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AAmandine Chauviat, doctorante en écologie microbienne | Visages de la science

Amandine Chauviat participant aux rencontres collégiens/doctorants au collège Paul Émile Victor (Rillieux-la-Pape) organisées par Pop'Sciences.

Dans le cadre de son dossier sur l’antibiorésistance, Pop’Sciences vous emmène dans le laboratoire d’écologie microbienne à l’Université Claude Bernard Lyon 1. C’est ici que nous rencontrons Amandine Chauviat, doctorante, avec laquelle nous avons enregistré un podcast à propos de son expérience en thèse au laboratoire d’écologie microbienne.

 

Pour commencer, pourriez-vous vous présenter ?

Je m’appelle Amandine Chauviat, j’ai 27 ans et je suis en troisième année de thèse au laboratoire d’écologie microbienne (Université Claude Bernard Lyon 1), au sein de l’équipe Bacterial Efflux and Environnemental Resistance (BEER). Dans notre équipe, nous nous intéressons aux facteurs environnementaux qui favorisent l’émergence de résistance aux antibiotiques.

 

Quel a été votre parcours universitaire ?

Après avoir obtenu mon bac Scientifique en France, je suis parti à l’étranger. J’avais envie d’une expérience à l’étranger, donc j’ai suivi une licence d’immunologie et de microbiologie à l’université de Montréal au Canada. C’était de la microbiologie très orientée sur le domaine médical. Ensuite, je suis revenue en France pour suivre un master de microbiologie, beaucoup plus porté sur le pendant écologique, m’apportant de nouvelles notions que je n’avais pas. J’ai donc fait un M2 MAABE (Microbiologie Appliquée à l’Agroalimentaire, au Biomédical et à l’Environnement), un parcours de microbiologie appliquée pour s’insérer en entreprise.

À cette époque, sans jamais n’avoir fermé la porte à l’idée de faire une thèse, ce n’était pas forcément mon objectif et j’avais envie de voir ce qu’il se passait en entreprise au niveau de la recherche. C’est mon stage de Master 2, en collaboration avec une entreprise cosmétique et le laboratoire dans lequel je suis actuellement, qui a révélé que j’étais faite pour la recherche académique. Au laboratoire, j’ai rencontré une équipe avec qui je m’entendais très bien et avec qui il y avait une forte émulation scientifique. J’ai donc reconsidéré mon envie de faire une thèse. Pour moi, c’était vraiment un besoin d’aller au bout de quelque chose.

Or, ma date de diplomation de master ne me permettait pas de présenter le concours de la bourse doctorale la même année. Le laboratoire m’a donc proposé un CDD d’un an sur un projet de recherche, en qualité d’assistante ingénieure. Ce contrat m’a notamment permis de préparer le concours pour obtenir une bourse de thèse.

Cette bourse doctorale vous a donc permis d’intégrer un laboratoire. Est-ce que vous pouvez nous en dire plus sur cette structure ainsi que sur vos directeurs et directrices de thèse ?

Je suis employée par l’université Claude Bernard Lyon 1, au sein du laboratoire d’écologie microbienne et j’ai deux directeurs de thèse. Sabine Favre-Bonté qui a une formation de microbiologie clinique, avec tout un volet antibiorésistance et qui a ensuite évolué sur des problématiques liées à l’écologie. Sabine est également responsable du parcours MAABE à l’université Claude Bernard.

Mon deuxième co-directeur est Thibaut Meyer, un jeune maître de conférences qui se penche plus sur des questions d’interactions plantes/bactéries et qui travaille aussi sur l’identification de métabolites secondaires. Mes deux directeurs de thèse se combinent donc très bien par rapport à ma thématique de thèse.

 

Comment s’est fait cette rencontre avec vos directeurs de thèse ?

Sabine est la responsable du Master 2 que j’ai suivi, je l’ai donc connue via le master. J’ai eu l’opportunité lors de mon stage de M2 de collaborer avec son équipe de recherche. Ce n’était pas elle qui m’encadrait mais Sylvie Nazaret, qui dirige aujourd’hui ce laboratoire. Thibaut Meyer, pour sa part, a été recruté au tout début de ma thèse, puis a été rattaché à mon sujet de thèse et a très naturellement pris sa place de co-directeur.

 

Pourriez-vous nous résumer votre sujet de thèse ?

Je travaille sur un mécanisme de résistance aux antibiotiques : les pompes à efflux, de petites pompes présentes sur la membrane des bactéries. Ces pompes ont la capacité de rejeter des composés à l’extérieur de la bactérie, dont les antibiotiques. On retrouve dans l’environnement des bactéries qui possèdent ce système de rejet activé et qui sont donc naturellement résistantes aux antibiotiques.

La question qui se pose c’est : quelles sont les conditions et les molécules qui vont induire le fonctionnement des pompes à efflux ? Parce que l’on sait qu’il y a des antibiotiques dans la nature, mais en concentrations trop faibles pour expliquer à elles seules cette résistance aux antibiotiques dans l’environnement.

Moi je travail sur un contexte environnementale bien particulier puisque mon sujet porte sur l’interaction entre les bactéries et les amibes libres. Les amibes sont des protozoaires, des organismes unicellulaires qui vont manger les bactéries. Mais la bactérie sur laquelle je travaille est capable de résister à la phagocytose (le fait d’être absorbée par une amibe) et de se multiplier à l’intérieur des amibes. Les amibes constitueraient donc une niche à l’origine de l’émergence et de la dissémination de l’antibiorésistance. J’essaye d’identifier quelles sont les molécules qui, dans l’interaction avec les amibes, induisent l’expression des pompes à efflux.

Retrouvez l’article d’Amandine Chauviat à propos de son sujet de thèse :

La résistance aux antibiotiques : une problématique environnementale ?

 

Aujourd’hui nous nous intéressons particulièrement à votre expérience en tant que doctorante. Pourriez-vous nous expliquer ce que c’est qu’être doctorante et à quoi ressemblent les journées d’une étudiante en thèse ?

Ce que j’adore c’est qu’il n’y a pas de journée type ! Toutes les journées sont différentes, nous sommes challengés au quotidien, et c’est vraiment quelque chose que j’apprécie et dont j’ai besoin. Les journées sont rythmées par une partie d’expérimentation, l’analyse des résultats et l’interprétation. Selon ce que l’on obtient comme résultats, il faut ensuite recréer de nouvelles expériences, et ce en collaboration très étroite avec mes directeurs de thèses avec qui j’échange énormément. Cette émulation scientifique et le fait de mener mon projet de recherche, c’est ce qui me plait dans ce travail de doctorante. Ensuite j’ai également des activités complémentaires d’enseignements que j’apprécie énormément. Transmettre mes connaissances et être en contact avec les étudiants a été une vraie découverte lors de ma thèse, et ça me motive quotidien.

 

Et qu’est-ce que vous enseignez ?

J’enseigne aux niveaux licences pro, L2 ou L3 en biologie, des TP ou TD qui sont liés à la microbiologie et à l’écologie microbienne.

 

En plus des cours que vous dispensez, avez-vous d’autres activités en dehors de votre thèse ? Vous avez par exemple participé à la rédaction d’un article scientifique en 2021 sur les risques microbiens dans l’industrie cosmétique ?

Cet article est lié à mon stage de M2, un projet qui s’est poursuivi lors de mon CDD avant que je passe le concours. Mais en dehors de mes activités de recherche au sein du laboratoire j’ai été représentante des doctorants pendant une année. Le but était de représenter la voix des doctorants au conseil d’unité et de proposer des suivis du bien être étudiant au sein du laboratoire. J’ai aussi été co-responsable de l’animation scientifique au sein du laboratoire, j’ai proposé des présentations scientifiques, organisé des rencontres avec d’anciens doctorants pour que les doctorants actuels puissent entrevoir les poursuites après thèses.

Je suis assez active à ce niveau-là et grâce à Pop’Sciences j’ai mis le pied dans la vulgarisation scientifique et ça me plait énormément. J’aime beaucoup échanger et transmettre, notamment avec de personnes qui ne font pas forcément parti du monde de la science, des personnes qui n’ont pas la possibilité d’y avoir accès facilement. Je pense que c’est important que tout le monde puisse avoir accès aux connaissances scientifiques, même sur des sujets pointus et complexes.

 

En parlant de l’après thèse, qu’envisagez-vous à l’heure actuelle ?

J’aimerais beaucoup rester dans la recherche académique. J’aime cette liberté de pouvoir mener des projets de recherche. C’est quelque chose qui s’est révélé à moi pendant mon doctorat, donc idéalement, je souhaite partir sur un post-doctorat à l’étranger pour ensuite passer les concours en France afin d’accéder à un poste de maître de conférences. L’enseignement c’est un volet que je ne souhaite pas mettre de côté, j’aime cette balance entre la recherche et l’enseignement.

 

Justement pourriez-vous nous rappeler ce que c’est qu’un post-doctorat ?

Un « post-doc » c’est un contrat de recherche d’un à trois ans, faisant suite au doctorat. Sur un projet de recherche, ces contrats permettent de prendre un peu d’expérience pour ensuite présenter des concours pour accéder à des postes en CDI de la fonction publique.

 

Et vous déjà des pistes, des envies, pour votre futur post-doc ? D’ailleurs, combien de temps vous reste-t-il avant de soutenir votre thèse ?

Normalement je dois soutenir avant décembre 2023, donc l’échéance est proche, elle arrive ! Au niveau des pistes, je suis très attirée par les pays d’Europe du nord, comme le Danemark, la Finlande, la Suède, plus par des attraits culturels de découvrir ces pays. J’ai déjà commencé à identifier des laboratoires qui pourraient m’intéresser, donc le but maintenant c’est de regarder les offres à venir pour terminer mon doctorat.

Pour terminer, que conseilleriez-vous aux aspirantes et aspirants doctorants ?

D’une part, je pense qu’avant de se lancer dans une thèse il faut bien réfléchir sur ce qu’un doctorat peut apporter en plus. Dans le public ou le privé, il faut regarder à quels postes cela permet d’accéder. Beaucoup d’étudiants en master désirent naturellement poursuivre en doctorat sans forcément réfléchir à ce que cela pourrait leur apporter en plus.

Le conseil que j’aurais à donner pour celles et ceux qui se dirigent vers une thèse, c’est de trouver une équipe dans laquelle on se sent bien. Ce sont trois années qui peuvent être difficiles, avec beaucoup de haut et de bas, et lorsqu’on a le soutien de ses directeurs de thèse et de son équipe, ça change tout ! La thèse se passe totalement différemment. Pour ceux qui le veulent vraiment et qui sont sûrs de faire un doctorat, je conseillerais de ne rien lâcher. Il y a plein de types de financements différents. Si c’est vraiment ce qu’ils veulent, ils finiront par trouver leur place quelque part. Ne pas perdre espoir, suivre les offres et postuler.

 

Auriez-vous une dernière anecdote, un souvenir à nous partager ?

Lorsqu’on apprend que l’on a eu la bourse de thèse, c’est une grande fierté ! Et quand les articles sont acceptés pour publication ce sont aussi de grands moments de joies que l’on célèbre. Et tous les moments du quotidien qui font que l’on est heureux de venir au travail le matin. Nous avons des pauses café, des pauses le midi où nous échangeons beaucoup, beaucoup d’émulation scientifique. Toutes les rencontres que l’on peut faire au travers du doctorat et de stages à l’étranger, on rencontre pleins de personnes qui travaillent sur pleins de thématiques différentes. Énormément de souvenirs !

PPour aller plus loin

Résistance aux médicaments : la recherche en quête de solutions, un dossier Pop’Sciences – CNRS – 23 mai 2023.