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Margin Call | Ciné-club scientifique

MMargin Call | Ciné-club scientifique

En partenariat avec le CNRS, l’Aquarium Ciné Café propose un cycle de rendez-vous associant projections de films et rencontres avec des scientifiques. Ce ciné-club explorera le fonctionnement de la haute-finance, avec la projection de Margin Call, huis clos intense et passionnant de J.C. Chandor (2012).

Pour survivre à Wall Street, sois le premier, le meilleur ou triche. La dernière nuit d’une équipe de traders, avant le crash. Pour sauver leur peau, un seul moyen : ruiner les autres…

La projection sera suivie d’un échange avec Frédéric Jouneau, professeur d’économie à l’Université Lumière Lumière Lyon 2, spécialiste des mécanismes bancaires et financiers. Frédéric Jouneau est membre du Groupe d’analyse et de théorie économique Lyon Saint-Étienne.

 

En savoir plus

Les Journées de l’Économie – JECO 2023 | Surmonter nos fragilités

LLes Journées de l’Économie – JECO 2023 | Surmonter nos fragilités

Rendez-vous les 14, 15 et 16 novembre 2023 pour la 16e édition des Journées de l’Économie ! Pendant 3 jours, participez aux conférences, débats, rencontres, consacrés à l’économie. Cette année, l’évènement s’articulera autour du thème « Surmonter nos fragilités ».

Les Journées de l’Économie (Jéco), organisées par la Fondation Innovation et Transitions, proposent aux citoyens de tous horizons des clés pour mieux comprendre le monde qui les entoure, en échangeant sur une grande diversité de sujets d’actualité abordés avec un éclairage économique.

Quelques-uns des sujets qui seront abordés durant l’édition 2023 :

Comment enfin réussir les politiques publiques / Réglementer les plateformes numériques / Femmes et finances / Le grand retour du protectionnisme ? / Donner une valeur économique à la nature ? / La transition écologique, croître ou pas ? / Une mondialisation heureuse est-elle possible ? / Questionner trois siècles de croissance / Quels changements pour les mobilités de demain ? / La pauvreté expliquée aux enfants / Comment tout réinventer ?

Parmi les intervenants : Philippe Aghion, Esther Duflo, Louis Gallois, Sylvie Goulard, Sarah Guillou, Anne-Marie Idrac, Aurore Lalucq…

>>> Retrouvez l’ensemble du programme 2023 sur cette page :

Programme des journées

 

 

Réapprendre le commun à l’épreuve de la vulnérabilité. La crise un levier d’espérance ?

RRéapprendre le commun à l’épreuve de la vulnérabilité. La crise un levier d’espérance ?

Face à la vulnérabilisation croissante de nos sociétés et institutions, 23 scientifiques (philosophe, neurologue, juriste, médecin, théologien, architecte, psychologue…) sont appelés à réfléchir sur les défis à venir du vivre-ensemble : transition écologique, refondation de la démocratie, reconstruction du lien social, du système éducatif au monde du travail.

Si les termes « vulnérabilité » et « vulnérable(s) », depuis leur usage en Sciences Humaines et Sociales dès la fin du 20e siècle, ont été souvent utilisés pour désigner des catégories déterminées de personnes et de groupes, ou des conditions spécifiques (âges de la vie, statut social, marginalisation économique…) les derniers évènements nous obligent à reconnaître la vulnérabilisation systémique de nos sociétés dans leur complexité grandissante : de la crise environnementale à la fragilisation des démocraties ; de la radicalisation des conflits (politiques, sociaux, religieux…) à la montée des inégalités dans et entre les pays.

L’originalité du projet porté par la Chaire est d’explorer et de mettre à l’épreuve de la société ce concept à la fois plus large et plus radical de vulnérabilité. Le premier colloque, « Vulnérabilité(s). Du cadre théorique aux enjeux pratiques », a permis d’évaluer la pertinence scientifique du concept à la croisée des champs disciplinaires et d’en mesurer les enjeux sociaux, le caractère éminemment opératoire.

Ce deuxième colloque de la Chaire Vulnérabilités entend réfléchir, toujours par une approche pluridisciplinaire, aux crises qui frappent nos systèmes de vie en commun et qui sont autant de manifestations d’une vulnérabilité partagée, ce qui met en relief un long et profond « déclin de l’institution » (Cf. F. Dubet, 2010) ; ce qui nous met face à une éclipse de l’institutio s’exprimant dans plusieurs « endroits » du vivre-ensemble : l’État, l’éducation, la santé, l’environnement, la famille, l’économie, le travail…

AAu programme :

  • Mercredi 25 octobre – 18h – 19h30 / Conférence inauguraleCarla Canullo, professeure de philosophie à l’université de Macerata (Italie), invitée du Collegium de Lyon, proposera une réflexion autour de La blessure qui sauve : la vulnérabilité entre crise et effondrement.

 

  • Jeudi 26 octobre – 9h – 17h45

9h – 12h20 : Comprendre la crise – où l’on parlera d’expérience historique de la crise, où l’on débattra de droit et de bioéthique, où l’on pensera les vulnérabilités systémiques en santé à l’heure de la médecine personnalisée, de la puissance spirituelle de la non puissance, des enjeux de la vulnérabilité au travail…

14h00 – 17h45 : Réapprendre à vivre ensemble – où l’on parlera de l’impact des crises sur le système d’éducation, où l’on dialoguera entre psychologie et sociologie pour partager les tendances et décrypter les représentations sociales de la vulnérabilité chez quelques travailleurs du social, où l’on explorera les régimes de  l’hospitalité, où l’on se se demandera comment la pratiquer…

>> Retrouver le programme détaillé et le formulaire d’inscription sur :

UCLY – Chaire Vulnérabilités

 

Cycle de conférences des 50 ans de l’Université Lumière Lyon 2

CCycle de conférences des 50 ans de l’Université Lumière Lyon 2

À l’occasion de son 50e anniversaire, l’Université Lumière Lyon 2 organise une série de rencontres, destinées à un large public, sur des grandes thématiques et des enjeux de société dont elle se saisit depuis sa création.

Lieu :

PProgramme prévisionnel :

  • 50 ans de travaux sur le genre en sciences humaines et sociales. Genèse et construction d’un champ pluridisciplinaire / mardi 26 septembre 2023 à 18h
  • 50 ans d’évaluation de l’économie sociale et solidaire – Regards croisés d’enseignantes-chercheuses de l’Université Lumière Lyon 2 / mardi 24 octobre 2023 à 18h
  • 50 ans d’expertise : les relations chercheur.es / pouvoirs publics / jeudi 26 octobre 2023 à 18h

 

 

 

 

 

>> Consulter l’ensemble du programme sur le site de :

UNIVERSITÉ LUMIÈRE LYON 2

 

Festival Mode d’emploi 2023

FFestival Mode d’emploi 2023

Les débats contemporains vous intéressent ? Vous vous posez des questions, vous voulez vous engager dans la discussion, tenter de formuler des solutions ? Le festival des idées Mode d’emploi, conçu et réalisé par la Villa Gillet est le rendez-vous à ne pas manquer ce mois de novembre !

Des ateliers, des rencontres auront lieu dans toute la Métropole de Lyon avec un trentaine de philosophes, politistes, sociologues, anthropologues, des scientifiques et des journalistes pour explorer les mondes en transition en interrogeant : les cadres politiques et juridiques de nos démocraties, les circonstances dans lesquelles perdurent les inégalités, les possibilités offertes par la réinvention de notre rapport au vivant, les évolutions des modèles de travail, les transformations à l’œuvre dans de nombreux pays du monde de Cuba à l’Allemagne en passant par la Turquie, l’Ukraine ou encore le Mexique.

Tout le programme sur le site de la Villa Gillet :

Festival Mode d’emploi

Festival Mode d’emploi 2023

Le débat sur la valeur travail est une nécessité | The Conversation

LLe débat sur la valeur travail est une nécessité | The Conversation

Débattre de la notion de travail devrait questionner la centralité même de ce dernier dans nos vies par rapport à d’autres enjeux, comme la famille, l’intime, la place du politique.
Sarah CHai/Pexels, CC BY-NC-ND

La question du travail est au cœur de questions brûlantes d’actualité telles que la réforme des retraites, l’utilisation industrielle de l’intelligence artificielle ou bien encore la remise en cause du modèle productiviste.

Paradoxalement ces multiples interrogations sur les évolutions concrètes du travail ont lieu au moment même où le travail continue à être présenté comme une valeur morale indiscutable et cela de la gauche à la droite de l’échiquier politique.

Tout se passe comme si les débats nécessaires sur les transformations de la place du travail dans notre quotidien étaient limités voire empêchés par un consensus non interrogé, une doxa, sur la centralité indépassable du travail pour avoir un revenu, pour s’émanciper, pour créer de la solidarité, etc.

Et pourtant accepter de débattre sur la place du travail dans la société de demain est sans doute un préalable à toute bifurcation nous permettant de remédier à la triple crise économique, démocratique et écologique que nous vivons.

DDéfinir l’espèce humaine

Le travail, activité visant à transformer son environnement, peut être perçu comme l’élément qui définit la spécificité humaine. L’homme en créant par le travail les conditions de son existence se différencie ainsi de l’animal soumis aux aléas de la nature. Simultanément le travail comme effort pour aller au-delà de soi-même est perçu comme un moyen d’émancipation. Dans ces conditions, le travail comme valeur morale reste central alors même que le travail comme activité économique n’obéit plus à la même nécessité qu’autrefois du fait de l’évolution technologique.

Déjà l’ouvrier spécialisé a été remplacé par la machine dans de nombreuses entreprises et nous sommes aujourd’hui avec l’intelligence artificielle au début de questionnements quant à l’avenir des activités intellectuelles. Cette tension entre la raréfaction du besoin de travailler pour produire de la richesse économique et le consensus autour de la nécessité de travailler et l’une des sources, dans nos sociétés, de dégradation de l’emploi (défini comme du travail rémunéré).

Faute d’envisager une diminution drastique du temps de travail et de décorréler obtention d’un revenu et emploi, nous assistons à une lente dégradation de la qualité et de l’intérêt du travail : précarisation, parcellisation des tâches, etc.

Cela se traduit par des phénomènes comme «les bull shit jobs» mis en évidence par l’anthropologue David Graeber, le «quiet quitting» (faire le minimum dans l’emploi qu’on occupe), la souffrance au travail, ou la grande démission. Cela participe aussi à l’opposition des Français au report de l’âge de la retraite et à la montée d’un ressentiment vis-à-vis des élites économiques mais aussi politiques ce qui alimente la crise démocratique.

LLe travail contre la démocratie ?

Certains, qui ont la chance d’exercer des métiers intéressants et rémunérateurs semblent défendre la dimension émancipatrice du travail alors que, dans les faits, ce qu’ils défendent réellement c’est l’obligation faite à des personnes peu qualifiées d’accomplir des tâches pénibles et non porteuses de sens qu’ils ne veulent pas accomplir.

Homme triste avec cravate
Aujourd’hui, on assiste à une colonisation du temps consacré à l’activité économique sur les autres temps sociaux.
Andrea Picquadio/Pexels, CC BY-NC-ND

Ce phénomène, que le philosophe André Gorz nomme «dualisation salariale» est dangereux pour la démocratie car il éloigne l’horizon d’égalité. Cette dualisation salariale se couple avec l’idée de subordination propre à tout contrat salarial. Pour le dire autrement, on défend l’idée morale d’un travail émancipateur qui se traduit par un contrat salarial producteur d’inégalités et réducteur d’autonomie.

Or la démocratie est auto nomos (autonomie) la capacité à faire et défaire collectivement les normes qui nous gouvernent comme le rappelait Cornélius Castoriadis.

ÊÊtre libéré du travail pour participer à l’activité essentielle : la politique

En effet, la valorisation morale du travail semble une donnée intemporelle, naturelle, alors que dans la Grèce antique, quand on parlait de valeur on discutait du beau, du bien ou du vrai mais pas du travail. D’ailleurs, ainsi que le soulignait la philosophe Hannah Arendt, il fallait même être libéré du travail pour participer à l’activité essentielle : la politique

Aujourd’hui, au contraire, à travers le télétravail on assiste à une colonisation du temps consacré à l’activité économique sur les autres temps sociaux.

Ce temps consacré à l’économique est d’autant plus important que nous sommes rentrés dans une économie de l’attention qui occupe une large part de nos loisirs. Cette temporalité hégémonique du travail et de la consommation correspond à ce que Karl Polanyi (1983) nomme une société de marché, c’est-à-dire une société qui n’est plus régulée par des lois délibérées mais par les règles de l’échange marchand. De ce fait, nous avons de moins en moins de temps pour vérifier les informations, pour remettre en cause des évidences, pour construire sereinement dans la délibération des désaccords féconds. Cela dans une période où il nous faut pourtant prendre le temps d’inventer des solutions collectives pour aller vers une société plus résiliente et écologique.

VValeur travail ou soutenabilité écologique, il faut choisir

L’impératif moral d’avoir une activité productive rémunérée fait passer au second plan l’utilité sociale et écologique de la production. Autrement dit, nous sommes dans une société où on ne travaille plus pour produire plus mais où on produit plus pour pouvoir être en mesure de travailler plus.

Ainsi, produire plus d’automobiles ne permet pas d’aller plus vite et d’être plus libre, cela crée des embouteillages et de la pollution ce qui créera de nouveaux marchés nécessitant plus de travail dans l’invention et la production de véhicules plus rapides ou plus écologiques. Nous pouvons faire référence à Ivan Illich qui montrait dans La convivialité et cela dés 1973, que l’automobile ne permettait pas de se déplacer plus vite qu’en vélo mais qu’elle créait, au nom du progrès et la croissance, de la dépendance.

Mini-bus, van, bicyclette
Peut-on imaginer une société plus conviviale sur le modèle proposé par le penseur Ivan Illich?
Pexels/Elviss Railijs Bitāns, CC BY-NC-ND

Or ce paradoxe est catastrophique pour l’écologie. Il n’est pas possible d’avoir une croissance infinie sur une planète finie. Pour préserver les conditions d’habitabilité de la planète, il semble nécessaire de produire moins et donc accepter de travailler moins. Comment ? Dans quel secteur ?

RRemettre en question la place centrale du travail

Pour que ce débat ait lieu, il faudrait débattre de la valeur travail et remettre en cause sa centralité. Or ce débat n’est pas simple car il renvoie, tout d’abord, à des questions débattues mais qui n’ont pas, pour l’instant, trouvé de réponses consensuelles.

La première, mise en évidence à l’occasion de l’épisode de Covid-19, est celle de la juste rémunération des tâches. Les tâches socialement les plus utiles – celle du care notamment – sont pourtant parmi les moins rémunératrices.

La seconde, ouverte par les débats autour du RSA en France et plus généralement du revenu d’existence en Europe, est celle du découplage du lien entre emploi et revenu.

Cette seconde question entraîne une troisième, celle de la répartition des tâches collectives ingrates si elles ne sont plus assurées par des personnes soumises à des conditions de travail dégradées. Mais ce débat est complexe aussi parce qu’il renvoie à des thèmes non débattus dans l’espace public.

Le premier est celui de la justice distributive (à chacun selon ses mérites). Le droit de vivre doit-il découler de l’effort productif ou du respect de la dignité humaine ? Dans le premier cas, chacun doit apporter une contribution au collectif, dans le second chacun est libre de sa (non) participation. Le deuxième est celui de la valeur économique. Aujourd’hui, l’économie se fonde sur l’idée que la création de richesses repose sur la création de valeur qui elle-même repose sur l’utilité. C’est-à-dire en définitive sur les désirs des individus. Tant que quelque chose répond à un désir humain quelconque il doit être produit. Conception qui engendre de la croissance mais pas nécessairement de l’utilité sociale et de la soutenabilité écologique.

En réalité, le débat sur la valeur travail est à la fois nécessaire et difficile à mettre en place car il vise à remettre en cause la primauté de l’économique sur le politique, le social et l’écologique. Débattre de la valeur travail c’est, au fond, débattre de «ce à quoi nous tenons».

 

Article publié sur The Conversation le 13 juin 2023

Éric Dacheux, Professeur en information et communication, Université Clermont Auvergne (UCA) et Daniel Goujon, Maître de conférences en sciences économiques, Université Jean Monnet, Saint-Étienne

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

L’université doit-elle se mettre au service de l’économie ? Retour sur un débat vieux de plusieurs siècles | The Conversation

LL’université doit-elle se mettre au service de l’économie ? Retour sur un débat vieux de plusieurs siècles | The Conversation

Au Moyen Âge, on observe des liens robustes entre des universités et certaines sphères de l’activité économique. Flickr/Levan Ramishvili 

Depuis le milieu du XXe siècle, les deux principales missions de l’université communément identifiées sont l’enseignement et la recherche. Cependant, il existe une troisième mission, moins connue, qui amènerait l’université à adopter une approche dite « entrepreneuriale », et qui depuis les années 2000 fait l’objet d’un engouement croissant.

Selon les partisans de la troisième mission, l’université doit s’engager – au-delà de ses fonctions d’éducation et de recherche – dans des activités entrepreneuriales, et avoir des impacts bénéfiques sur le développement socio-économique, notamment au niveau local. La troisième mission de l’université consiste ainsi à transférer des connaissances produites dans la sphère académique vers la société, au travers essentiellement de la valorisation de sa propriété intellectuelle, et d’activités d’essaimage, c’est-à-dire la création d’entreprises issues de connaissances universitaires.

Aux États-Unis, la volonté de soutenir la mission entrepreneuriale de l’université s’incarne au travers de la loi emblématique Bayh Dole votée en 1980. Ce texte a été répliqué, en partie, en France en 1999 avec la promulgation de la loi sur l’Innovation et la recherche, et de manière plus ou similaire dans d’autres états de l’Union européenne. Dans les tous les cas, il s’agit de construire des ponts entre d’un côté des savoirs universitaires et de l’autre côté des activités économiques et sociales.

Depuis les années 2000, on observe chez différents acteurs – politiques et économiques – un intérêt accru envers la dimension entrepreneuriale de l’université, la littérature académique notamment en sciences économiques et de gestion s’en est fait largement l’écho. Selon cette perspective, le transfert et la valorisation des connaissances académiques peuvent contribuer à la création d’entreprises, d’emplois, à l’émergence d’innovations (technologiques, organisationnelles, sociales…), et plus généralement à la croissance économique.

LLes universités, des tours d’ivoire ?

Parmi les critiques bien connues adressées aux universités, on retrouve l’argument selon lequel ces dernières seraient enfermées dans des tours d’ivoire, insensibles aux difficultés économiques et aux défis sociétaux. Ces reproches conduiraient à favoriser une ouverture des universités au monde extérieur.

Cependant, l’engouement pour une mission entrepreneuriale est loin de faire consensus au sein de la sphère académique. Nous pouvons regrouper les arguments contre une intensification des liens entre les universités et les activités marchandes dans deux sous-ensembles : premièrement, certains chercheurs restent sceptiques quant à la faisabilité des objectifs associés à cette troisième mission, même au niveau régional.

Deuxièmement, d’autres chercheurs font part de leurs craintes concernant la qualité de la recherche scientifique : la nature heuristique de la recherche pourrait être affectée par des pressions économiques venant du secteur privé. En d’autres termes, favoriser une recherche appliquée en lien avec des intérêts économiques de court terme pourrait perturber des processus de recherche fondamentale qui visent, à long terme, des répercussions favorables sur l’ensemble de la société et l’économie. Ce dernier argument fait référence au principe de sérendipité, c’est-à-dire de découverte liée au hasard, principe crucial pour de nombreux scientifiques.

UUn vieux débat

Selon une croyance répandue, l’université entrepreneuriale serait un phénomène relativement récent. Ce terme est apparu en 1983 dans l’ouvrage d’Etzkowitz, qui, dès les années 1980, soulignait la mise en œuvre de transformations majeures dans le monde universitaire. Cependant, des traces de l’existence d’un intérêt porté par les universités à l’environnement économique sont en réalité très anciennes. Le premier signe d’une université dite entrepreneuriale remonte au XIe ou XIIe siècle en France, en Italie et au Royaume-Uni.

Au Moyen Âge, on observe déjà des liens robustes entre des universités et certaines sphères de l’activité économique. Un des objectifs associés à la création d’universités est alors la formation de professionnels qui seraient davantage compétents qu’une partie de l’administration royale et des élites.

Plus tard, à la Renaissance, le mécénat joue un grand rôle dans le financement de recherches scientifiques. De son côté, le début du XIXe siècle est marqué par l’apparition, outre-Rhin, du modèle de Humboldt qui met l’accent sur l’éducation et la recherche comme étant les deux activités clés des universités. L’université de Berlin, créée en 1810 sur la base de ce modèle est considérée comme l’une des institutions d’enseignement et de recherche les plus prestigieuses au monde, générant de nombreux prix Nobel et de célèbres étudiants, tels que Karl Marx, Max Weber, Arthur Schopenhauer, Albert Einstein et Otto von Bismarck. Le modèle de l’université de Berlin s’est largement répandu notamment en Europe continentale.

Bâtiment principal de l’université Humboldt à Berlin
Bâtiment principal de l’université Humboldt à Berlin. Jean-Pierre Dalbéra/Flickr, CC BY-SA

Néanmoins, au cours de la même période, on observe comme un contrepoids, l’émergence d’établissements d’enseignement supérieur purement utilitaristes axés sur l’enseignement, sans préoccupation pour la recherche. L’objectif principal de ces établissements est alors de répondre à des besoins industriels et sociétaux, c’est notamment le cas du modèle des grandes écoles en France.

Cependant, on peut relever le rôle clé joué par les universités lors de la première révolution industrielle : de nombreuses inventions émergent de collaborations entre les universités et l’industrie. Cela a notamment donné lieu à des avancées technologiques majeures apparues en Allemagne dans les secteurs de l’électricité et de la chimie. Au Royaume-Uni, au XIXe siècle, Lord Kelvin incarne à la fois un physicien reconnu et un membre de la direction de la filiale britannique de la société américaine Kodak. Un autre exemple illustre français demeure celui de Marie Curie, lauréate de deux prix Nobel, et à l’origine d’une toute nouvelle industrie.

Ce n’est qu’au cours du XXe siècle, après les deux guerres mondiales, un changement conséquent se produit avec l’apparition d’un certain éloignement entre le monde universitaire et le monde industriel. Les universités semblent moins enclines à se rapprocher des entreprises privées, notamment pour y trouver des financements. Cela est dû, au moins en partie, à la forte croissance, à la fois des activités économiques et de la richesse du monde occidental.

En Europe continentale, la perception selon laquelle les missions de recherche et d’éducation doivent être à la fois prépondérantes et corrélées devient une opinion dominante. En effet, à cette époque de nombreux opposants à la valorisation économique de la recherche affirment que recherche et formation représentent le modèle souhaité de ce que devrait être une université. Ils défendent ainsi un modèle d’université indifférent à toute préoccupation économique.

EEt maintenant ?

Finalement, si on considère les siècles passés plutôt que les dernières décennies, la période pendant laquelle les universités ont été étrangères à toute considération sociale et économique demeure assez limitée. Ainsi, il n’y aurait pas eu de passage récent d’un mode de production de connaissances purement académique à un mode plus utilitariste de production de connaissances, comme certains ont pu l’affirmer dès les années 1990. Ces deux modes co-existent simultanément depuis longtemps.

Cependant, leur poids, leurs influences respectives, et leurs configurations varient au cours du temps, en fonction de valeurs sociales, économiques et politiques. Aujourd’hui, les grands défis sociétaux auxquels nous sommes confrontés, tels que la transition écologique, le vieillissement de la population, la souveraineté technologique et industrielle, l’impact de la digitalisation et de l’intelligence artificielle (IA), appellent premièrement à un renouvellement de la réflexion sur les interactions au sein des universités entre recherche, enseignement et engagement entrepreneurial.

Deuxièmement, dans la continuité des travaux sur la recherche et l’innovation responsable (RIR), on peut également s’interroger sur l’importance de construire des relations fortes entre les universités d’un côté et la société de l’autre. En effet, face à des défis complexes, changeants, combinant des enjeux technologiques et sociétaux, et caractérisés par une forte incertitude, la question du rôle et des missions des organisations de création de savoirs tels que les universités, est plus que jamais d’actualité.The Conversation

 

Publié  sur The Conversation le 8 juin 2023

Valérie Revest, Professeure des universités en sciences économiques, centre de recherche Magellan, iaelyon School of Management – Université Jean Moulin Lyon 3 et Jean-Régis Kunegel, Docteur en économie, Université Lumière Lyon 2

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.

« De(s)connexions » une journée autour du numérique

«« De(s)connexions » une journée autour du numérique

La Maison de l’Environnement organise le samedi 17 juin une journée pour aborder les enjeux et impacts, positifs et négatifs, du numérique ! En famille, entre amis ou en solo venez participez à cette journée festive, aux ateliers et temps inspirants qui seront proposés.

Au programme : des ateliers pour petits et grands sur l’économie de l’attention (association SERA), les dessous d’internet (Fréquences Écoles), pour devenir « Plus smart sans phone » avec l’association Conscience et Impact Écologique, pour faire attention aux cookies et à ses données personnelles (TUBA), et bien d’autres encore.

Mais aussi, un atelier de cuisine participative, un Repair Café, une fresque du numérique, une cabane à histoires et pour finir la journée en beauté une conférence-gesticulée sur « l’écran méchant-loup » !

Vous ne savez pas quoi faire de vos vieux ordis ? l’association Eisenia les récupère pour leur donner une seconde vie, venez leur déposer et profitez-en pour vous arrêter à leur Repair Café !

La journée se clôtura par une conférence gesticulée « L’écran méchant loup » proposée par Philippe Cazeneuve.

 

>> Programmation intégrale et inscription :

Maison de l’environnement

Immobilier : la propriété devient de moins en moins abordable, même dans les zones les plus pauvres | The Conversation

IImmobilier : la propriété devient de moins en moins abordable, même dans les zones les plus pauvres | The Conversation

Selon le dernier rapport de la Fondation Abbé Pierre, publié en février dernier, on compterait en France 330 000 sans-abris, au moins 4 millions de personnes mal logées et 15 millions de personnes touchées par la crise du logement. Face à cette situation dramatique, l’un des enjeux porte sur les leviers de l’action sur les marchés du logement. Ces dernières années, la production neuve a ralenti (430 000 logements en 2012 à 370 000 en 2022) et la production de logements sociaux continue de se résidualiser (126 000 logements sociaux financés en 2016, 95 000 en 2021, 96 000 en 2022).

Au-delà de ces chiffres, la situation s’explique aussi par le blocage de la chaîne du logement du fait du ralentissement de l’accession à la propriété dans un contexte de hausse des prix. La part des primo-accédants tend à diminuer au profit de celle des propriétaires ayant fini de rembourser leur emprunt.

Dans ce contexte, nous avons mené une enquête financée par le programme ANR WIsDHoM (Wealth Inequalities and the Dynamics of Housing Markets) portant sur les aires urbaines de Paris, Lyon et Avignon. Nous relevons que dans ces trois zones, l’accès à la propriété est devenu la norme, tout en étant moins abordable, creusant ainsi les inégalités.

UUne diminution générale de l’abordabilité

Dans chacune des trois agglomérations, nous avons sélectionné quatre communes aux tendances de marché contrastées et nous y avons mené une enquête par voie postale auprès des propriétaires résidents (1 427 réponses). Les résultats tirés de cette enquête ne concernent donc pas l’ensemble des trois agglomérations mais des secteurs de marché spécifiques.

Le sens général de l’évolution ressort sans équivoque : l’abordabilité, entendue comme le rapport entre les prix et les revenus, a diminué partout.

Dans les trois agglomérations, les communes où un mois de revenu suffit pour acquérir un mètre carré sont de plus en plus reléguées dans les périphéries alors que le périmètre de celles où il faut plus de deux mois de revenu pour un mètre carré ne cesse de s’étendre.

Le processus est le plus marqué pour l’agglomération parisienne, dont la ville centre et la première ceinture étaient déjà peu abordables en 2002. Les niveaux d’abordabilité sont un peu meilleurs dans les deux autres agglomérations (plus pour Lyon que pour Avignon toutefois), mais la situation se détériore significativement.

Abordabilité des maisons : ratios prix – revenus localisés de 2002 à 2018

 

Cette diminution de l’abordabilité a eu pour conséquence une triple évolution : une plus grande sélectivité sociale des marchés, une mobilisation plus importante des propriétaires pour leur parcours d’accession, et une recomposition de la géographie des parcours patrimoniaux.

La sélectivité sociale peut être mesurée par la hausse de la part des ménages à dominante cadre parmi les acquéreurs, part qui passe de 27 % avant l’inflation immobilière à 43 % après 2008. Cette hausse est surtout importante dans la première période de hausse des prix de l’immobilier à Paris et à Lyon, alors qu’elle est plus continue à Avignon.

On observe également une certaine convergence : les écarts entre les terrains de l’enquête dans les trois agglomérations sont moins élevés après 2008. Même si les niveaux de prix sont très différents d’une agglomération à l’autre, l’évolution de l’abordabilité produit des résultats assez similaires en termes de filtrage social par le marché du logement.

LLe poids des transmissions intergénérationnelles

La deuxième conséquence porte sur les ressources mobilisées par les ménages pour devenir propriétaires, dans des logiques d’accumulation patrimoniale. Les catégories sociales qui parviennent encore à devenir propriétaires doivent s’engager dans des parcours d’accession à la fois plus longs et plus contraignants que par le passé.

La durée moyenne des emprunts ne cesse de s’allonger dans les trois agglomérations : 15,7 ans pour les acquéreurs d’avant 2000, 20 ans après 2015. Dans le même temps, la part de ceux dont l’apport est inférieur à 25 % du prix d’achat passe de 30 % avant 2000 à 25 % après 2008. Ce rôle déterminant de l’apport initial renvoie à la proportion croissante d’acquéreurs bénéficiant de la revente d’un autre bien immobilier.

Un tiers des acquéreurs des années 1980 et 1990 étaient déjà propriétaires avant d’acheter. Ils sont près de 60 % après 2008. Le découplage des prix et des revenus n’est ainsi tenable que par cette réinjection du patrimoine issu de la revente de biens immobiliers pour financer les acquisitions suivantes, au détriment des primo-accédants. Dans cette dynamique, l’agglomération d’Avignon comble progressivement l’écart avec les métropoles parisienne et lyonnaise, et les dépasse même après 2008.

Dans ce contexte, le maintien des primo-accédants sur le marché passe par deux canaux distincts : les prêts aidés comme le prêt à taux zéro ou le prêt à l’accession sociale d’une part, les transmissions intergénérationnelles d’autre part. Les premiers connaissent surtout un essor entre 2000 et 2007 où 41 % (contre 19 % auparavant) des primo-accédants enquêtés en bénéficient. Ils refluent ensuite à 31 %, reflet de l’évolution des terrains étudiés (certains sortant du zonage de ces dispositifs) et de du niveau social des acquéreurs (ces prêts aidés étant versés sous condition de revenus).

Le poids des transmissions intergénérationnelles pour les primo-accédants augmente quant à lui surtout après 2008. Alors que 18 % en bénéficiaient pour constituer un apport avant 2000 et 14 % entre 2000 et 2007, ce sont 33 % des primo-accédants qui mobilisent cette source après 2008. Sur des secteurs spécifiques de marché, les retournements des modes d’acquisition peuvent être rapides et la substitution des transferts intergénérationnels aux politiques d’aides à l’accession est un facteur renforçant les inégalités.

LLes inégalités sociospatiales se redessinent

L’évolution de l’abordabilité affecte aussi, et c’est la troisième conséquence, la géographie des mobilités résidentielles. 39 % des acquéreurs d’avant 2000 ont acheté dans la commune où ils résidaient, 29 % après 2008.

Ce mouvement est continu dans les agglomérations de Lyon et d’Avignon, alors qu’il semble se retourner après 2008 à Paris. Un élément d’explication tient au fait que les ménages déjà propriétaires de l’agglomération parisienne réinvestissent plus souvent dans la même commune que ceux des deux autres agglomérations. 67 % des acquéreurs issus de la même commune étaient déjà propriétaires dans les communes autour de Paris, contre 46 % à Lyon et 30 % à Avignon.

Une partie des propriétaires franciliens semblent parvenir à mieux tirer parti des hausses de prix pour se maintenir dans leur commune alors qu’à Lyon et Avignon ils changent de localisation pour poursuivre leur parcours résidentiel. Les différentiels d’abordabilité enclenchent donc des mobilités géographiques et redessinent les inégalités sociospatiales. Ces effets ne peuvent être saisis qu’en étant attentifs aux interactions avec les autres déterminants des trajectoires patrimoniales.

En combinant une approche systématique des marchés dans trois agglomérations différentes, mais aux dynamiques convergentes, à une enquête plus ciblée sur des secteurs de marché contrasté, on peut voir comment la réduction générale de l’abordabilité, passant par la médiation de facteurs patrimoniaux (durée d’emprunt, apport initial, transmissions intergénérationnelles, revente d’un logement précédent), affecte les profils et les parcours des propriétaires. Ce faisant, on peut mieux caractériser le blocage de l’accession à la propriété en y distinguant trois dimensions : un filtre social de plus en plus puissant, un surcroit de mobilisation de ressources et une contrainte de localisation grandissante.The Conversation

 

Publié  sur The Conversation le 11 avril 2023

Renaud Le Goix, Professeur en géographie urbaine et économique, Université Paris Cité et Loïc Bonneval, Maître de conférences en sociologie, Université Lumière Lyon 2

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original :

The Conversation

Les limites de la croissance – Denis Meadows

LLes limites de la croissance – Denis Meadows

Dennis Meadows obtient sa thèse de doctorat en 1969 au Massachusetts Institute of Technology (MIT), où il débute les travaux qui l’ont fait mondialement connaître. De 1970 à 1972, il dirige le projet « Predicament of Mankind » pour le Club de Rome, groupe de réflexion sur les problèmes urgents auxquels doivent faire face les sociétés, réunissant des scientifiques, des entrepreneurs et des fonctionnaires internationaux.

Ce projet de recherche a pour objectif de prédire la trajectoire future de notre civilisation, sur une base purement scientifique et grâce à la simulation informatique. Le modèle World3 est créé, qui produit 13 scénarios, plus ou moins pessimistes, annonçant tous un basculement de civilisation au cours du 21e siècle.
En 1972, Dennis Meadows, Donnella Meadows, Jørgen Randers et William W. Behrens III remettent au Club de Rome leur rapport : Les limites de la croissances (The Limits to Growth). Il s’agit de la première étude d’importance sur les dangers que représentent la croissance démographique et économique sur les ressources environnementales mondiales.

L’engagement actuel de Dennis Meadows porte principalement sur le thème de la résilience face à la crise environnementale et sr la transmission pédagogique.

Une conférence, suivie d’une table ronde sur les enjeux de la formation à la transition écologique s’est déroulée à l’ENS de Lyon le 19 septembre 2022.

Intervenants :

  • Dennis Meadows, chimiste de formation, Dennis Meadows est analyste des systèmes, Professeur émérite de l’Université du New Hampshire, États-Unis ;
  • Emmanuelle Boulineau, Vice-Présidente Études à l’ENS de Lyon ;
  • Gabriele Fioni, Recteur délégué à l’enseignement supérieur, à la recherche et à l’innovation ;
  • Jean Jouzel, climatologue, auteur du rapport Sensibiliser et former aux enjeux de la transition écologique et du développement durable dans l’enseignement supérieur ;
  • Zoé Reverdy, étudiante à l’ENS de Lyon.

Animé par  : Yves Sciama, journaliste scientifique.

>> Écoutez la conférence de Denis Meadows :

ENS de lyon

Les interventions ont eu lieu en anglais avec projection de la traduction simultanée en français.