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Résistance(s) : la Liberté en Lumière(s)

RRésistance(s) : la Liberté en Lumière(s)

La Cour Sud de la Manufacture des Tabacs sera mise en lumière avec le projet « Résistance(s) : la Liberté en Lumière(s)« . Pour la 2e fois consécutive, l’Université Jean Moulin participe à la programmation officielle de la Ville de Lyon pour la Fête des lumières.

Ce projet a été conçu par les étudiants de sa Licence professionnelle « Conception et Management en Éclairage », portée par l’iaelyon et  SUP Bellevue Assomption Lyon, et par l’entreprise IntensCity.
Issus de formations très variées (filière technologique, design espace, événementiel, domotique, génie civil, architecture, …) les étudiants présenteront au public, pendant ces 3 soirées, leurs créations originales audiovisuelles à travers différentes scénographies.

L’année 2023 est une année particulière pour l’Université Jean Moulin Lyon 3. Elle marque le cinquantième anniversaire de sa création et le 80e anniversaire de la mort de Jean Moulin. À cette occasion, et pour clore le programme des 50 ans de l’Université, l’établissement souhaite placer sa deuxième participation à la Fête des Lumières sous le signe du thème : « Résistance(s) : la Liberté en Lumières ».

Il s’agit de mobiliser les valeurs incarnées par Jean Moulin – la résistance à l’oppression, les valeurs de la République, le culte de la liberté – et de les mettre en résonance avec les combats de ceux qui se sont engagés ou s’engagent sur le front de la défense des libertés fondamentales. L’objectif est de mettre en lumière et en scène ces valeurs communes, autour de la figure symbolique de Jean Moulin.

Le projet a été coordonné par Pierre Morat, enseignant, Aurélien Soustre, responsable du diplôme pour l’iaelyon, Valérie Humeau, responsable du diplôme pour SUP Bellevue Assomption Lyon, Stéphane Nivet, directeur de la Communication de l’Université Jean Moulin et Pierre-Yves Toulot, pour la société IntensCity, qui a animé le coaching artistique avec les étudiants et les a accompagnés dans la préparation des créations avec l’aide de Quentin Michat, chargé de communication de l’Université Jean Moulin, dans la création sonore.

>> Pour plus d’information rendez-vous sur le site :

Université Jean-Moulin

L’IA-rtistique | Expo Arts-Plastiques & créations sonores

LL’IA-rtistique | Expo Arts-Plastiques & créations sonores

« Découvrez comment la créativité humaine s’entrelace avec l’intelligence artificielle dans une exposition qui brouille les frontières entre l’artiste et la machine pour ouvrir de nouveaux horizons artistiques. » Signé L’IA.

>> Au programme :

  • Du 7 décembre au 3 janvier | Salle d’exposition (sous-sol de la BU)
  • Vernissage le 13 décembre à 18h
  • Du 8 au 31 janvier | Bistrot U de la Manu – CROU

>> Pour plus d’information rendez-vous sur la page/ plan d’accès :

L’Art au Moulin

Plan d’accès

Héritages culturels et outils numériques

HHéritages culturels et outils numériques

La Faculté des Sciences Humaines et Sociales de l’Université Jean Monnet – Saint-Étienne – UJM – et le laboratoire Environnement Ville Société – EVS – organisent la seconde édition du séminaire international « Héritages culturels et outils numériques ».

Les sujets et thématiques abordés seront variés : la cartographie de la « Terre Sainte » sur les mosaïques de Madaba (Jordanie), l’application « Walk to Plato’s Academy », l’archéologie du paysage sonore, la modélisation 3D des projets non réalisés de l’architecte Jože Plečnik à Lubljana, les SIG 3D, la réalité virtuelle immersive.

Pour en savoir plus :

Héritages culturels et outils numériques

Programme de la journée

Théâtre de femmes du XVIe au XVIIIe siècle : archive, édition, dramaturgie

TThéâtre de femmes du XVIe au XVIIIe siècle : archive, édition, dramaturgie

Il y a trente ans paraissait la première anthologie du théâtre de femmes à l’initiative de Perry Gethner : Femmes dramaturges en France (1650-1750), 1993. Depuis, l’entreprise éditoriale n’a cessé de s’étendre autour de cette anthologie fondatrice et la recherche sur la littérature française d’Ancien Régime s’est orientée, dans une proportion significative, vers la découverte ou la relecture d’œuvres dramatiques écrites et publiées par des femmes.

Celles-ci sont également remises à l’honneur sur la scène théâtrale depuis le début des années 2000 avec plusieurs types de performances : lectures, mises en scène, scènes filmées, etc.

Le festival international Théâtre de femmes du du XVIe au XVIIIe siècle : archive, édition, dramaturgie s’inscrit dans cette dynamique, et entend mettre en lumière des aspects de ce théâtre qui excèdent, tout en le fondant, son contenu textuel.

En cohérence avec cette attention portée aux conditions de vie et de survie des œuvres dramatiques écrites par des femmes du XVIe au XVIIIe siècle, le colloque accueille trois représentations théâtrales > sur inscription :

  • Le Mallade (v. 1535) de Marguerite de Navarre
    Par la compagnie Oghma sous la direction de Charles di Meglio
    Mercredi 15 novembre 2023 à 19h
    Université Jean Moulin Lyon 3, Amphithéâtre de l’IUT
  • La Folle Enchère (1691) de Madame Ulrich
    Dans la mise en scène d’Aurore Evain avec la compagnie « La Subversive »
    Jeudi 16 novembre 2023 à 20h
    ENS de Lyon, Théâtre Kantor
  • L’Amoureux extravagant (1657) de Françoise Pascal
    Mise en scène par le collectif Les Herbes Folles
    Vendredi 17 novembre 2023 à 12h
    Université Lumière Lyon 2, Grand amphithéâtre.

Pour en savoir plus et consulter le rogramme :

Théâtre de femmes

Processus créatifs en danse jazz

PProcessus créatifs en danse jazz

Vivien Visentin est interprète, chorégraphe de la Cie Accord des nous, enseignant et formateur pour le diplôme d’État, et Frédérique Seyve, Doctorante à l’Université Lumière Lyon 2 – Laboratoire Passages XX-XXI, chargée de développement culturel pour plusieurs compagnies et responsable pédagogique au Centre chorégraphique Calabash, ont tenu à se rassembler lors de cette co-écriture d’article afin de réfléchir ensemble sur les processus créatifs en danse jazz.

Les processus de création… en danse jazz ?

Longtemps décriée, la danse jazz en France est encore trop souvent associée à une danse facile, légère voire totalement dépourvue de processus créatifs. Ces processus peuvent être perçus comme peu recherchés voire inexistants au sein de l’esthétique de la danse jazz. Et d’ailleurs qu’est-ce qu’un processus en création chorégraphique (jazz) ? Zoom sur la création en danse jazz : rencontre et éclaircissements.

Vous avez dit “processus créatifs” ? 

Tout d’abord le mot processus apparu au XVIe siècle, du latin pro, au sens de l’action vers l’avant, et de cessus, cedere, dans le sens aller, marcher, signifie aller vers l’avant, avancer. Dans sa définition, apparaît la notion de savoir faire : “actions constituant la manière de faire, de fabriquer quelque chose”1. Ceci nous renvoie à la dimension de la créativité et à l’action de créer dans le temps. Rappelons que la création est l’action de donner naissance, de créer, et renvoie au créateur comme peuvent le décrire Laurence Louppe2 ou encore Jacqueline Robinson3.

Nous pensons de prime abord au chorégraphe, agissant comme professionnel dans le secteur de l’art chorégraphique. Celui qui va créer, ordonner, organiser un ensemble de pas, de concepts en mouvement ayant pour finalité une représentation sur scène. Au-delà du simple fait de coordonner un certain nombre de combinaisons corporelles, ce dernier, ou cette dernière, va aussi défendre un propos, une idée et innover. Depuis le début du XXe siècle, avec l’émergence de courants comme la danse expressive allemande, des formes chorégraphiques dénoncent ou questionnent notre société. Ce fût le cas pour les chorégraphes allemands comme Kurt Jooss (La table verte) ou Pina Bausch.

Ces derniers ont notamment travaillé sur la thématique de la guerre, traumatisés par les deux conflits mondiaux. Ils initieront dans leurs processus créatifs, des gestes et des décors du quotidien.  L’expression humaine prendra le dessus sur la technique, la virtuosité, pour laisser place à l’expression d’une certaine intériorité.

Tout comme l’ont fait ces personnalités fortes de la danse expressionniste allemande, des chorégraphes américains associés à une corporéité4 jazz ont aussi su dénoncer les horreurs de l’humanité. Donald McKayle dans Rainbow Round my Shoulder saura par différents mouvements comme les contractions du haut du corps ou des implorations à genoux, traduire la souffrance et l’espoir des esclaves noirs afro-américains. Il ne sera pas le seul : West Side Story, l’une des comédies musicales les plus connues au monde, traduit les problèmes sociétaux d’une Amérique inégalitaire et clivée. Rick Odums5, Géraldine Armstrong6 parleront également de ces sujets dans leurs œuvres. Néanmoins, il faut bien comprendre que les processus créatifs sont propres – au-delà des esthétiques – à chaque créateur.  L’esthétique jazz en France est très associée au monde de l’enseignement, du divertissement et de la télévision depuis les années 80, mais peu à la création. Aussi, la mode de la fusion des esthétiques actuelles, de la pluridisciplinarité au sein de la création n’aide en rien à sa reconnaissance. Alors que la danse contemporaine ne cesse de puiser dans les danses dites “Pop” (prenons exemple de Lasseindra Ninja ou du collectif La Horde), la danse jazz tente encore d’avoir une certaine reconnaissance au sein de la création. Faisons donc connaissance avec certains chorégraphes qui aiment utiliser cette corporéité pour créer, valorisant ainsi l’’existence de processus créatifs au sein de cette esthétique.

La création en danse jazz : état des lieux 

Comme nous venons de l’évoquer, les chorégraphes en danse jazz ont su aborder différents thèmes au fil des décennies. Ils ont également eu des approches différentes afin de composer et de créer leurs œuvres. Les mises en lumière sur ce répertoire étant plutôt rares, il est essentiel de faire un tour d’horizon afin de pouvoir approfondir ce sujet.

Il faut savoir que des reproches autour de la danse jazz fusent souvent : “frontalité”, “divertissante”, “technicité omniprésente”, “trop plein d’énergie”. Ces aspects négatifs sont souvent associés à la danse jazz en lien avec le divertissement. On observe cependant un réel engouement du public pour ces œuvres comme Stories par la RB Dance Company dirigée par le chorégraphe Romain Rachline, mais aussi pour d’autres spectacles d’un autre genre qui relèvent de ces dispositifs.  Des créateurs – et ce depuis les années 1950 aux États-Unis, puis ensuite en France – on su exprimer un désir créatif pour défendre un propos. Il existe des foyers de résistances portées par des chorégraphes qui se démènent depuis des décennies pour porter des œuvres jusqu’à la représentation. C’est par exemple le cas de Jean-Claude Marignale (Répercussions), Wayne Barbaste et bien d’autres.

Ces personnalités au sein de leur propre compagnie effectuent un travail de recherche réflectif et corporel lors d’un nouveau projet de création. Les influences vont être multiples. Cela peut partir d’une œuvre littéraire. Ce fut le cas pour les Sœurs Brontë de Raza Hammadi au sein du Ballet Jazz Art, créé en 1992. Cette œuvre a donné lieu à un travail de notation du mouvement réalisé par Sylvie Duchesne, et subventionné par le dispositif d’aide à la recherche et au patrimoine de danse en 2010 par le CND7.

Patricia Greenwood Karagozian, directrice artistique de la Compagnie PGK, a elle-même été inspirée par six poèmes de la poétesse américaine Charis Southwell pour son spectacle Unfinished Fragments. Hubert Petit Phar, chorégraphe de la Compagnie La Mangrove, située sur le territoire guadeloupéen, a créé Ustium, une pièce traitant de la lutte des consciences. Une recherche inspirée de la théorie de l’existentialisme de Jean-Paul Sartre, et développée en partie dans Huis clos.

Comme évoqué au début de l’article, les sujets sociétaux deviennent très fréquents au sein de l’art chorégraphique contemporain, et donc actuel. Jan Martens8 avec Any attempt will end in crushed bodies and shattered bones questionnait en 2022 la résistance, les rébellions actuelles face aux enjeux climatiques et aux mutations sociétales que nous subissons. Sidi Larbi Cherkaoui9 présente lors de la Biennale de la danse de Lyon de 2023 Ukiyo-e, pour savoir comment continuer à vivre dans un monde incertain et en déconstruction. Le groupe Grenade porté par Josette Baīz10, propose en 2019 Baobabs pour montrer à quel point la jeune génération s’interroge sur les questions climatiques.

Il est tout à fait possible de faire la même chose avec une corporéité jazz si le chorégraphe le décide. Ce n’est pas l’esthétique qui permet d’être revendicatif, mais la façon de dire les choses par la danse et selon les envies du créateur. Avec tous les croisements que connaît l’art chorégraphique aujourd’hui, il serait difficile de ne citer qu’une influence ou qu’une seule corporéité.  D’ailleurs HOMME|ANIMAL est au cœur du parcours de la chorégraphe Vendetta Mathea. La pièce est née de son engagement pour la lutte des droits civiques du temps de John Fitzgerald Kennedy aux côtés de Martin Luther King ce fameux jour d’août 1963. Elle interroge ici la nature humaine et sa part d’animalité.

Alors que Bruce Taylor crée I have a dream au sein de sa compagnie – Cie Choréonyx, les discours de Martin Luther King contre le racisme sont revisités par le chorégraphe. Dans la pièce I Have A Dream, Bruce Taylor tente de démontrer l’empreinte que ce moment historique a laissée sur nos corps.

Dans Joy is my middle name, il évoquera la mort de George Floyd et les émeutes qui ont suivi son décès en 2020. Aussi Wayne Barbaste n’est pas en reste sur les questions sociétales au sein de la Compagnie Calabash :  “Les questions sociétales, politiques et culturelles sont au cœur de cette compagnie. Depuis son origine, elle se donne pour objectif de questionner nos sociétés, de mettre en lumière les nombreux  dysfonctionnements et injustices qu’elles engendrent11.”

La danse jazz étant une danse faite pour et par l’humain, certains artistes se sont aussi interrogés sur les cultures. James Carlès aime interroger la diaspora africaine en occident du 19e siècle à nos jours. Ainsi dans Coupé Décalé en 2014, le chorégraphe travaille autour de cette danse traditionnelle, mais aussi de toute une culture. Il s’entoure pour cela de Robyn Orlin. Cela nous rappelle la relation à un certain héritage africain au sein de la danse jazz.

Anne-Marie Porras dans Fils du Vent évoquera le rapport de entre la communauté gitane et la musique.

Pour finir cette liste non exhaustive, certains créateurs s’inspirent même de la technique de certains grands maîtres et font donc le lien entre pédagogie et création. En effet, Carole Bordes a réalisé un travail sur la technique Mattox pour créer son spectacle Matt et Moi. Il s’agit dans cette œuvre, de jouer avec les différents éléments de la méthode, mais aussi de la déstructurer pour mieux en tirer l’essence.

Circulation entre héritage et contemporanéité 

> Le langage du corps

Il est possible pour ces artistes chorégraphiques d’utiliser un vocabulaire dansé, ou du moins une expression corporelle pouvant exprimer les émotions souhaitées. Longtemps oubliée, ou du moins rattachée uniquement à la pédagogie, la terminologie en danse jazz est depuis quelques années perçue comme une source d’inspiration inépuisable. Vivien Visentin et Aurore Faurous, explorent cette possibilité depuis maintenant quelques années.

Hubert Petit-Phar, chorégraphe de la Cie la Mangrove et pédagogue jazz, défend une vision de dépassement du vocabulaire établi. La terminologie apparaît comme un socle possible pour développer  la créativité. À la condition de ne pas s’enfermer et de la relier à la notion de possible transformation et d’évolution. L’enjeu pour le chorégraphe réside dans sa capacité à révéler le potentiel poétique d’un pas de base12. Observons, par exemple, le travail de Fosse qui a fait de la jazz hand, un élément expressif et poétique.

La tradition n’est pas un héritage que l’on reçoit en tant que tel, mais il s’agit d’un point de vue actuel et d’un regard porté sur le passé.

> L’improvisation : un processus originel

L’improvisation dans les danses jazz a une source différente qu’en danse contemporaine. Mais n’est-il pas question de penser l’improvisation au présent, comme un outil au service de la création ? Dans les danses afro-américaines qui constituent, en partie, les racines de la danse jazz, on observe que ces danses ont permis la liberté et le renouvellement : elles étaient centrées avant tout sur des processus et des états de corps en lien avec l’improvisation, véritable lieu de l’expérimentation corporelle. Cela a débouché sur un vocabulaire codifié, mais il y a toujours eu la notion intrinsèque de transformation et de développement.

Patricia Greenwood Karagozian aime traverser le travail d’improvisation en relation avec la musique afin de créer. C’est notamment ce qui a été réalisé dans Light Motif.

 

Marianne Isson poursuit un travail de fond autour de la pratique de l’improvisation.

 

> La relation musicale dans la création

Longtemps critiquée pour son attachement à la musique, les créateurs en danse jazz savent pourtant s’amuser des silences et apprécier leur musique intérieure. C’est le cas pour Anne-Marie Porras qui avoue créer dans un premier temps en écoutant la musique qui l’habite, comme une introspection. Elle ne travaillera qu’ensuite avec un musicien. Patricia Greenwood Karagozian quant à elle, n’a aucune peur d’inclure le silence au sein de sa partition chorégraphique afin de créer une rupture. Cela fait partie pour elle également des solutions créatives.

Aussi, si dans d’autres esthétiques la bande son est seulement un support, en danse jazz le danseur va venir ajouter sa propre proposition sur celles des musiciens, comme dans un réel orchestre. Ainsi, cela rend subtil les processus créatifs. Les moments collectifs et individuels où un des artistes va prendre le « lead » vont se succéder. Ceci est la réelle essence du jazz. C’est d’ailleurs ce que souhaite communiquer Patricia Greenwood Karagozian avec sa nouvelle création The Spirit of Swing13. Ceci pourrait être également une métaphore de notre société : l’individualisme dans une communauté qui ne cesse de chercher le vivre ensemble.

De même, des chorégraphes s’affranchissent des codes et gagnent en liberté dans leurs choix musicaux au sein de leur création. Lhacen Hamed Ben Bella s’appuie notamment sur des textes forts servant de bandes sonores, Alain Gruttadauria aime aller dans des sonorités plus rock.

La formation à la création : un vivier pour l’art chorégraphique jazz de demain 

> De l’éducation nationale…

Des cours de danse moderne jazz du mercredi après-midi en MJC, école privée ou conservatoire aux ateliers de danse au sein du milieu scolaire, beaucoup d’élèves auront traversé cette discipline. Parfois en ayant la liberté de pouvoir créer à leur guise. Les nouveaux programmes des lycées, de l’enseignement commun de l’Éducation physique et sportive (EPS), indiquent qu’il est nécessaire pour les élèves de traverser un processus de création durant leur scolarité. Cette expérience créatrice et esthétique, initiée dès le cycle 1, poursuivie au collège, devient un impératif au lycée. Tout comme dans les textes officiels encadrant l’enseignement artistique, la notion d’atelier de composition apparaît clairement.

> …à la formation professionnelle

Lors d’un entretien réalisé avec Françoise Dupuy en février 2022, dans le cadre de la recherche doctorale menée par Frédérique Seyve sur la transmission de la danse jazz, la chorégraphe et pédagogue déplorait le cloisonnement qu’il y avait entre pédagogie et création. Pour cette grande dame de la danse, tout venait de cette créativité y compris au sein du cours. Aussi, toujours au sein de cette même recherche – même si de nombreux professeurs ayant obtenu leurs diplômes d’État de 2000 à 2020, constatent le manque d’une dimension artistique dans la formation au diplôme d’État – la notion d’atelier émerge de plus en plus. Cette dernière est notamment amenée par les formateurs. Cela devient d’ailleurs un critère dans l’évaluation finale. Cette inclusion de la créativité au sein du cours de la formation au terrain, permettrait à l’élève de s’exprimer davantage mais aussi de valoriser le contenu pédagogique et artistique qu’il acquiert au fil du temps.

Cette mise en place de l’atelier au sein de la pédagogie – et donc de la dimension créative – questionne le cloisonnement qu’il peut y avoir entre les différentes activités de chorégraphe, danseur et professeur de danse. Un professeur de danse jazz n’est-t’il pas un peu des trois de part l’investissement corporel engagé dans ses cours et les différents projets artistiques proposés (spectacles de fin d’année, participation à des évènements collectifs, concours…) ?

Actuellement, le PSPBB14 propose depuis 2007 le DNSPD15 en danse jazz , seule formation publique en Europe pour la danse jazz. Ce cursus permet de créer un vivier d’interprètes avec un bagage jazz, mais aussi des créateurs contemporains (jazz).

> Étiquetage non obligatoire et contemporanéité assumée

Il est fondamental aujourd’hui de parler de la création en danse jazz. Non pas pour valoriser une certaine catégorisation et cloisonner les disciplines, mais simplement pour démontrer que la création existe au sein de cette esthétique. Que cette dernière est dotée comme n’importe quel autre de processus lui permettant de porter des propos avec une réelle portée poétique et artistique assumée.

Jacques Alberca, à l’honneur lors d’un week-end de Mémoires Vives organisé par Codajazz et le Centre National de la Danse de Pantin, affirme lors d’une conférence qu’il était professeur et formateur en danse jazz, mais qu’en tant que chorégraphe il était simplement lui-même avec quelque chose à dire et à porter. En effet, de par les formations pluridisciplinaires, la pratique accrue de la danse jazz (assumée ou non par certains chorégraphes contemporains), pouvons-nous nous interroger sur l’usage de cette esthétique au sein des compagnies dites contemporaines ? Est-ce que la danse jazz ne ferait pas partie de part son vocabulaire, de l’essence de certains processus créatifs contemporains ?

Peut-être que la solution réside dans la recherche d’un juste milieu entre le rejet total de l’appartenance à cette esthétique, devoir catégoriser et réprimer les artistes, et ne pas du tout reconnaître la danse jazz ? Il serait donc temps à la fois d’actualiser la connaissance de cette esthétique, de ses fonctionnements et de lui laisser le bénéfice du doute. Sans oublier de ne plus avoir peur de citer son nom quand elle fait partie d’un processus, et ce peu importe le contexte. L’humilité et la générosité de cette esthétique n’empêchent pas sa reconnaissance créative, surtout quand les processus de création en danse jazz sont utilisés sur les scènes françaises actuelles.

Un article écrit par Fréderique Seyve et Vivien Visentin pour Pop’Sciences – 10 novembre 2023.

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Notes

[1] Définition de « processus » – Larousse

[2] Écrivaine, critique et historienne de la danse, spécialisée en esthétique de la danse et des arts visuels et artiste chorégraphique. Son ouvrage, Poétique de la danse contemporaine est devenu une référence.

[3] Elle a écrit notamment Éléments du langage chorégraphique (Vigot, 1981) et est considérée comme une des principales figures de la danse moderne en France.

[4] Concept où le corps n’est pas une simple identité unique, mais davantage une pluralité de dimensions.

[5] Diplômé de la High School of Performing and Visual Arts de Houston, ce danseur, chorégraphe (créateur en 1983 des Ballets jazz Rick Odums) et professeur (Directeur de l’Institut de Formation Professionnelle Rick Odums jusqu’en 2023) reconnaît deux influences importantes dans sa formation, celles de Patsy Swayze et de Frank Hatchett.

[6] Elle reçoit sa formation en danse classique et jazz sous la tutelle de Matt Mattox.Elle danse pour sa compagnie Jazz Art qu’elle suit à Paris en 1975. Elle danse et/ou chorégraphie pour de nombreuses compagnies, notamment pour Les Ballets Jazz Rick Odums, Reney Deshauteurs et la Compagnie Off Jazz de Gianin Loringett.

[7] Centre Nationale de la Danse à Pantin.

[8] Danseur, chorégraphe, il aime travailler sur la relation avec le public et les danseurs mais aussi sur la croyance que le corps peut communiquer et à quelque chose à dire.

[9] Danseur et chorégraphe contemporain, issu de la nouvelle génération émergente des chorégraphes flamands. Son travail se base sur une physicalité importante. 

[10] Danseuse et chorégraphe en danse contemporaine, connue pour son travail de pédagogue et de chorégraphe avec les enfants et les adolescents au sein du Groupe Grenade. 

[11] A propos de la compagnie Calabash

[12] VISENTIN, V, Vocabulaire et créativité : pour un langage au service de la création, p.49.

[13] Soutenue par la DRAC Ile de France pour l’aide à la création en 2023.

[14] Pôle Supérieur d’enseignement artistique de Paris Boulogne Billancourt.

[15] Diplôme National Supérieur Professionnel de Danseur.

PPour aller plus loin

  • Les autrices sur la composition chorégraphique 

> Poétique de la danse contemporaine – Laurence Louppe

> Outillage chorégraphique Manuel de composition – Karin Waehner

> Éléments du langage chorégraphique– Jacqueline Robinson

  • Travail autour des Sœurs Brontë 

> Aide à la recherche et au patrimoine en danse 2010, Sylvie Duchesne

  •  Dans le domaine de l’éducation nationale

> Revue AEEPS « Enseigner L’EPS 288«  – Septembre 2022.

> Sandrine Beulaigne et Cédric Préhaut, paru sous le titre :  Processus de création artistique ; Mobiliser par CONTRAINTES / Réguler par CONTRASTES

Énergies Désespoirs, un monde à réparer | LIVRE

ÉÉnergies Désespoirs, un monde à réparer | LIVRE

L’ouvrage « Énergies Désespoirs, Un monde à réparer » explore deux faces de notre planète contemporaine qui s’opposent :

– la crise de l’habitabilité de la Terre révélée par des signes de plus en plus nombreux et documentés par la science ;
– les initiatives, à différentes échelles, qui témoignent des possibles réparations de ce monde abimé par l’impact des activités humaines.

Cette recherche a donné lieu à une exposition, initiée et conçue par Encore Heureux Architectes et l’École urbaine de Lyon, au CENTQUATRE-PARIS du 29 mai au 1er août 2021 (dessins et peintures de l’artiste Bonnefrite). 

Les auteurs qui ont contribué à l’ouvrage :

Frédérique Aït-Touati, Ikal Ang’elei, Jean-Christophe Bailly, Jeanne Burgart-Goutal, Julien Choppin, Mireille Delmas-Marty, Nicola Delon, Valérie Disdier, Matthieu Duperrex, Jean-Paul Engélibert, François Gemenne, José-Manuel Gonçalvès, Alice Gorman, Axelle Grégoire, Lou Herrmann, Tim Ingold, Catherine Larrère, Raphaël Larrère, Ronan Letourneur, Michel Lussault, Marielle Macé, Sébastien Marot, Mathieu Potte-Bonneville, Olivier Remaud, Ysé Sorel, Lucie Taïeb, Anna Tsing, Joëlle Zask.

 

Paru dans la Collection “À partir de l’Anthropocène” aux Éditions deux-cent-cinq.

Découvrir l’ouvrage sur le site des éditions deux-cent-cinq

 

VIDEO – Présentation de l’ouvrage par le géographe Michel Lussault

 

 

 

 

Les Échappées inattendues : promenade le long d’un pétale

LLes Échappées inattendues : promenade le long d’un pétale

Le CNRS et le Planétarium de Vaulx-en-Velin vous invitent pour une ballade sur une fleur de Pétunia ! Les fleurs ont toujours fasciné par leurs couleurs, leurs formes et leur grande diversité. Les pétales sont les organes floraux les plus attractifs, aussi bien pour nous que pour les insectes pollinisateurs. Mais qu’est-ce qu’un pétale exactement ? Comment ses cellules arrivent-elles à produire la couleur et l’iridescence des fleurs ?

Cet événement est organisé dans le cadre des Rendez-vous aux jardins.

Suivez et partagez l’événement #ÉchappéesInattendues.

Ces recherches et cette conférence immersive ont été financées en tout ou partie par l’Agence Nationale de la Recherche (ANR).

Les Échappées inattendues : Le cerveau aux rayons X

LLes Échappées inattendues : Le cerveau aux rayons X

Le CNRS et le Planétarium de Vaulx-en-Velin vous embarquent pour un voyage immersif à l’intérieur du cerveau ! Entre faisceaux de neurones et vaisseaux sanguins, visualisés en 3 dimensions, découvrez comment une nouvelle méthode d’imagerie médicale contribue à la recherche sur les maladies neurologiques.

Cet événement est organisé dans le cadre de la Semaine du Cerveau.

Suivez et partagez l’événement #ÉchappéesInattendues.

Un projet réalisé en partenariat avec le Planétarium de Vaulx-en-Velin, RSA Cosmos.
Ces recherches et cette conférence immersive ont été financées en tout ou partie par l’Agence Nationale de la Recherche (ANR).

 

Les Échappées inattendues : À la découverte des chromosomes

LLes Échappées inattendues : À la découverte des chromosomes

Le CNRS et le Planétarium de Vaulx-en-Velin vous proposent de plonger au cœur des cellules. Venez découvrir comment l’interface entre biologie et physique a permis de révéler les mécanismes qui permettent d’organiser les deux mètres d’ADN présents dans chacune de nos cellules dans un espace aussi petit que le dixième de l’épaisseur d’un cheveu.

Cette conférence est organisée dans le cadre de l’événement Alterfutura, porté par l’AADN, la Ville et le Planétarium de Vaulx-en-Velin.

Suivez et partagez l’événement #ÉchappéesInattendues.

Un projet réalisé en partenariat avec le Planétarium de Vaulx-en-Velin, RSA Cosmos.
Ces recherches et cette conférence immersive ont été financées en tout ou partie par l’Agence Nationale de la Recherche (ANR).

Ce que les chansons préférées des adolescents nous apprennent sur leur imaginaire amoureux

CCe que les chansons préférées des adolescents nous apprennent sur leur imaginaire amoureux

Que ce soit dans leur chambre, entre amis, dans les transports pour aller à l’école, sur leur téléphone ou sur l’ordinateur familial ou encore en fond sonore de vidéos TikTok, les adolescentes et adolescents d’aujourd’hui écoutent constamment de la musique. Leur goût pour telle pop-star ou tel nouveau hit relève-t-il uniquement de leurs préférences personnelles ? Ou peut-on déduire certaines de ces tendances de leurs caractéristiques sociales ?

Lors d’une enquête de terrain effectuée en 2022 auprès de cinq classes de quatrième dans une grande ville française, j’ai pu interroger 120 jeunes de 12 à 14 ans sur leurs goûts musicaux. Je me suis ensuite intéressée plus spécifiquement à leurs chansons d’amour préférées. Que peut-on dire des représentations que celles-ci véhiculent ?

Le genre et la classe sociale, déterminants pour les goûts personnels

De nombreuses enquêtes, comme celle réalisée par Agi-Son auprès des 12-18 ans pour le Baromètre : Jeunes, Musique et risque auditifs placent le rap en première place des genres musicaux les plus écoutés par les jeunes, et ce depuis 2017. Cette tendance se retrouve très largement chez les personnes rencontrées dans mon enquête dont la majorité, peu importe leur genre ou leur origine sociale, écoute du rap.

Si on peut parler d’une homogénéisation des goûts musicaux, en y regardant de plus près on constate que les filles écoutent les mêmes artistes que les garçons mais que l’inverse n’est pas vrai. En effet, non seulement les garçons n’écoutent quasiment pas d’artistes féminines, hormis quand celles-ci chantent en duo avec un artiste qu’ils apprécient (Tiakola et Ronisia) mais certains styles musicaux sont relégués dans le domaine du féminin : les chansons d’amour, la k-pop, la musique traditionnelle, la j-pop, les pop-stars féminines, le raï et la musique de comédie musicale. À l’inverse, le rap et le rock sont écoutés indifféremment par les filles comme par les garçons.

Ronisia – Comme moi (Clip officiel) ft. Tiakola.

Dans une moindre mesure, les adolescentes et adolescents d’un milieu aisé écoutent ce qu’écoutent les jeunes de classe populaire mais pas le contraire. La popularité du rap peut expliquer pourquoi ce sont les jeunes hommes, souvent racisés, de classe populaire qui décident actuellement des tendances : la majorité des artistes rap populaires font partie de ce groupe et ciblent un public qui leur ressemble.

Les pratiques d’écoute des jeunes de familles bourgeoises se singularisent par l’écoute de la radio, que l’on ne retrouve dans aucun autre groupe, tout comme l’écoute de podcasts et de « musiques anciennes » (quand je leur demande de préciser, ils et elles citent Jacques Brel et Nancy Sinatra) ainsi que la musique classique, citée par 7 % des élèves de cette classe, mais par 3,33 % des adolescents interrogés au total.

Et tu écoutes quelle(s) musique(s), quand tu es amoureux·se ?

La question de leurs chansons d’amour préférées, posée afin d’en savoir un peu plus sur leur imaginaire amoureux, nous donne une idée de ce qui se passe dans les AirPods d’un ado amoureux. Plusieurs déclarent que leurs pratiques d’écoute sont modifiées par le sentiment amoureux, comme Vincent, qui écrit : « Quand je suis amoureux, je vais écouter des musiques d’amour version rap et essayer de m’imaginer avec la personne sur laquelle je suis en crush ».

Les deux chansons d’amour les plus citées par les adolescents se divisent également suivant le genre. Pour les filles il s’agit du titre Je t’a(b)ime de la chanteuse Nej, dont voici le refrain :

On s’aime mais on s’abîme
Dans toute cette histoire j’y ai laissé mon être
Si t’aimer est interdit j’veux que tu sois mon enfer
(On s’aime mais on s’abîme, on s’aime mais on s’abime)
Tu es ma punition, sur Terre mon châtiment
À l’agonie je n’comprend plus mes sentiments

Et pour les garçons c’est « Lettre à une femme » du rappeur Ninho qui remporte la première place :

J’pourrais t’aimer toute ma vie même si tu fais trop mal au crâne
C’est comme une maladie sans vraiment savoir où j’ai mal
Et tes copines veulent tout gâcher, à chercher mes erreurs
Et si elles arrivent à trouver, y aura des cris, des pleurs
[…]
 J’ai son cœur dans la poche
Mais rien qu’elle brouille les pistes
Elle veut qu’j’fasse des efforts,
Elle prendra la tête toute ma vie

Ces deux chansons, très populaires au sein de la discographie de leurs artistes respectifs, proposent une vision de la relation de couple bien loin de celle des contes de fée que les ados lisaient encore quelques années auparavant. A les écouter, on se dit que les relations amoureuses « des grands », c’est quand même beaucoup de problèmes et de souffrance.

Ninho, « Lettre à une femme ».

Ces deux titres montrent parfaitement le fossé entre les tourments amoureux attendus de part et d’autre d’un couple hétérosexuel ; alors que Ninho parle de « mal au crâne » Nej chante déjà « l’agonie » et quand elle accepte la « punition » et même le « châtiment » par amour, lui menace de « cris et des pleurs » si sa compagne et ses amies le critiquent un peu trop.

Les histoires d’amour finissent mal, en général ?

Quand on leur demande « ce qui en fait des vraies chansons d’amour, ce qui prouve qu’il y a de l’amour », voici ce que répondent les collégien·ne·s :

Le groupe qui a choisi « Lettre à une femme » surligne « y aura des cris, des pleurs » comme étant une preuve d’amour. Axelle m’explique « Il veut dire qu’il reste avec elle dans les hauts et les bas quand il dit qu’elle fait mal à la tête ! » Derrière, Elif et Nabila ont choisi Je t’a(b) ime de Nej et surlignent « Tu es ma punition, sur Terre mon châtiment ». Je remarque « Bah c’est pas très romantique ça non ? Une punition c’est plutôt négatif ! », les deux s’insurgent : « Mais non mais c’est trop beau ce qu’elle dit ! », petit moment de gêne, incompréhension des filles qui essayent de me prouver que la souffrance est romantique, j’essaye de me rattraper « C’est vous qui décidez ce que vous trouvez romantique de toute façon ! » (extrait carnet de terrain).

Si Ninho est un des artistes préférés de tous les garçons interrogés, peu importe leur classe sociale, les jeunes filles aisées ne déclarent pas écouter la chanteuse Nej et lui préfèrent Angèle, connue notamment pour sa chanson « Balance ton quoi ». Les discours féministes, qu’ils passent en chanson ou par d’autres contenus culturels, sont généralement plus accessibles et recommandés aux filles de classes sociales supérieures. Si elles ne sont pas les seules victimes de violences, les jeunes de classes populaires auraient besoin de pouvoir accéder en priorité aux programmes de prévention des violences dans les relations amoureuses. Sans rendre les œuvres culturelles responsables de cette violence, on peut noter comment celle-ci est mise en scène et comment elle est reçue par les jeunes.

Angèle – Balance Ton Quoi (CLIP OFFICIEL).

Jordan et Farid remplissent le questionnaire en lisant les questions à haute voix l’un à l’autre. Jordan « Si ton ou ta partenaire te dit des choses méchantes et s’énerve contre toi, comment réagis-tu ? », Farid répond « je la frappe ! » et Jordan renchérit « j’lui mets deux-trois coups de couteaux ! » puis ajoute en captant mon regard « c’est une chanson hein ! » (extrait de carnet de terrain)

La chanson en question est « CANADA » du rappeur 1PLIKÉ140, dans laquelle on entend ces paroles « 2-3 coups d’couteau bien placés, impossible qu’ils reviennent comme le mec de Nabilla ». L’artiste fait référence ici à Thomas Vergara, mari de Nabilla Benattia, qui a été poignardé par sa compagne lors d’une dispute conjugale en 2014. Le couple, qui s’est formé dans une émission de télé-réalité, est toujours ensemble neuf ans après l’incident. Les relations d’amour/haine, au sein desquelles une réelle violence s’exprime, font la popularité de nombreuses émissions de télé-réalité actuelles. D’après l’étude #MoiJeune 20 Minutes – OpinionWay de 2021, près d’un tiers des jeunes regarde des émissions de télé-réalité, avec toutefois une nette différence entre les garçons (18 %) et les filles (43 %).

Que ce soit dans la musique, les émissions de télé, les séries ou la littérature « young adult », faire rimer romance et violence est fréquent dans de nombreuses œuvres qui rencontrent un grand succès auprès des ados : on peut citer la série Gossip Girl, la chanson Jaloux de Dadju, le film 365 jours, le roman Jamais plus de Colleen Hoover, la chronique Wattpad d’Inaya Jusqu’à la mort

Cette fascination pour les relations torturées, que l’on appellerait aujourd’hui abusives ou toxiques, soulève des inquiétudes quant aux attentes amoureuses des adolescentes. En effet les filles de 15 à 25 ans sont, comme le rappelle Sophie Barre, membre de la coordination nationale de l’association féministe NousToutes, « les premières à subir les violences conjugales, mais les moins présentes dans les dispositifs mis en place pour leur venir en aide ».The Conversation

Auteur :

Marine Lambolez, Doctorante, ENS de Lyon

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.