, ni électricité ! Mais en faisant appel à la capacité du vivant d’émettre spontanément de la lumière, ce qu’on appelle la bioluminescence. Une levier d’action inédit pour davantage de sobriété lumineuse. En décembre dernier, la start up WoodLight a obtenu à ce sujet plus de 100 000 euros, grâce à une campagne de financement participatif. Son objectif : mettre au point un plant bioluminescent à l’horizon 2024.

Mais le projet le plus abouti concerne la lumière produite par les bactéries marines. Initiatrice du concept en 2014, la start up Glowee, basée à Evry, en a fait sa spécialité. En guise de première installation valorisant le potentiel créatif de la technologie et le bien-être que génère chez la plupart la lumière bleutée caractéristique des abysses, une Glowzen Room a été installée au château Cornu, à 70 kilomètres de Lyon, en 2019. Janvier de cette année, l’entreprise a franchi un pas important de son déploiement en installant, pour la première fois au monde, du mobilier urbain bioluminescent.

Cultiver des bactéries luminescentes dans un mobilier urbain

Le « Rambolium » est un panneau de signalisation qui brille, de jour comme de nuit, sur le parvis de la lanterne à Rambouillet. À l‘intérieur de son bourgeon sommital, les bactéries marines baignent dans des tubes d’eau saline enrichie quotidiennement en nutriments, et de façon automatique, pour qu’elles puissent se multiplier.  L’alimentation en air du dispositif, nécessaire pour que le phénomène biologique ait lieu, a lui aussi été automatisé, ainsi que des rinçages et nettoyages pour éviter les contaminations. Le liquide enfermé dans le mobilier est extrait des cultures bactériennes élevées par Glowee dans ses laboratoires afin, entre autres, d’en optimiser les performances.

Le « Rambolium » diffuse la lumière produite par les bactéries marines qui sont contenues dans son bourgeon sommital. / DR Glowee – https://www.glowee.com/

 

La luminosité produite par les bactéries est trop faible pour concurrencer l’éclairage de la voirie dédiée à la voiture. Le potentiel représenté par la lumière des abysses se situe plutôt en zone piétonne. Comme l’explique l’urbaniste Nicolas Houel, spécialiste en aménagement de l’espace nocturne, dans les Échos : « Les couleur bleu vert de la bioluminescence sont apaisantes et procurent ce sentiment de sécurité recherché par les piétons,  tout en minimisant la pollution lumineuse ». Un moyen de rassurer le citoyen sur ce qui se cacherait dans la nuit, tout en évitant l’approche coutumière du lampadaire à l’éclairage uniforme et puissant.

Huit ans après les premières mises au point de la lumière marine, Glowee poursuit ses travaux de recherche et développement pour rendre son système suffisamment stable et remplir le cahier des charges de l’éclairage urbain. Une question de taille est à résoudre : garder les bactéries luminescentes par toute température car, pour l’instant, celles-ci ne produisent de la lumière qu’entre 10 et 40 degrés. Le panneau de signalisation a été planté sur la place rambolitaine pour une expérimentation de quatre mois afin de tester la robustesse, l’opérabilité et la recevabilité du système. L’issue de l’opération est stratégique pour la start up. Si celle-ci est concluante, Glowee espère essaimer largement sa solution : elle travaillerait d’ores et déjà sur une cinquantaine de projets avec des aménageurs, promoteurs, opérateurs d’énergie, collectivités pour déployer ce type d’éclairage en ville. Dans cette perspective, la société œuvre pour industrialiser une gamme de mobilier bioluminescents : la commercialisation des produits a été fixée à 2024.

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Notes

[1] Les lampes à incandescence ne sont plus autorisées à la vente depuis 2013 et les halogènes depuis 2018. Restent les lampes fluocompactes.

 

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Concevoir la lumière et faire rêver les spectateurs, tout un art | #3 Dossier Pop’Sciences « Quand la lumière éclaire le vivant »

CConcevoir la lumière et faire rêver les spectateurs, tout un art | #3 Dossier Pop’Sciences « Quand la lumière éclaire le vivant »

Article #3 – Dossier Pop’Sciences Quand la lumière éclaire le vivant

Illuminer un sujet, savamment, c’est le mettre en valeur. C’est vrai pour les paysages nocturnes lyonnais, mais aussi, et surtout, pour une pièce de théâtre. Un exercice qui demande d’avoir l’œil sensible et de suivre certaines règles pour créer l’émotion, comme l’explique Christine Richier, éclairagiste et responsable du master Conception Lumière à l’École nationale supérieure des arts et techniques du théâtre – Ensatt de Lyon.

Une interview réalisée par Caroline Depecker, journaliste scientifique,
pour Pop’Sciences – 29 juin 2023

À travers le Plan Lumière, Lyon utilise l’éclairage urbain pour mettre en beauté ses paysages nocturnes depuis 1989. Certaines compositions lumineuses vous touchent-elles plus que d’autres ?

Je ne fréquente pas toutes les rues lyonnaises, mais j’ai un souvenir qui me parle, celui de la passerelle Saint-Vincent. Rouge, elle enjambe la Saône en reliant les 1er et 5e arrondissements. J’aime aussi un bout de tunnel, du côté de la gare Part-Dieu [le tunnel du passage des Emeraudes, ndlr]. Il est éclairé délicatement, en bleu. J’apprécie les petites choses, celles qui font que mon œil rêve, plutôt que les grosses façades RVB1. Avec ses couleurs et ses jeux de lumière, l’éclairage urbain est un outil fantastique de transformation de la ville. En cela, il suscite l’imaginaire et invite à la rêverie …tant qu’il est utilisé avec goût. Que la lumière puisse donner à voir, et non à se voir. À ce titre, l’excès qu’en fait régulièrement l’éclairage urbain me paraît contre-productif. Comme les gestes artistiques : ceux qui consistent par exemple à faire de sur une façade, ou une falaise bien en vue.

La lumière urbaine est, par essence, chaotique. Les éclairages des enseignes commerciales s’ajoutent à celles des fenêtres citadines, de la voirie ou de certains bâtiments enluminés : de ce mélange-là naissent parfois des moments où l’œil s’émerveille. Et, la rétine, me semble-t-il, n’est jamais aussi heureuse que lorsqu’une multitude de petites lumières non éblouissantes et de couleurs variées s’offrent à elle. À la différence des éclairagistes urbains qui se réfèrent à des abaques pour éclairer la ville, au théâtre, nous disposons d’une grande liberté pour concevoir la lumière de nos spectacles. Et cela, c’est un plaisir immense.

Rêveries lumineuses de Leonard, un projet participatif avec des étudiants de 8 écoles de Lyon, piloté par C.Richier, T. Huet et JLL. Lanteri / ©Ensatt

La lumière donne à voir ou laisse dans l’obscurité. Au théâtre, sa distribution influe le spectateur en modifiant imperceptiblement l’histoire qui se joue sous ses yeux. Elle résulte de choix délibérés. Comment procédez-vous ?

« En laissant infuser. Encore. » Ces propos du peintre et écrivain Henri Michaux, je les répète souvent aux étudiants. Ne pas installer les projecteurs dès la première répétition, mais chercher à comprendre, avant tout, le monde qu’on est en train de fabriquer avec les autres corps de métier présents au théâtre. Le grand scénographe J. Svoboda avait coutume de comparer la représentation théâtrale au jeu d’un orchestre. Chaque instrument : le son, la scénographie, les costumes, le maquillage, les mouvements, la direction d’acteurs… y joue une partition originale pour former un tout harmonieux. À l’instar de la lumière. Mais si les premiers instruments peuvent être accordés bien avant le spectacle, grâce au travail sur plan, la conception lumière se fait, elle, quasi exclusivement lors des répétitions. Elle nécessite en effet le corps des comédiens en mouvement dans l’espace pour en dessiner les contours et nourrir l’émotion. Et elle doit beaucoup à la sensibilité et à la créativité de son concepteur.

Pour composer cette partition lumineuse, quels grands principes suivez-vous ?

Garder le point de vue du spectateur à l’esprit est un fondamental.  Selon sa position dans la salle, le visuel scénique diffère, mais à quelque endroit que ce soit, il doit emmener chacun là où la mise en scène désire aller. Bien sûr, il y a des incontournables. La sensation de luminosité diminue ainsi fortement avec la distance : en fonction de l’inverse de son carré. On sait aussi que l’œil a besoin de temps pour accommoder [faire la mise au point, ndlr] selon les variations d’intensité lumineuse. Cet effet peut être utilisé à dessein ! Profiter, pourquoi pas, d’un effet d’aveuglement temporaire pour faire apparaitre ou disparaitre un personnage, ou bien un accessoire.

Apprendre la conception lumière se fait sur maquette / ©Ensatt

 

Enfin, l’ennui visuel est une préoccupation constante. Ce phénomène d’usure de l’œil s’opère dans la durée : la perception de l’observateur s’émousse alors qu’il s’habitue à la présence de la lumière. Sous l’effet de sa monotonie, du terne, à cause de l’éblouissement ou de la succession d’effets injustifiés, le regard se détourne ou les yeux se ferment. Heureusement, l’ennui redouté peut disparaître subitement, grâce à ce qui se trame sur scène. Ce qu’Ariane Mouchkine, metteuse en scène et fondatrice du Théâtre du Soleil, nomme un « instant de théâtre ». L’attention se trouve relancée.

Donner un spectacle nécessite de plonger la salle dans le noir complet et induit certains effets recherchés. Or, cette règle n’a pas toujours eu cours. Depuis quand la pratique-t-on ?

Suite à un hasard ! Depuis un incident de régie qui a eu lieu en 1876, lors de l’inauguration du Festspielhaus de Bayreuth, en Bavière. Cette salle, conçue par Richard Wagner pour y exécuter ses opéras était éclairée au gaz. À l’époque, l’usage voulait qu’on mette les lustres de la salle au quart de feu en début du spectacle : on baissait doucement l’arrivée du gaz, et donc la flamme, pour laisser davantage place au visuel scénique. Les exigences de la bourgeoisie qui, dans les loges, se donnait à voir interdisaient toutefois l’obscurité totale. Sur ordre du compositeur allemand, le chef gazier a réduit l’éclairage dès les premiers accords de l’Anneau du Nibelung. Dans l’empressement, il a eu la main lourde et a éteint complètement la salle… Séduit par l’état de réceptivité nouveau induit chez les spectateurs à cette occasion, Wagner a ordonné que les feux ne soient pas rallumés à l’entracte et en aurait, dès lors, adopté le principe. L’évènement a fait scandale à vrai dire, mais l’usage du noir complet a fini par s’imposer et s’est répandu en Europe par la suite.

Rêveries Lumineuses de Léonard 2019- La machine de Vitruve / ©Ensatt

Ce noir total agit sur la perception du spectateur : il permet d’en concentrer l’attention, de favoriser l’écoute et d’augmenter l’impact des effets scéniques sur l’imaginaire. Il isole aussi le comédien qui ne voit plus son public, livrant ainsi un jeu plus naturel et plus concentré. Du côté de la régie, reléguée au fond de la salle, tout le monde agit de concert afin de préserver la fragilité de ce qui se joue sur scène, contribuant à créer un visuel fragile qui n’a pas l’attrait des images rapides et saturées des écrans. Pour conserver l’attention du public, il est question de maintenir le rythme ! Celui de la lumière aussi.

 

 

 

Depuis les premiers théâtres antiques, l’histoire de l’éclairage scénique a connu de nombreux bouleversements techniques. Aujourd’hui, il est question d’une nouvelle révolution ?

Oui, l’arrivée massive des leds et du numérique est un réel changement de paradigme car il modifie le paysage lumineux. La technologie led recèle un potentiel créatif réel. Certes, elle agrandit la palette du concepteur en proposant un accès rapide et immédiat à toute une gamme colorée, car avec une seule source lumineuse, on peut faire varier les teintes instantanément. Mais c’est surtout le fait de pouvoir jouer avec les températures de couleur qui la rend intéressante. Commencer une scène dans un blanc un peu chaud par exemple puis, sans que personne ne s’en aperçoive, passer à un blanc froid : l’effet de montée en tension sur scène est garanti.

Mais l’éclairage led n’est pas une panacée. Les lampes à incandescence, bannies pour leur côté énergivore, offrent une lumière d’une qualité d’ambiance incomparable. Avec le point chaud qui les caractérise, les projecteurs PAR2 sont formidables quand il s’agit de mettre en valeur un artiste. Leur faisceau ovale présente un centre très lumineux qui se fond progressivement dans l’obscurité en donnant un éclairage « organique » sur les bords. Le faisceau led n’a pas cette qualité, lui qui garde la même forme et reste homogène quelle que soit l’intensité d’éclairage. Au sein de l’association internationale des « Lightning designers », les concepteurs lumière se mobilisent pour retarder l’arrêt de la fabrication des lampes PAR. Mais nous savons le changement de pratiques inéluctable. Aussi bien pour la conception de l’éclairage que pour la partie technique.

Montage des projecteurs robotisés. / ©Ensatt

Il faut dire que le matériel s’est largement sophistiqué : les projecteurs sont dorénavant robotisés et programmables. Alors qu’autrefois, un projecteur ne nécessitait qu’un seul circuit de commande, aujourd’hui, il peut en compter plus d’une douzaine ! Le technicien qui pilote et assure la programmation des projecteurs asservis est devenu un spécialiste. Le pupitreur – c’est son nom – travaille étroitement avec le concepteur lors de la phase de création, puis assure la restitution des effets pendant la représentation.

À l’Ensatt, vous êtes responsable d’une formation de niveau master en conception lumière, la seule existant à l’échelon national. Comment intégrez-vous ces évolutions technologiques ?

Le master en question se déroule sur trois ans. Notre recrutement est le plus large possible : des jeunes qui ont un Diplôme National des Métiers d’Art et du Design (Bac + 3) avec une formation en régie lumière, mais aussi des étudiants venant de Philosophie, des Beaux-arts, des géographes… Car ce que nous recherchons, c’est avant tout un œil, un regard, une sensibilité… Si la formation est à la fois artistique et théorique, nous nous efforçons de donner aux étudiants le bagage technique maximal sur l’éclairage. Nous faisons une mise à niveau pour certains de sorte à nous assurer qu’ils maîtrisent les outils du régisseur, c’est-à-dire de celui qui met en œuvre les choix du concepteur lumière, lorsqu’ils ont leur diplôme. En effet, en début de carrière, il n’est pas rare de devoir porter les deux casquettes pour faire sa place dans le milieu. L’enseignement pratique est au cœur de la formation : beaucoup de travail en équipe et de mises en situation réelle, sur les planches. Ce qui les attend par la suite !

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Notes :

[1] RVB : Rouge Vert Bleu

[2] Projecteur PAR : projecteur à réflecteur parabolique aluminisé.

 

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Éclairage des villes : à Lyon, des réflexions pour « sculpter l’ombre » | The Conversation

ÉÉclairage des villes : à Lyon, des réflexions pour « sculpter l’ombre » | The Conversation

La crise de l’énergie va imposer un hiver très économe en éclairage public et susciter nombre d’extinctions en cœur de nuit. Le phénomène n’est pas nouveau et beaucoup de communes pratiquent déjà l’extinction, aux motifs de diminuer les pollutions lumineuses, préserver le ciel étoilé, et réduire la facture énergétique.

Ces politiques se diffusent depuis vingt ans, depuis les territoires des parcs naturels vers les zones rurales, touchant finalement les bourgs, les villes moyennes et désormais les métropoles, confrontées au défi de trames noires urbaines, ou comment organiser dans le territoire des corridors de relative obscurité (Rennes, Lyon…) permettant de concilier vie urbaine et biodiversité.

Universitaires, astronomes, associations, documentent ou soutiennent ces démarches de sobriété lumineuse (Collectif Renoir, ANPCEN, FNE…), avec une audience croissante, au point que les éclairagistes et concepteurs lumière, doivent intégrer le déséclairage comme une compétence nouvelle. La plupart revendiquent désormais des approches mesurées, dans le respect de la nuit, de façon à « sculpter l’ombre », pour reprendre la formule de l’architecte Jean-Yves Soetinck.

Article publié par The Conversation le 29 décembre 2022

Auteur : Jean Michel Deleuil, Professeur des universités en géographie, aménagement & urbanisme, INSA Lyon – Université de Lyon.

>> Lire la suite de l’article sur :

The Conversation

 

La nuit est belle, rallumez les étoiles !

LLa nuit est belle, rallumez les étoiles !

Cette soirée d’extinction de l’éclairage public à Lyon est une action ambitieuse pour marquer les esprits et permettre à tous les citoyens du bassin lyonnais de retrouver la nuit et ses merveilles, pendant une soirée !

Vue de l aterre plongée dans la nuit, mais avec éclairages publics

©NASA Earth Observatory/Robert Simmon/Chris Elvidge/NOAA

Jusqu’aux années 1950, la plupart des humains avaient la possibilité de voir le ciel, voir les étoiles, voir la trace de notre Galaxie, dénommée Voie Lactée par les Grecs du fait de son apparence en trainée lumineuse qui traverse le ciel. L’augmentation de l’éclairage public a entrainé au fil des années une intensification de la pollution lumineuse sur la majeure partie de notre planète. Progressivement, cette pollution a fait disparaitre la possibilité de voir la Voie Lactée dans toutes les zones urbaines. Seules quelques étoiles les plus brillantes et les planètes sont aujourd’hui encore visibles dans le ciel nocturne des grandes agglomérations, nous faisant presque oublier l’existence de ces
astres et notre place dans l’univers.
Les astronomes ont essayé, dès les années 1970, de lutter contre l’augmentation de la pollution qui dégradait même les sites d’observation les plus reculés. Maintenant, les études en particulier de l’ANPCEN et de l’ADEME ont démontré qu’au-delà de la déconnexion avec notre environnement qu’elle implique, la pollution lumineuse a également des impacts négatifs sur la biodiversité, la santé humaine et la consommation d’énergie.

Neuf communes, Brignais, Chaponost, Millery, Montagny, Saint-Genis-Laval, Vernaison, Vourles, Jonage et Meyzieu n’allumeront pas leur éclairage public ce 21 mai. La Ville de Lyon participera de façon symbolique en éteignant certains bâtiments.

Organisée par : Isabelle Vauglin et Jenny Sorce du CRAL, la SAL et les mairies des communes citées.

Avec le soutien de : plusieurs associations et le LEHNA.

Et la collaboration de : équipe La nuit est belle ! du Grand Genève

En savoir plus :

La nuit est belle !

>> A suivre aussi sur Facebook : @lneblyon

PProgrammation spéciale à Vourles

CréAct’IV Sciences organisera un live interactif depuis le stade de la Ville de Vourles, via la plateforme youtube dès 20h00 ce vendredi 21 mai.

Le live sera interactif, vous pourrez poser vos questions aux intervenants via le tchat youtube du streaming, que ce soit pour les conférences ou les observations et explications.

  • 20h : début du live
  • 20h30 : conférence Sensibilisation pollution lumineuse par CréAct’IV Sciences en streaming
  • 21h15 : conférence L’éclairage nocturne aggrave le changement climatique par Météo France en streaming
  • A différentes reprises pendant le live :

– observations astronomiques avec CréAct’IV Sciences : observations aux instruments et planétarium, retransmises en direct | Sous réserve d’une météo favorable, remplacer par des présentations / conférences et planétarium si mauvaises conditions) ;

 – contes au clair de Lune par la France Nature Environnement Rhône : petits contes plein de poésie pour accompagner notre nuit, par France Nature Environnement Rhône.

>> Liens de l’événement CréAct’IV Sciences à Vourles : cliquez ICI

 

 

Pollution lumineuse : la promesse de jours sans nuit ?

PPollution lumineuse : la promesse de jours sans nuit ?

Une heure de réflexions et débats sur la qualité de nuit, la vie nocturne et les nuisances lumineuses.

Plein feux sur les étoiles avec ce débat mêlant les aspects juridiques, biologiques et techniques de l’éclairage. Quels sont les effets de la lumière sur nos environnements nocturnes, nos comportements et ceux des animaux ? Faut-il instaurer un droit à la nuit ?

>> Ré-écoutez le podcast de l’émission radiophonique enregistrée le 5 décembre 2018 à La Commune (Lyon), dans le cadre du Pop’Sciences Forum  Citoyens, la ville de demain vous appartient !

 

  • Invités : Thierry Lengagne, chercheur en biologie animale (Université Claude Bernard Lyon 1, Laboratoire d’Ecologie des Hydrosystèmes Naturels et Anthropisés); Hélène Foglar consultante (Athena-Lum), Jean-Michel Deleuil, géographe et professeur des universités (INSA de Lyon, laboratoire Triangle)
  • Animation : Samuel Belaud (Université de Lyon)