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EN SAVOIR PLUS

L’âge des Migrations : les peurs confrontées aux analyses démographiques et statistiques

LL’âge des Migrations : les peurs confrontées aux analyses démographiques et statistiques

Des migrants fuyant la misère, les persécutions ou le changement climatique : telle est l’image qu’on nous renvoie sans cesse. Mais les migrants sont aussi, de plus en plus, des personnes compétentes et diplômées…

L’homme migre depuis son apparition sur Terre – et ça lui a réussi. Le désir de changer de pays n’a jamais été aussi répandu qu’aujourd’hui. Contrairement aux idées reçues, les murs et les barrières que dressent les nations ne bloquent pas les migrants, mais les sélectionnent. Un nouvel équilibre mondial des compétences se met irrésistiblement en place. Hervé Le Bras nous invite à poser sur les migrations un regard neuf, impartial et salutaire. La compagnie théâtrale « Il sera une fois » propose plusieurs petites histoires humoristiques et impertinentes, créés spécialement pour cette conférence et mise vidéo par Gerardo Ramos.

Intervenants :

  • Hervé Le Bras est démographe et historien, spécialiste français en histoire sociale et en démographie nationale et internationale. Directeur d’études à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS) et directeur de recherche émérite à l’Institut national d’études démographiques (INED). Il est l’un des plus grands spécialistes français en histoire sociale et en démographie nationale et internationale. Il est l’auteur de nombreux ouvrages sur les sujets liés l’immigration.
  • La compagnie « Il sera une fois » est un collectif d’artistes professionnels du spectacle vivant, réunis autour d’une même passion : le désir de porter, transmettre, créer, partager un savoir-faire en des lieux inattendus, hors cadre… Depuis vingt-deux saisons, la compagnie crée sur mesure des évènements et interventions théâtrales en des lieux variés : musées, chantiers, rues, châteaux, hôpitaux, bibliothèques, entreprises…

>> Plus d’informations :

Confluence des savoirs

Fondation innovation et transition

En partenariat avec la Fondation Innovation et Transitions

1983 : un tournant pour comprendre le monde d’aujourd’hui

11983 : un tournant pour comprendre le monde d’aujourd’hui

1983 est une année charnière sur le plan économique, politique et social. Revenir sur ce virage des années 80, c’est se poser la question du contemporain et de la dislocation du lien de solidarité qui unissait français et immigrés dans un contexte de crise économique grandissante et d’augmentation du chômage.

Cela pose aussi la question du « rendez-vous raté » (Beaud, Masclet) entre la gauche et les banlieues, en soulignant aussi la récupération des luttes des jeunes français issus de l’immigration et de leur marginalisation.

Intervenants :

  • Samir HADJ BELGACEM, maître de conférences en sociologie, Université Jean Monnet – Saint-Étienne,
  • Alice CARRÉ, conception et écriture du spectacle 1983,
  • Margaux ESKENAZI, conception et mise en scène du spectacle 1983.

Animée par  : Philippe DELAIGUE, maître de conférences en histoire du droit, Université Jean Moulin Lyon 3.

En partenariat avec : le TNP – Villeurbanne et le Collège de Droit de l’Université Jean Moulin Lyon 3.

Pour en savoir plus :

Université Jean Moulin Lyon 3

Identité, Mémoire, Immigration | Saïgon, mon amour

< Identité, Mémoire, Immigration | Saïgon, mon amour

En raison du mouvement de grève touchant les transports ferrés le jour de la conférence – nous ne pourrons pas assurer la présence de nos invités. Nous sommes au regret d’annuler cette conférence.

Débat et regard croisé art & sciences sur les effets de l’immigration vécue et perçue. Le cas des rapatriés Français d’Indochine.

L’immigration n’est pas un simple déplacement d’un point vers un autre. Il s’agit d’un processus long qui engage le corps et l’esprit des personnes qui le vivent. Cette ligne droite parcourue est celle du partage et de la différenciation. Elle se définit au regard des autres, les instituant eux-mêmes en Autre.

Cet Autre qui est dénommé Vit Kiều (litt. « vietnamien étranger ») au Viêtnam.

Ils ne sont plus « nous », ils ne seront jamais totalement « eux » alors qui sont-ils ? Ce parcours marque de manière indélébile et invisible ceux qui l’ont vécu et ceux qui en sont les témoins. Au premier rang se trouvent leurs descendants : une origine dite étrangère, une nationalité officiellement française et une identité… Franco-Việt.

Saigon @Jean Louis Fernandez

Qu’est-ce que cette culture ? Une adaptation de l’ancienne aux normes de la nouvelle ? Un ajustement de la nouvelle aux normes de l’ancienne ? Quelle qu’elle soit, le passé est toujours présent. Et pourtant si dans les faits la vietnamité transcende, dans les mots elle se veut silencieuse. Toute la complexité de ce parcours repose sur la dialectique identité/oubli pour les uns et mémoire/origine pour les autres.

C’est à partir de l’œuvre Saïgon, jouée du 4 au 7 avril au Théâtre de la Croix-Rousse, que ces thématiques seront abordées.

L’artiste Caroline Guiela Nguyen nous fait l’honneur de sa présence pour échanger autour de sa pièce et réfléchir ensemble à ces questionnements. A ses côtés, se tiendra Marie Hamid en vue d’apporter un éclairage scientifique sur ces problématiques.

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Intervenantes

© portrait : Julien Pebrel

Caroline Guiela Nguyen est metteuse en scène et autrice de théâtre française. Son parcours artistique puise sa force de ses origines. Sa mère, vietnamienne arrive en France en 1956.Elle y retournera une décennie plus tard accompagnée par sa fille. Après des études de sociologie et d’arts du spectacle à l’université de Nice, Caroline Guiela Nguyen intègre l’école du Théâtre national de Strasbourg en mise en scène en 2006. En 2009, elle fonde la compagnie Les Hommes approximatifs qui met en espace Gertrude, d’Einar Schleef, au Théâtre Gérard-Philipe de Saint-Denis en juin 2009.

Après avoir monté de grands classiques [L’Échange (Paul Claudel) et de Madame Bovary (Gustave Flaubert).], la compagnie s’engage sur un travail sur les histoires intimes liées aux bouleversements géopolitiques, sur les histoires absentes des plateaux de théâtre. Dès lors, la compagnie ne cesse de peupler la scène du monde qui l’entoure… Se souvenir de Violetta (2011), Ses Mains et Le Bal d’Emma (2012), Elle brûle (2013), Le Chagrin et Le Chagrin (Julie & Vincent) (2015) – Grand Prix Italia 2016 de la création radiophonique et Grand Prix 2016 de la Société des gens de lettres (SGDL) de la Fiction radiophonique, Mon grand amour (2016). En 2017, Caroline Guiela Nguyen s’interroge sur l’histoire du Vietnam et sa propre histoire avec la pièce Saïgon, qu’elle présente au Festival d’Avignon et qui s’ancre aujourd’hui sur la scène du Théâtre de la Croix-Rousse.

Marie Hamid est doctorante-chercheure en Sciences de l’Information et de la Communication. Elle réalise une thèse intitulée « Le devoir de patrimonialisation : représentations des cultures issues de l’immigration. Le cas de la culture vietnamienne. ». Celle-ci porte sur les représentations individuelles et collectives ainsi que sur les processus de médiatisation de la culture dite vietnamienne à l’œuvre dans la société. Ses travaux actuels portent plus spécifiquement sur la communauté des Français d’Indochine rapatriés au Camp d’Accueil de Noyant d’Allier entre 1955 et 1975 et leurs descendants. Elle interroge leurs rapports à leur culture ainsi qu’à leur histoire.

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Saigon, mon amour

Les Hommes Approximatifs / Caroline Guiela Nguyen)

Du 4 au 7 avril 2018 au Théâtre de la Crois-Rousse

Dans un restaurant en France, la mémoire de Saigon.

Saigon @ Théâtre de la Croix-Rousse

Après Elle brûle et Le Chagrin, Caroline Guiela Nguyen et Les Hommes Approximatifs reviennent à La Croix-Rousse avec leur nouvelle création, Saigon. «Saigon, nous dit Caroline Guiela Nguyen, n’existe plus. Un jour, une personne qui était arrivée en France en 1954 m’a dit: la plus grande tragédie des Vietnamiens est que nous avons voulu nous intégrer, que nous y sommes arrivés et qu’on nous a oubliés.» Alors l’équipe des Hommes Approximatifs est partie à Hô Chi Minh-Ville, à la recherche de ces histoires oubliées et en est revenue avec toute une polyphonie d’histoires d’amour et d’exil, des comédiens vietnamiens, des chansons d’amour et le désir de créer un spectacle qui aura pour cadre un restaurant méticuleusement reconstitué sur le plateau.

«Je pense que tout notre travail pourrait se résumer à cette image-là, dit-elle, l’idée de rassembler des gens d’horizons différents et de les mettre tous autour d’une table pour partager quelque chose que l’on a pris du temps à préparer». Mais chez Caroline Guiela Nguyen, la fête se trouble toujours. Les repères vacillent. Les fantômes apparaissent. Dans ce restaurant vont coexister à la fois la France de 1996 et le Saigon de 1956. Ces deux mondes qui se sont croisés, aimés, détruits puis oubliés pendant 40 ans.

Plus d’infos sur le spectacle

 

Exilé en sursis

EExilé en sursis

Comprendre les phénomènes migratoires contemporains, c’est également s’intéresser aux parcours, au rapport à l’espace et aux circulations des exilés dans nos villes. Une nouvelle lecture de nos espaces quotidiens s’offre alors à nous – et nous permet de mieux comprendre la lourde réalité de l’ultime étape du parcours souvent périlleux des migrants.

A l’arrivée, il faut nouer des relations, s’informer, survivre, se déplacer, tuer l’ennui … en même temps que l’administration publique acte une destinée : légal ou illégal … recevable ou irrecevable … ?

Autant d’étapes et de réalités auxquelles de nombreuses personnes sont confrontées chaque jour et depuis très longtemps.

 

 Exilé en sursis. Aux aurores d'une belle journée d'été, X arrive en gare. Voie C, il sort du TGV 9240 en provenance de Modane. Un large panneau bleu indique : GARE DE LYON PART-DIEU. Il y a encore 15 jours il s'asseyait au fond d'un zodiac surchargé, fuyant trois années d'enfer libyen. Parcours. Une fiction interactive produite par l'Université de Lyon dans le cadre des 13e rencontres Et si on en parlait. [Direction Culture, Sciences Société : Samuel Belaud] [Master VEU : Johanna Lubineau ; Eya Naimi ; Lucas Hurstel]

@Myrelingot

TTerminus ?

En arrivant en gare, X entre dans la ville par la grande porte. Cet espace est autant pour lui l’aboutissement d’un long déplacement, qu’un lieu de passage où il va commencer à éprouver une nouvelle et particulière phase : l’attente.

C’est aussi une étape dans son projet migratoire où, comme tout au long de son déplacement, il fera appel à une logistique des relations, sollicitera de la ressource financière et des connaissances pratiques et pragmatiques sur les infrastructures que X va rencontrer. Ici, les migrants trouvent à la place de lieux d’accueil moins présents que par le passé (cafés et hôtels), le centre commercial et la bibliothèque. L’historienne Manuella Martini explique* que longtemps près des gares (ces “portes de la migration”), on trouvait des bâtiments dédiés aux visites administratives, médicales que devaient passer les nouveaux arrivants. Aujourd’hui ces structures font toujours parties du bâti, mais sont intégrées à la ville et non plus clairement présentes dans les lieux d’arrivée.

Pour X, les gares ne semblent pas tournées vers l’accueil des populations et il fait face à une « vitrine ».

* M. Martini – Université Lumière Lyon 2 – LARHRA ; lors de la balade urbaine Balade urbaine « Traces des migrations dans la ville » – 25.11.17  [org. : Université de Lyon – Association Pas de côté].

La gare est la première image que X a de son lieu d’arrivée. Elle fait la transition entre l’échelle large du chemin de l’exil qui couvre plusieurs pays et celle, plus restreinte, de la seule ville où vont se concentrer ses démarches administratives, ses relations sociales et ses espoirs de construire un nouveau projet de vie.

S’organiser dans l’espace

X doit rapidement s’organiser pour s’adapter à l’espace, souvent contraint (par des barrières par exemple), et tirer parti de ce que les lieux autour de la gare peuvent lui offrir comme éléments de confort. Utiliser un espace qui ne lui est pas destiné de prime abord, c’est devoir interagir avec d’autres migrants pour s’insérer dans le fonctionnement des lieux. Le centre commercial revient plus souvent dans ses pratiques que la bibliothèque (située à côté), car paradoxalement plus accueillant, sans sas d’accès ni barrière.

Il offre la possibilité d’accéder à des sanitaires, de recharger son téléphone, d’accéder à internet dans un espace aux fonctionnalités très lisibles et que X n’est pas seul à utiliser.

Lyon_Gare_Part-Dieu_migration_Pour lui, recréer avec d’autres migrants une organisation pratique, pour la surveillance des biens de chacun par exemple, ou bien élaborer un gouvernement fictif, c’est aussi commencer à reconstituer sa citoyenneté.

 

Les migrants arrivant en gare se heurtent aussi aux imaginaires que nous projetons (dans l’espace et à propos des migrants eux-mêmes).

De façon concrète, X peut ainsi faire face à une diversité d’aménagements destinés aux voyageurs, par exemple les espaces d’attente, qui ordonnent, sans injonction directe, leurs mouvements dans l’espace, mais qui ne permettent pas à X de les utiliser sur un temps long (Sauget, 2009).

Pourtant il est indispensable pour X de parvenir à s’approprier l’espace, matériellement et sensiblement, afin de ne pas tomber dans le “chaos”. Pour Vincent Veschambre l’appropriation de l’espace n’est pas seulement son occupation mais est porteuse de la “dimension spatiale des rapports sociaux”. X s’approprie donc autant l’espace de la gare qu’un voyageur quotidien, parce qu’il marque l’espace, le détourne et le valorise en lui donnant un autre sens. Un sens qui amène X a être stigmatisé, puisque l’appropriation de la gare en espace habité n’est pas envisagé par le reste de la population.

“L’appropriation de l’espace, définie de manière générale comme une mise en sens de l’espace, est indispensable au migrant pour qu’il ne tombe pas dans le chaos. Sa double dimension idéelle et matérielle a été soulignée par Di Méo (1998) et rappelée par Ripoll et Veschambre (2005 : 10) pour qui « penser en termes d’appropriation de l’espace conduit à envisager l’occupation ou l’usage de l’espace, mais aussi sa production et son détournement, son marquage, sa valorisation ou inversement sa stigmatisation »” (BRUSLE, 2010)

<captation sonore > témoignage

Balade urbaine « Traces des migrations dans la ville » – 25.11.17  [Université de Lyon – Antoine Dubos – Association Pas de côté]

 

Contacts et premières relations

La gare n’est pas seulement un lieu de passage, elle peut aussi être considérée comme un espace de relations et de ressources pour X.

Parfois hiérarchisés, les groupes humains qui s’établissent aux abords de la gare permettent bien souvent de rencontrer des personnes issues d’un même pays ou d’une même aire géographique. Dès lors l’arrivée solitaire prend une autre dimension et se transforme au contact de ces personnes ressources, permettant de s’orienter plus facilement dans la vie d’arrivant. Grâce à leur retour d’expériences, les migrants anciennement arrivés peuvent apporter des conseils qui facilitent l’entrée dans le territoire.

Ainsi la gare devient un lieu de “contact” majeur pour les populations migrantes. Roger Béteille qualifie ce genre d’espace d’“humain”. Il le divise entre l’espace géographique et l’espace relationnel. Le premier revient à considérer les espaces – au sens de leur spatialité – de départ, d’arrivé et d’étape (s’il y en a). Le second correspond aux “ […] liens complexes, concernant à la fois les groupes migrants et l’espace géographique dans lequel s’est développé le mouvement migratoire”.

En fait, on peut assimiler l’espace relationnel à un lieu où se nouent des relations avec des personnes émigrées ou autochtones. Dans le cas d’X, la gare Part-Dieu est bien un espace relationnel puisque lui comme les autres migrants ont des relations avec des semblables ou avec des travailleurs “locaux”.

Les personnes ressources peuvent être aussi bien elles-mêmes migrantes (plus ou moins avancées dans les démarches administratives), issues du monde associatif, administratif, etc.  En ce sens, la solidarité joue à plein dans le cadre des migrations de longue durée. Tout un tissu d’acteurs, dont de nombreux non-institutionnels, se met en place pour assurer un accueil aussi digne que possible des populations migrantes.

Finalement on pense bien souvent à la gare comme un lieu public de passage, le plus souvent associé à un espace vécu où la foule domine. Pour X, cela peut aussi être un espace qu’il s’approprie et où il peut établir des premières relations sociales avec les autres usagers ou travailleurs.

<captation sonore > témoignage

Balade urbaine « Traces des migrations dans la ville » – 25.11.17  [Université de Lyon – Antoine Dubos – Association Pas de côté]

Cet espace du quotidien que l’on qualifie parfois de non-lieu*, représente autre chose pour un public d’émigrés. La gare et en particulier ses abords représente un espace riche en ressources sociales. La fréquentation de la gare par des personnes dans des situations similaires, parfois d’aires géographique semblables, fait que cet espace constitue à lui seul un espace humain riche.

« D’après la définition de Marc Augé, un non-lieu est un espace interchangeable où l’être humain reste anonyme. Il s’agit par exemple des moyens de transport, des grandes chaînes hôtelières, des supermarchés, des aires d’autoroute, mais aussi des camps de réfugiés. L’homme ne vit pas et ne s’approprie pas ces espaces, avec lesquels il a plutôt une relation de consommation. » (AUGE, 1992)

VVille nouvelle  //  ville hostile

Les migrants sont surexposés dans l’espace public, du fait de leurs circulations urbaines caractéristiques (du squat des jardins publics à l’appréhension nouvelle du mobilier urbain, par exemple). Chacun s’approprie l’espace à sa manière, selon sa situation personnelle et ses conditions matérielles. Selon aussi les caractéristiques du territoire urbain et de son environnement (protection des intempéries), selon ses motivations (raisons du départ, représentations de l’espace d’arrivée et de ses habitants…), sa trajectoire biographique (migration solitaire, familiale, en groupe, etc.) et enfin selon les politiques locales à destination des migrants.

Dans tous les cas et nous l’avons constaté avec la gare ou le centre commercial, de nombreux arrivants passent la majeure partie de leur journée dans les espaces publics. Ces lieux constituent des endroits de pause, d’attente, d’échanges d’information. Des lieux-ressources et de sociabilité en somme. Pour tout nouvel arrivant au sein d’un espace social organisé, c’est une négociation de sa présence au sein de cet espace qui est à l’œuvre :

“Des stratégies de distinction s’engagent à l’intérieur d’un même espace-temps résidentiel [ici, une partie de l’espace public urbain lyonnais] entre les partenaires d’origines différentes que sont devenus les “entrants” et les “vieux nationaux” qui résistent à la pression des nouveaux venus”. (BASTENIER, 1993)

Reprenons le parcours de  X. Après une arrivée tumultueuse, solitaire et sans repère, il observe un paysage urbain bien différent de sa ville natale et il commence à identifier les fonctions sociales des différents lieux environnants. Il relève en face de lui une grande tour vers laquelle tout le monde semble se diriger.

 

Espace de repli

C’est le centre commercial « La Part-Dieu ». Nous l’avons évoqué précédemment, ce lieu devenu pour lui un refuge diurne, le protège des rigidités du climat et lui offre un sentiment de sécurité… Ce lieu a « augmenté » sa fonction principale de commerce avec celle de « refuge » pour certains néo-arrivants. Juste à côté du centre commercial, se situe la bibliothèque municipale, un autre espace d’abri dans lequel X trouvera plus tard (une fois évaporées les appréhensions d’un lieu “pas pensé pour lui”) de nouvelles fonctions de repos et de sécurité. Ce sera aussi pour lui l’occasion de se réinscrire dans des pratiques sociales et culturelles, avec un accès aux ouvrages et à internet.

Ces habitudes créent un sentiment de sécurisation du quotidien : les journées sont rythmées, les lieux sont connus et identifiés à certaines pratiques. Cela atténue un sentiment pesant d’insécurité et de solitude.

Mais l’ensemble des besoins d’X ne seront pas satisfaits dans le seul quartier de la Part Dieu. Pour trouver un point d’eau aisément accessible, un soutien psychologique, une aide et une information sur les droits qu’il peut faire valoir, pour engager les premières démarches administratives , …. X va opérer de nombreux déplacements fonctionnels qui constitueront le fil rouge de sa découverte de la ville.

 

Espaces de socialisation

Dans de nombreux récits les lignes de métro et de tramway constituent dans une trajectoire migratoire, la trame spatiale de la compréhension du territoire urbain.

Elles représentent le fil rouge que suit le migrant, parfois à pied, pour découvrir la ville. C’est un repère spatial primordial. Pour X,  c’est la ligne de tramway T1  qui a permis l’ouverture au territoire urbain. Reliant les stations « Debourg » et  « IUT Feysine », elle passe près des grandes institutions publiques de la ville, notamment la préfecture où  va déposer sa demande d’asile et la gare de La Part-Dieu qui constitue son lieu d’entrée à Lyon .

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Place D. Bahadourian – Lyon @Université de Lyon
Balade urbaine « Traces des migrations dans la ville » – 25.11.17 [Association Pas de côté]

À l’instar du centre commercial, d’autres espaces publics deviennent pour les migrants (en particulier les nouveaux arrivants) des espaces de socialisation*. La place Djebrail Bahadourian, renommée en hommage au fondateur l’épicerie éponyme en fait partie. Située dans le troisième arrondissement, près de la préfecture, plus précisément au sein du quartier de la Guillotière, elle est au cœur d’un espace d’accueil et de socialisation historique de différentes populations immigrantes. Cette place a été baptisée en hommage à l’épicerie arménienne de Djebrail Bahadourian : né en Anatolie turque, il est arrivé à Lyon, après une longue aventure de migration. Il a monté son premier magasin en 1929 juste en face de la place.

 

 

« S’approprier l’espace ne signifie pas uniquement maîtriser les lieux, c’est aussi apprendre à tisser un réseau relationnel dans les lieux : dans le capital spatial des hommes se loge un capital social. Ce dernier, thésaurisé, entretenu chaque année, prend progressivement de l’importance. Si les réseaux sociaux sont des facteurs de perpétuation des migrations (Massey, Arango et al., 1998), ils sont aussi attachés aux lieux dans lesquels ils s’inscrivent. L’ensemble des relations interpersonnelles que les migrants créent dans les lieux participe de la construction et de la valorisation de ces lieux. » (BRUSLE, 2010)

 

Les “espaces de socialisation” sont sans cesse remis en question et renouvelés (dans leurs usages), au fur et à mesure des passages de personnes qui n’y sont pas nécessairement attendues.

Il est rare de voir une place portant le nom d’un commerçant. la volonté de la ville de Lyon à sans doute été de faire reconnaître une certaine capacité d’accueil historique de la ville, de lui attribuer des valeurs de solidarité et d’ouverture à l’altérité. Peut-être s’agit-il aussi de mettre en avant un parcours migratoire d’intégration… Arrivera-t-il un jour où Monsieur X aussi aura une place à son nom ?

 

iimmigré catégorisé

Arrivé en France sans le sous ni hébergement, X doit entamer des démarches administratives s’il veut séjourner dans la légalité. Ne sachant pas vers qui se tourner, la police pourra être un intermédiaire pour lui. S’il rencontre des personnes ayant déjà été dans une situation similaire, X pourra se faire conseiller d’aller à la préfecture. C’est tout un processus d’apprentissage autour de la gestion légale des migrations auquel il va s’initier à partir de son arrivée.

X se rend en préfecture pour commencer les démarches d’obtention d’un titre de séjour ou pour déposer une demande de droit d’asile. Une file d’attente devant l’édifice public se dessine. A la fin, il se verra demandé de choisir entre deux directions : « étudiant étranger, rendez-vous asile, naturalisation par mariage » (à gauche) et « titre de séjour sauf étudiant étranger, titre de voyage » (à droite).

C’est à partir de ce moment-là que le jeu de la catégorisation commence.

La réduction des migrants à une catégorie traduit en fait un processus double. Premièrement, il conduit à « [mettre] en forme [le] monde social » (Martiniello, Simon 2005). On peut comprendre par cette formule que le fait de rationaliser l’environnement social par le classement de chaque individu dans une catégorie bien définissable, permette de “mieux” l’administrer, le quantifier et l’évaluer. Deuxièmement, la catégorisation est le moyen de distinguer des groupes qui seraient plus légitimes que d’autres à « participer à la vie démocratique et revendiquer éventuellement des droits » (Martiniello, Simon 2005).

L’usage des catégories ne se limite pas au champ politique. On peut citer le rôle des statisticiens qui en usent pour quantifier le type de répondants à une enquête, pour étudier les effets de telle ou telle politique sur un ou plusieurs catégories de population, etc. Le chercheur en sciences sociales peut lui aussi être convoqué dans l’ensemble des acteurs qui définissent, classent et séparent des groupes de personnes «homogènes» (Ibid.).

À l’inverse, on peut se poser la question de la construction de l’identité par les individus eux-mêmes. D’après Martiniello et Simon, la construction de l’identité est le fruit de rapports sociaux à plusieurs échelles (2005). Se jouent ici autant les rapports entre individus (interaction sociale entre deux personnes), l’échelle des représentations (collectives par rapport aux images personnelles) et plus largement le rapport au pouvoir (étatique et académique).

En somme, l’identité correspond à un questionnement sur plusieurs niveaux : à quel point je suis proche et je peux reproduire certaines actions de membres de ma famille ou de mes amis, comment j’adhère ou non à des croyances collectives et comment je me situe par rapport au débat politique ou scientifique. Pour élargir le débat sur l’utilisation des catégories, il parait judicieux de mettre en regard des événements historiques ou législatifs liés aux flux migratoires à partir de la fin du XXe siècle.

<captation sonore

Balade urbaine « Traces des migrations dans la ville » – 25.11.17  [Université de Lyon – Antoine Dubos – Association Pas de côté]

Au cours de la crise économique des années 1970 est apparue la notion de « clandestinité » dans le débat législatif.

Ce terme opère une distinction nouvelle entre deux migrants. Le clandestin est le migrant qui est dans une situation irrégulière sans pouvoir être régularisé immédiatement, qui ne peut donc prétendre de façon durable à l’accès au séjour régulier (Spire, 2005, p. 245 cité par Le Courant 2016, p. 24). Il est donc plus négatif que « l’irrégulier » qui lui a des chances d’être régularisé, en particulier à l’embauche. Dès lors, le champ politique s’est servi du clandestin comme bouc émissaire, il devient « source de menaces diverses, pour l’économie nationale et son système de protection sociale ou pour l’ordre public » (Le Courant ,2016, p. 24).

Une nouvelle crise économique secoue la planète à partir de 2007-2008 et le président de la République de l’époque (N. Sarkozy) institue un ministère de « l’Immigration, de l’Intégration, de l’Identité nationale et du Développement solidaire » (2007-2010).

Le débat médiatique a été intense durant cette période sur la façon dont l’immigration était pensée au sommet de l’Etat. La politique migratoire s’est principalement axée sur la notion d’immigration «choisie» comparée à l’immigration caractérisée jusqu’alors de «subie» par le gouvernement. Le sociologue Eric Fassin dans un article du monde diplomatique paru novembre 2009 souligne un paradoxe lié à cette rhétorique politique. Il y voit derrière le qualificatif de « choisie » la cohorte de migrants économiques, tandis que celui dit « subi » fait référence aux migrations pour raison familiale. Le paradoxe tient dans l’idée le fait que le migrant de travail a des logiques sociales et affectives qui entrent aussi en ligne de compte dans le choix de la migration, la rationalité n’est pas seulement économique. Inversement, les regroupements familiaux n’excluent pas les logiques économiques. Ainsi les politiques migratoires ont-elles tendance à se durcir lors de crises économiques.

Aujourd’hui, nous pouvons nous interroger à propos de la sémantique employée dans le débat public sur les migrations et le sens que revêtent les mots « migrants » et « réfugiés ». Selon Claire Rodier, directrice du GISTI (Groupe d'Information et de Soutien des Immigré.e.s) et co-fondatrice du réseau euro-africain Migreurop, cette « distinction […] vise à établir une hiérarchie entre les migrants dit économiques auxquels les États pourraient refuser l'accès à leur territoire, et les bons réfugiés qui méritent protection et accueil » (Foegle, Bourdier 2015, p. 2).

@Pizzettaro

La difficulté à employer un terme adéquat peut encore s’accentuer lorsqu’on considère les trajectoires biographiques des individus.

Ainsi nous ne pouvons pas penser les catégories de façon durable. Par exemple on peut être clandestin lors de la traversée de la mer Méditerranée, refuser la prise des empreintes digitale à l’arrivée en Grèce  (et éviter d’être “dubliné”), devenir irrégulier en passant par la France et déposer une demande d’asile une fois arrivé en Allemagne.

<captation sonore

Balade urbaine « Traces des migrations dans la ville » – 25.11.17  [Université de Lyon – Antoine Dubos – Association Pas de côté]

En somme, plusieurs acteurs utilisent des catégories pour décrire des groupes de personnes dans une logique de rationalisation du paysage social (essentialisation des groupes sociaux) et de reconnaissance de certaines minorités (assortie d’une légitimité et de droits sociaux).

Aussi, la construction d’une identité n’est pas que donnée. Elle s’affirme naturellement à des degrés divers d’interaction sociales.

LL’aTTENTE

Depuis qu’il a posé le pied sur le quai, X a cherché à pérenniser son séjour dans l’objectif d’obtenir une régularisation de sa situation. D’abord en s’appropriant des espaces (de repli, de confort, d’échanges, …); puis en les fréquentant assidûment et répétitivement. Alors, au moment d’entamer les démarches auprès des services administratifs, X sait qu’il sera encore davantage confronté à cet espace-temps où s’entremêlent les sentiments de désir, de frustration, de peur, d’ennui ou encore d’impatience : l’attente.

 « Les séquences interstitielles, ou temps d’arrêt, ou temps morts, qui s’insèrent dans les parcours migratoires et qui sont plus largement consubstantiels au mouvement lui-même, pour, de là, interroger les vécus, les socialisations labiles qui se mettent en place dans l’attente » (Kunth).

<captation sonore – Témoignage

Balade urbaine « Traces des migrations dans la ville » – 25.11.17  [Université de Lyon – Antoine Dubos – Association Pas de côté]

L’attente en situation migratoire est ce que Carolina Kobelinsky qualifie de « temps dilaté et espace rétréci ». Un moment où se confrontent d’un côté le sentiment d’ « inutilité sociale » (Giorgio Agamben), de l’autre la création d’effets de socialisation (solidarité, amitiés, loisirs, échanges économiques, entraide, démocraties de groupes) décrites au début de cet article.

Après la période d’arrivée et de prise de repère sur le lieu où il souhaite se fixer, X va devoir s’armer de patience au moment de procéder à la première étape officielle, l’enregistrement. Douze à quinze mois en moyenne, le sépare d’une décision définitive de l’État : titulaire ou débouté du droit d’asile. L’administration publique jalonne cette attente par de nombreuses étapes de procédures suivantes

“La confrontation de temporalités contradictoires, conjuguant temps longs et vides d’une part, et accélérations brutales d’autre part (lors des expulsions notamment). Privés de la maîtrise du présent et du futur, dépendants des temporalités institutionnelles, ces voyageurs n’ont d’autre choix que de vivre dans cette « double crainte temporelle ».” (VIDAL, MAKAREMI, MICHALON, 2015)

L’attente, c’est aussi pour X la précarité de celui qui a peur, qui n’est pas maître de son projet d’épanouissement personnel et professionnel.  Cette incertitude apparaît à la fois comme une cause d’instabilité psychique ou physique (fruits de l’inactivité) et une conséquence de logiques temporelles que seule l’administration maîtrise.

Balade urbaine sur les traces des migrations en ville. [Université de Lyon – Association Pas de côté]

 

Plus d’informations et de ressources issues des 13è rencontres Et si on en parlait « Migrations. Hommes et cultures en mouvements« 

Bibliographie

AUGE M., 1992, Non-lieux. Introduction à une anthropologie de la surmodernité, Paris, Le Seuil.

BACON L., PENICAUD M., 2015, « Penser la migration depuis les espaces de l’attente ». Compte-rendu du séminaire « Sources et méthodes ». En ligne : http://migrinter.hypotheses.org/2267

 

BASTENIER A., 1993, Immigration et espace public : La controverse de l’intégration, Paris, L’Harmattan.

BÉTEILLE R., 1981, « Une nouvelle approche géographique des faits migratoires : champs, relations, espaces relationnels », dans L’Espace géographique, n° 10, vol. 3, pp. 187‑197.

BRUSLE T., 2010, « Rendre l’étranger familier. Modes d’appropriation et de catégorisation de l’espace par les migrants népalais en Inde », Revue Européenne des Migrations Internationales, n° 26, vol. 2, pp. 77 – 94.

HENNION A., 2012, « La gare en action. Hautes turbulences et attentions basses », Communications, n° 90, vol. 1, pp. 175-195. En ligne : https://www.cairn.info/revue-communications-2012-1-page-175.htm

MARTINIELLO M. & SIMON P., 2005, « Les enjeux de la catégorisation : Rapports de domination et luttes autour de la représentation dans les sociétés post-migratoires », Revue européenne des migrations internationales, n° 21, vol. 2, pp. 7 – 18. En ligne : https://www.cairn.info/revue-europeenne-des-migrations-internationales-2005-2-page-1.htm

MAZZELA S., 2004, « Belsunce, laboratoire urbain de la migration ? (note critique) », n° 7, vol. 2, Terrains et Travaux : Revue de Sciences Sociales, pp.19-24.

POLINO M.-N., 2010, « Note de lecture » de l’ouvrage de SAUGET S., 2009, À la recherche des pas perdus. Une histoire des gares parisiennes (Paris, Tallandier, 241 p.), parue dans Revue d’histoire du XIXe siècle, n° 40. En ligne : http://journals.openedition.org.bibelec.univ-lyon2.fr/rh19/4010

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Ce travail a bénéficié d’une aide de l’État gérée par l’Agence Nationale de la Recherche au titre du programme d’Investissements d’avenir portant la référence ANR-17-CONV-0004.

Frontières. Effacer ou consolider ?

FFrontières. Effacer ou consolider ?

L’existence même des frontières est une invitation à les surpasser pour découvrir, se confronter, s’étendre, se rapprocher de l’altérité. Instituées depuis les prémisses de notre ère comme les remparts (symboliques ou fortifiés) nationaux et/ou identitaires des communautés, elles sont aujourd’hui représentatives des enjeux liés aux migrations contemporaines.

Découvrez certaines clés de compréhension des enjeux liés aux lignes démarquantes de notre monde.

> Podcast de la conférence-débat, avec Yvan Gastaut enregistrée le 18 octobre 2017 à l’Université de Lyon (Lyon 7è) dans le cadre des 13e rencontres « Et si on en parlait ».

  • Yvan Gastaut : Unité de Recherche Migrations et Société (Urmis) CNRD/IRD – Universités Paris Diderot – Nice Sophia Antipolis)
  • Soirée animée par Raphaël Ruffier Fossoul (rédacteur en chef – Lyon Capitale)
Découvrez d’autres ressources et articles sur le blog ET SI ON EN PARLAIT

Crédit photo : Manifestation pour le droit des migrant-e-s (Lausanne, le 9 mai 2015). DeGust-CC-BY-NC-ND

Exode(s) Charnel(s). Parcours de la migration à la prostitution

EExode(s) Charnel(s). Parcours de la migration à la prostitution

L’Université de Lyon propose une plongée fictionnelle et interactive basée sur des travaux de recherche et proposée dans le cadre de la 13e édition des rencontres « Et si on en parlait« .

A travers les parcours, fictifs, de trois prostituées originaires de Chine, du Nigéria et de Bulgarie, tentons de comprendre les logiques prostitutionnelles et de migrations. Des raisons de la prostitution, aux rites ou l’embrigadement dans des réseaux jusqu’à l’arrivée … cette immersion est l’occasion d’une analyse profonde des conditions sociales de vie et de « travail » des prostituées migrantes : la notion de dette, le rapport à l’identité, au corps et les rapports sociaux au sexe. Enfin il s’agira aussi d’étudier les possibles fins de parcours … comment s’en sortir ?

Donner à comprendre la prostitution par le prisme des migrations, c’est se détacher des regards contradictoires portés sur les prostituées elles-mêmes : à la fois victimes et participant de troubles à l’ordre public. Abordés depuis peu dans une réflexion associant les deux sujets, Migration et Prostitution recouvrent pourtant ensemble, une réalité socio-historique importante. En effet la population concernée et les terrains d’enquêtes ont pu paraître peu aisés à approcher (moins désormais) tant la conjonction de situations sociales stigmatisantes pousse ces personnes au ban de la Société.

À la lecture d’ Exodes charnels, nous constatons que depuis quelques dizaines d’années et grâce aux travaux précurseurs de plusieurs chercheur-e-s, les études relatives à cette minorité composée des femmes combinant les conditions de prostituées et de migrantes, permettent de donner des clés de compréhension de phénomènes plus larges de nos sociétés.

Nous observons également que pour ces femmes, l’intérêt propre ne prenant plus le pas, elles sont malgré elles poussées à une forme d’acceptation de brutalité ou d’insécurité. Et la condition de migrante ajoute à cela des « étapes de violences » (le rite, la dette, l’embrigadement, les filières de l’exil, etc.) à celles déjà importante des conditions in situ (sanitaires et sociales pour ne citer qu’elles). L’exploitation des corps se confond alors pour ces femmes dans une triple contrainte : pécuniaire (remboursement), de survie et de travail.

 

exodes-charnels.universite-lyon.fr

Et si on en parlait ? / 13e édition

EEt si on en parlait ? / 13e édition

CONFÉRENCES, RENCONTRES, PROJECTIONS, DÉBATS, ATELIERS, BALADES URBAINES, SPECTACLES, TABLES RONDES, …

Pour questionner les mouvements des Hommes et des cultures, la 13e édition des rencontres ‘Et si on en parlait’ veut sortir du tourment médiatique, prendre le temps de l’enquête, de l’analyse et du débat. Les recherches en histoire, anthropologie, sociologie, sciences politiques, environnement, … offrent une approche plus large, contextualisée et au-delà des controverses de ces phénomènes. Ainsi, durant un mois et demi, l’Université de Lyon convie ses chercheurs aux côtés de la société civile et des artistes pour engager le dialogue et offrir un nouveau regard sur les migrations. 

VISITEZ LE BLOG ETSIONENPARLAIT.HYPOTHESES.ORG

♦ PROGRAMMATION

 

Exodes charnels. La prostitution à l’épreuve des migrations

EExodes charnels. La prostitution à l’épreuve des migrations

(Dans le cadre des 13e rencontres Et si on en parlait)

Les espaces communs entre migration et l’industrie sexuelle sont complexes. Afin de ne pas réduire les travailleurs migrants du sexe à d’uniques victimes d’un « trafic », il s’agira de comprendre les expériences de ces personnes qui vendent corps et affection pour vivre ou survivre :

Les raisons du départ, les chemins empruntés, leurs conditions de vie à destination et le rapport au pays d’origine.

 

> 19H 

  • Projection // Travel

Après la mort de son père, Joy quitte le Nigéria pour aider sa famille. Elle savait qu’elle allait se prostituer en France, mais n’imaginait pas le degré d’exploitation qu’elle allait subir. Avec l’aide d’une association, elle obtient l’asile politique, mais pour aider sa famille et vivre sa vie, elle continue à se prostituer.

Cette ethnofiction a été écrite et interprétée par Nicola Mai et 8 femmes nigérianes ayant des expériences de migration, de travail sexuel et d’exploitation. Joy est un personnage de fiction qui incarne ces expériences tout en protégeant leurs identités.

Travel affirme sa dimension documentaire en amenant ces femmes à écrire et jouer leurs histoires, et en s’appuyant sur le travail ethnographique de Nicola Mai.

 

> 20h 

  • Table-ronde

Nicola Mai : sociologue et réalisateur, professeur de Sociologie et Etudes migratoires à l’Université Métropolitaine de Londres.

Lilian Mathieu : spécialiste de l’étude de la prostitution. Directeur de recherche au CNRS rattaché à l’équipe 5 (Dispositions, pouvoirs, cultures et socialisations) du Centre Max Weber (ENS de Lyon). Enseignant à l’Institut d’études politiques de Paris et à l’Université Lumière-Lyon 2.

Laure Sizaire : spécialiste des rapports sociaux de sexe et des nouvelles mobilités. Doctorante au CNRS rattaché à l’équipe Dynamiques sociales et politiques de la vie privée du Centre Max Weber (ENS de Lyon).

Animée par : Samuel Belaud (Médiateur scientifique – Université de Lyon)

 

Plus d’informations SUR LES 13e rencontres ET SI ON EN PARLAIT

Frontières : Effacer ou consolider  ? (Et si on en parlait #13)

FFrontières : Effacer ou consolider  ? (Et si on en parlait #13)

L’existence même des frontières est une invitation à les surpasser pour découvrir, se confronter, s’étendre, se rapprocher de l’altérité. Instituées depuis les prémisses de notre ère comme les remparts (symboliques ou fortifiés) nationaux et/ou identitaires des communautés, elles sont aujourd’hui représentatives des enjeux liés aux migrations contemporaines.

L’Université de Lyon en partenariat avec le Musée National de l’Histoire de l’Immigration vous offre des clés de compréhension des enjeux liés aux lignes démarquantes de notre monde.

A partir de 20H, assistez à une conférence suivi d’un débat, avec Yvan Gastaut : Citoyenneté et frontières à l’épreuve des migrations … quel avenir ?

Rencontre avec Yvan Gastaut (Unité de Recherche Migrations et Société (Urmis) CNRD/IRD  – Universités Paris Diderot – Nice Sophia Antipolis) animée par Raphaël Ruffier Fossoul (rédacteur en chef – Lyon Capitale)

 

Plus d’informations SUR LES 13e rencontres ET SI ON EN PARLAIT