DDiminution des émissions de CO2 : avec des nouveaux modèles de vie, d’habitats, ou encore des progrès technologiques ? ©trianglePeut-on réduire les émissions de CO2 ? Et comment ? Les progrès technologiques, ou encore de nouveaux mode de vie seraient-ils des solutions ?Dans ce troisième et dernier podcast dont le triptyque est consacré à la mobilité, pollution et transition écologique… nous allons tenter d’éclaircir ces questions.Pour cela, nous sommes toujours avec Maxime Hure, Maître de conférences habilité à diriger des recherches en science politique à l’Université de Perpignan (CDED – Centre du droit économique et du développement) et chercheur associé au laboratoire Triangle.> Écoutez le podcast :https://popsciences.universite-lyon.fr/app/uploads/2025/04/tri3-3_maxime-hure.wav> Lire la retranscription des propos de l’interview :Est-ce qu’en envisageant des progrès technologiques, nous pouvons réduire la pollution, et surtout dans quels domaines ?Maxime Huré – Oui, cette question est complexe mais par exemple aujourd’hui il est question de faire circuler des véhicules (automobile, trains) à l’aide de l’énergie issue de l’hydrogène, il est aussi question de développer les voitures autonomes, de transformer le parc automobile thermique en véhicules électriques, en partant du principe que l’électricité n’est pas produite par la combustion du charbon … Le problème est qu’avec ces innovations, nous restons toujours dans l’amélioration de l’existant, et encore cela est vrai lorsqu’il n’y a pas « d’effets rebonds » d’une innovation technologique, comme par exemple des pollutions décuplées par l’extraction de minerais rares pour certaines technologies, on pense aux batteries des véhicules électriques par exemple. De plus, certaines innovations se heurtent à des résistances sociales des populations et aux standards industriels des entreprises.Mon point de vue est qu’il ne faut pas espérer d’une technologie qu’elle résolve tous les problèmes de mobilité. Il est aussi possible de conduire des recherches dans d’autres directions, complémentaires aux innovations technologiques : analyser les politiques publiques et leurs effets, mais aussi les changements de modes de vie, les modes d’habiter ou encore comprendre le rôle de l’organisation de l’espace et de nos consommations sur les pratiques de mobilité. Les recherches en sciences sociales montrent que les changements sociaux et politiques comptent autant parfois davantage que les changements technologiques et que l’innovation passe nécessairement par ces trois leviers.© PixabayAussi, devrions nous envisager un nouveau mode de vie, d’habiter, ou encore nous orienter vers des transformations plus générales ?M.H. – Alors la transformation des modes de vie appartient à chacun d’entre nous, avec ses possibilités, mais il appartient surtout aux décisions des femmes et des hommes politiques. Donc en tant qu’enseignant-chercheur, mon rôle, modeste, est d’analyser les grandes dynamiques passées et en cours et de les partager avec mes collègues, avec des étudiants et avec les acteurs engagés dans l’action publique et privée. Mon point de vue en ce qui concerne la mobilité est qu’il faut à la fois s’intéresser aux grandes transformations qui vont affecter nos vies quotidiennes dans les prochaines années – raréfaction de certains matériaux et des matières premières fossiles, effets du changement climatique, avec des enjeux d’adaptation, vieillissement de la population – et en même temps étudier des politiques innovantes locales ou des alternatives qui pourraient symboliser des évolutions futures, ce qu’on appelle « les signaux faibles ».On peut aussi questionner quelques changements, qu’on observe actuellement. Le développement des véhicules intermédiaires qui consomment moins de matériaux, donc plus légers vont-t-ils s’imposer, y compris au sein de l’industrie automobile ? La gratuité des transports mise en œuvre dans certaines villes françaises comme Dunkerque, Montpellier ou dans des capitales européennes comme Luxembourg, Tallinn, sera-t-elle au cœur d’un nouveau contrat de société ? Le télétravail va-t-il se généraliser, s’amplifier ? Ces questionnements renvoient fondamentalement à des arbitrages politiques, sur la manière dont nos gouvernants vont permettre ou pas à ces évolutions de s’imposer.Cependant, tout cela a un coût ?M.H. – Oui, la question des coûts de ces transformations doit être posée. Mais sur ce point, je ne suis peut-être pas le mieux placé pour vous répondre, d’abord parce que je ne suis pas économiste de formation ; mais aussi parce que le financement des infrastructures de transport relève de décisions politiques. J’aimerais ajouter un point au sujet des changements dans nos modes de vie. Il me semble intéressant de toujours avoir en tête des points d’appui aussi historiques pour penser éventuellement des ruptures et même parfois les continuités dans nos sociétés.C’est-à-dire ?M.H. – Nous avons déjà fait face à des grandes périodes de restriction des mobilités – on pense souvent à la Seconde Guerre mondiale. Et l’histoire nous enseigne qu’il nous faut laisser du temps pour analyser les effets de certaines ruptures. Prenons l’exemple de la pandémie de covid-19. Rappelons quand même, qu’en l’espace de quelques semaines, nous avons tous été confinés, à l’exception de quelques corps de métier, sans même que l’État ait eu recours à l’armée pour faire respecter cette contrainte tout à fait exceptionnelle.Et donc avec des collègues, on a trouvé cela assez incroyable comme point d’appui pour lancer des recherches.. et avec des collègues de la revue Métropolitiques, Jean-Baptiste Frétigny et Thomas Pfirsch, en partenariat avec le Forum Vies Mobiles, nous avons entrepris de rassembler des recherches et des points de vue sur les effets de la pandémie sur les mobilités dans un dossier spécial de la revue Métropolitiques en pensant la question : Comment penser les mobilités dans un monde post-covid ?On s’aperçoit avec un peu de recul que, malgré la rupture des confinements, les contributions mettent plutôt en avant des continuités de dynamiques déjà à l’œuvre avant la pandémie, comme le développement massif du transport aérien, qui se fait d’ailleurs sous forme d’une revanche des consommateurs et des compagnies aériennes ou encore la permanence des déplacements automobiles dans certains contextes territoriaux.Mais ce dossier, ce qui est intéressant, c’est qu’il montre aussi des changements à analyser sur le long terme comme l’accélération de la pratique cyclable dans certains territoires. Et même on a d’autres évolutions qui préfigurent peut-être de changements plus radicaux dans nos modes de vie, comme le développement massif du télétravail depuis la pandémie. Quels pourraient être les effets du télétravail sur les déplacements quotidiens ? Sur l’organisation du travail, sur les activités de loisir ? Mais aussi sur l’économie de l’immobilier de bureau ou sur la redynamisation de certains territoires ruraux ? Il pourrait y avoir une redistribution aussi des habitants sur le territoire.Et vous actuellement, vous travaillez sur quel projet de recherche ?M.H. – Actuellement, plusieurs recherches, sur l’élaboration et la mise en œuvre des politiques de mobilité, en particulier à l’échelle territoriale. Mes travaux s’appuient essentiellement sur des méthodes qualitatives, sources écrites, réalisation d’entretiens, d’observations, sur les dynamiques politiques et institutionnelles dans les politiques de mobilité, mais aussi la circulation d’idées, de pratiques et de politiques à différentes échelles.Pour vous donner deux exemples, je suis impliqué dans une recherche collective visant à comprendre les freins et les leviers à la mise en œuvre d’un rationnement (le mot est un peu fort) ou d’un encadrement carbone des mobilités au sein de diverses organisations publiques et privées. Autre exemple, je travaille aussi sur les politiques en faveur du vélo dans différents contextes territoriaux, à la fois urbains, mais aussi sur les espaces plus périphériques et ruraux.Précédemment : mobilité et écologie : comment concilier les enjeux politiques et sociaux ? > Pour en savoir plus :Triptyque – Laboratoire Triangle
ÀÀ l’Ecole de l’Anthropocène revient au Rize avec sa 5e édition Cinq journées pour comprendre, imaginer, construire les possibles autour du changement global.Du 24 au 28 janvier 2023, l’École urbaine de Lyon – Université de Lyon et ses partenaires proposent la 5e édition de l’événement « À l’École de l’Anthropocène » accueillie, pour la seconde année, au Rize à Villeurbanne. L’exploration de la question anthropocène, pour tous les publics, se poursuit à travers une diversité féconde de formats et d’acteurs. L’anthropologue Tim Ingold sera l’invité d’honneur de cette édition placée sous le signe de la fragilité, du soin et de la relationnalité.Au programme, soirées débats, conférences, performances – cours publics – ateliers, séminaires – balades et visite de l’exposition « ça se trame à Villeurbanne » – portraits de figures de l’écologie – cartes blanches à des collectifs – rencontres à la médiathèque du Rize avec des auteurs autour de leur parution récente – programmation cinéma adulte et jeunesse au Comoedia – programmation de Radio Anthropocène.PROGRAMME>> Pour en savoir plus : ecoleanthropocene.universite-lyon.frhttps://popsciences.universite-lyon.fr/app/uploads/2023/01/aea23.anim1200x1200-gif-3a.mp4Un événement produit par : l’École urbaine de Lyon/Université de Lyon, En partenariat avec : le Rize, le LabEx IMU (Intelligences des Mondes Urbains) et Cité anthropocène.Une programmation préparée en collaboration avec : October Octopus.Partenaires : Ville de Villeurbanne – Métropole de Lyon – Centre national d’études spatiales (CNES) – Laboratoire Environnement Ville Société (EVS) – Comœdia – SERL – Maison du projet Gratte-Ciel Centre-Ville – LyonBD Festival – Centre de Culture Contemporaine de Barcelone (CCCB) – Ville de Lyon – Radio Bellevue Web – Lyon Music.
RRentrée Anthropocène 2022 à Lyon et Saint-Étienne La Rentrée Anthropocène, initiée par l’École urbaine de Lyon – Université de Lyon, sous les auspices de la Fête de la Science, a pour but de mobiliser les étudiants, enseignants et les personnels autour des enjeux du changement global que nous expérimentons, pour mieux répondre aux attentes fortes des nouvelles générations.Pour sa 3e édition, l’évènement présente une nouvelle programmation dynamique mise en œuvre par et avec les établissements du site universitaire Lyon Saint-Étienne.>> Découvrez la nouvelle programmation (conférences, expositions, balades, ateliers…) :Rentrée Anthropocène 2022 : PROGRAMME>> A travers 5 grandes thématiques (catastrophe, risque, espace, droit, décision publique), retrouvez les textes, dessins, podcasts, vidéos qui explorent les enjeux du changement global et la crise d’habitabilité de notre monde :Rentrée Anthropocène 2022 : les RESSOURCES Avec la participation de :Université Claude Bernard Lyon 1 (BU Sciences)Université Lumière Lyon 2Université Jean Moulin Lyon 3Université Jean Monnet Saint-ÉtienneENSAL (Laboratoire LAURE).
LLa vie en tourbe Intitulée La ferme islandaise. Une archéologie des narrations de l’architecture en tourbe, l’objet de cette recherche est la torfhús (maison en tourbe), un mode de construction utilisé par les Islandais, de la colonisation de l’île jusqu’à la première moitié du 20e siècle.En proposant une ethnographie de la torfhús par la récolte, puis l’analyse de récits et de pratiques diverses, cette thèse permet de percevoir quels sont les liens tissés entre le bâti vernaculaire et la construction de la nation islandaise et de l’islandicité.[…] Les enjeux de la conservation du bâti en tourbe renvoient aussi sur les problématiques du tourisme, du changement climatique, de la politisation et de la mercantilisation du patrimoine culturel. Le matériau tourbe, quant à lui, nous permet de réfléchir à de nouvelles formes d’architecture écologique.Pour restituer ce travail de terrain intimement lié aux personnes enquêtées (essentiellement islandaises) et à un matériau spécifique (la tourbe), le projet de La Vie en Tourbe propose de le décliner sous la forme de photographies, d’une installation et de divers outils de médiation (livre animé, jeu participatif, collecte de terrain etc…), comme un montage – scientifique et subjectif – où divers aspects de la pluralité de la maison en tourbe pourraient se télescoper.Mise en exposition de la recherche doctorale de Sandra Coullenot, doctorante au Centre Max Weber, Université Jean Monnet, qui a soutenu sa thèse en anthropologie en février 2022 (dirigée par Michel Rautenberg -UJM / Centre Max Weber). Elle a souhaité faire découvrir au grand public l’objet de ses recherches passionnantes et les faire rentrer dans l’histoire islandaise à travers l’angle d’une forme d’habitat particulière : l’habitat en tourbe.Un avant-goût de l’exposition…Écouter les podcasts qui accompagnent l’expositionÀ l’occasion de cette exposition, une conférence grand public sera proposée, dans le cadre de la Fête de la Science : Repenser l’habitat d’aujourd’hui | 10 octobre 2022 à 18hPour en savoir plus :Arts Recherche Territoires Savoirs
OOpportunités et limites du logement collaboratif Reconsidérer notre manière d’habiter, de se réapproprier la cité, de partager les quotidiens et de mieux vivre ensemble dans nos quartiers.Ce plateau radio s’attache à rêver les prochains lieux de la cité et à penser notre manière de l’habiter. A quel modèle économique se rattacher, entre les objectifs marchands du logement classique et les aspirations collectives et non-marchandes d’une partie des habitants ? Quel modèle social soutenir, en évitant les effets de communautés et d’entre-soi ? Débats et réflexions sur nos manières d’habiter la ville et d’investir des lieux, à partir de retours d’expériences à Vienne, Lyon et ailleurs dans le monde.>> Ré-écoutez le podcast de l’émission radiophonique enregistrée le 27 novembre 2018, dans le cadre du Pop’Sciences Forum Citoyens, la ville de demain vous appartient !Invités : Guillaume Faburel, géographe et professeur des universités (Université Lyon 2, Laboratoire Triangle, École urbaine de Lyon), Aurore Meyfroidt, géographe (laboratoire PACTE; Labex Intelligences des Mondes Urbains)Animation : Samuel Belaud (Université de Lyon)
[[Pop’Sciences Forum] Citoyens, la ville de demain nous appartient ! Nos collectivités développent massivement des stratégies de “smart-city”, de “e-city” ou encore de “learning-city”, au service de villes dites plus intelligentes, flexibles et optimisées par le numérique. Dans le même temps des initiatives citoyennes fleurissent massivement dans nos quartiers, au sein desquels les habitants participent à la fabrique de leurs cités et mettent en oeuvre de nouveaux usages ou de nouvelles pratiques sociales.Cette édition du Pop’Sciences Forum s’intéresse à ces nouveaux phénomènes de transformation de la ville et de la citoyenneté, encouragés par le développement du numérique. Nous sollicitons des expertises en urbanisme, en sociologie, en architecture, en informatique ou encore en sciences politiques, pour découvrir, débattre et imaginer la place que les citoyens peuvent avoir dans cette ville de demain. Entre habitants, travailleurs, chercheurs, aménageurs, élus et artistes, nous ouvrons 4 journées de débats. 4 chantiers éphémères de réflexions et de débat à propos de l’avenir des lieux de la cité, des formes d’habitabilité, de la mobilité, du big data, ou encore de la nuit.La ville intelligente est une ville où le numérique nous invite à réinventer notre rapport à la cité, aux temps, aux espaces, aux connaissances et aux autres … Quelles opportunités pouvons-nous saisir pour mieux optimiser nos déplacements, nos interactions, notre bien-être, le coût de la ville, sa durabilité et sa gouvernance ?POSONS LES BASES DU MÉTIER DE CITOYEN DE DEMAIN, IMAGINONS UNE VILLE INTELLIGENTE – OU PAS SI BÊTE – QUI ASSOCIE LE NUMÉRIQUE À D’AUTRES FORMES D’INNOVATIONS SOCIALES ET CULTURELLES.PROGRAMMATIONINTERVENANTS | AFFICHE | PROGRAMME PDFPPOP’CAST : LES ÉMISSIONS RADIOS PARTICIPATIVES DU POP’SCIENCES FORUM
CCréer du commun par l’habiter : le cas de trajectoires militantes dans le squat officiel bruxellois « 123 » La crise du logement est toujours un problème massif en France et en Europe occidentale. Ce sont les classes moyennes, populaires ou pauvres qui sont les plus affectées par cette crise tant pour l’accession à la propriété individuelle que pour la location. Souvent c’est encore la politique publique qui est accusée d’inefficacité dans la régulation de la spéculation foncière et immobilière, bien que les politiques d’implication des habitants s’imposent aujourd’hui comme une composante du projet urbain et fait partie de la “bonne gouvernance” dans les pays occidentaux. Bien que proches, la participation institutionnelle ne correspond pas, selon nous, à la revendication de droit de la ville comme cela a été théorisé par H. Lefebvre. C’est naturellement que ce décalage, malgré les tentatives voilées, fait ressortir des mouvements divers d’initiatives alternatives en matière de logement. Parmis ces initiatives, une a retenu notre attention pour son caractère collectivement impliquant et ses liens avec la portée subversive de la quotidienneté : l’habitat partagé où les habitants s’impliquent en réalisant l’autogestion et la production commune de leurs logement. Ce n’est pas juste une alternative économique à ce que la ville propose en termes de logement, mais un mode de vie que les gens recherchent. Pour mieux comprendre ce raisonnement et la forme pratique de la revendication de droit à la ville qu’il entraîne, nous proposons à votre attention une interview auprès d’habitants d’une communauté auto-gérée bruxelloise, un squat appelé 123 occupé depuis 10 ans avec un accord avec le propriétaire de l’immeuble.Ci-dessous vous trouverez deux histoires différentes, deux raisonnements différents partageant une toiture et des espaces communs au quotidien. Celles de Steven, un des fondateurs du squat officiel bruxellois 123, et celle de Koen, habitant du squat officiel 123 à Bruxelles. Khrystyna : Présentez-nous, s’il-vous-plaît, votre habitat et votre action. Est-ce que vous reconnaissez votre mode d’habiter dans la notion de droit à la ville (anticapitalisme, anti-exclusion urbaine, valeur du commun, attentions aux pratiques quotidiennes, auto-gestion.. attitude critique) ?Steven : En septembre 2015 alors que j’étais sans domicile depuis une semaine, j’ai eu la chance d’arriver par hasard au « 123 » . Cela m’a sauvé : j’y ai trouvé une stabilité pour mon logement et une aide psychologique et affective qu’aucune autre structure officielle n’aurait pu m’offrir.Lorsque la fille qui m’avait prêté sa chambre est revenue, j’ai ouvert un squat qui a duré 6 mois. C’était très bien. Il s’agissait d’un hôtel particulier qui appartenait à la Banca Popolare et qui était vide depuis 15 ans dans le quartier Européen. Dix autres personnes y ont trouvé refuge. Après je suis revenu au 123 et on m’a donné officiellement une chambre.Pour ceux qui ont des accidents de parcours ou se retrouvent marginalisés, la société n’est pas adaptée pour leur répondre. On ne fait pas confiance à un système qui vous exclut. Oui, l’opposition à un capitalisme totalitaire fait parti du mode vie en squat. La solidarité et l’entraide sont des valeurs pleine de sens que l’on vit tous les jours.Koen : Depuis Juillet 2017 j’habite à la Rue Royale, un des lieux occupés par la communauté d’habitants auto-gérée bruxelloise dite 123. La semaine passée je suis devenu officiellement habitant moi-même (hourra !). Il s’agit d’une occupation démarrée en squattant, mais existante depuis 10 ans grâce à une convention avec le propriétaire (public !) : la Région Wallone. En novembre 2018 nous devrons quitter les lieux, car le nouveau propriétaire (privé) veut y construire des logements étudiants. Avant j’ai habité pendant plusieurs années en bougeant à Bruxelles d’un endroit à un autre, souvent en logeant chez des ami.e.s, sans avoir un lieu fixe. Je suis de Bruxelles et j’ai un réseau (famille, ami.e.s…) qui m’a permis de faire cela plutôt confortablement, parce que je veux faire ce choix. Je crois que grâce à cette chance là, et la prise de conscience de voir cette expérience ainsi , j’ai pu mettre ma façon de vivre en question et j’ai pu m’approcher de mondes différents que ceux dans lesquels j’ai grandi, desquels j’étais prédestiné à faire partie, ainsi que de travailler mon empathie. Donc, oui, disons qu’on peut appeler cela une attitude critique. A part ça j’ai toujours connu l’habitat collectif, faisant partie d’une grande famille de plusieurs ménages, travaillant et vivant ensemble, et ayant été en internat, entre autres…Khrystyna : Est-ce que c’est une forme du lutte pour vous ? Si oui est-ce qu’il s’agit de la lutte urbaine pour le logement ou est-ce qu’elle rejoint plus largement d’autres formes de luttes urbaines?Steven : C’est souvent par nécessité que l’on se tourne vers la vie en squat : « Il me faut un toit, je ne veux pas dormir dehors, la maison d’à coté est vide, je rentre m’y abriter. »Le manque de ressources, l’isolement et parfois la fuite amènent à rencontrer d’autres personnes qui vivent les même galères. L’entraide fait que l’on se retrouve et qu’on occupe ensemble des bâtiments créant une forme de communauté. Un jour, la chance sourit et un proprio’ donne une convention, ce qui nous permet de rester. Car déménager tout le temps ou risquer l’arrivée des flics ce n’est pas drôle. En tant qu’individu on a aussi besoin de stabilité. Donc cette lutte n’est pas permanente, mais il s’agit bien d’une lutte pour sa survie et pour se créer un espace vital qui nous convient.Koen : Personnellement, je ne le définirai pas comme une lutte permanente – je me méfie d’une lutte en permanence -, mais je comprends que c’est parfois une lutte. De cette façon, je soutiens la lutte pour le droit au logement et contre la pauvreté, revendiquée au 123 par exemple, mais cette manière d’habiter est pour moi surtout une mise en question de la façon de vivre activement ma relation avec mon environnement (bâti, humain…), la recherche d’une sensation d’abondance, la solidarité, le développement de mon statut social dans le système belge, la notion de la propriété, le développement de l’immobilier… bref, la pratique architecturale. C’est cette même motivation qui m’a mené à m’engager dans la lutte contre la loi anti-squat, récemment mise en action en Belgique.Khrystyna : Est-ce que votre projet est situé en opposition des actions de l’Etat, en alternative ou en complémentarité? Est-ce que vous sentez un conflit entre votre vision et celle de l’Etat concernant l’aménagement de la ville?Steven : Il y a des groupes qui s’opposent à l’Etat à travers leurs discours, actions, occupations. Il font un grand travail de militantisme et c’est très bien. Personnellement je suis légèrement plus nuancé. Je suis très méfiant face au capitalisme et l’Etat est devenu un de ses outils. Mais sur le principe je trouve bien que de grands groupes de personnes parviennent à s’organiser pour vivre ensemble. C’est juste que l’Etat ne remplit pas cette fonction, ou mal. L’Etat gère des intérêts divers, dont normalement aussi celui de sa population.Bruxelles, comme d’autres villes, veut « monter en gamme », attirer des personnes avec de plus hauts revenus ou des entreprises dont ils espèrent en principe la perception d’impôts. Du coup on rase des quartiers populaires pour construire des immeubles de standing et des bureaux. A Bruxelles, on ne pourra pas aller en banlieue, il y aura pour certain un problème de langue (néerlandais) et surtout c’est encore plus cher. Donc la solution qui nous reste pour continuer à vivre c’est la résistance, mais c’est dur à organiser. Le suivisme et la soumission à l’autorité sont forts.Koen : Disons que c’est un mixte. Comme me l’a dit un autre habitant un jour, il y a des gens qui se disent que le 123 est un lieu de vie alternative, mais rien n’est moins vrai. C’est un mini-cosmos, la société comme elle est, dans toute sa complexité, mais mise en avant, en confrontation. Ce qui n’est pas toujours le cas en dehors de chez nous. Je ne crois pas que nous vivons réellement avec une vision assumée en tête, mais plutôt avec une attitude pragmatique, cherchant des solutions pour la vie quotidienne ; nous cherchons à compléter avec des alternatives s’il n’y a pas d’accès, comme par exemple la récup d’alimentation. Cependant des situations de conflit avec l’Etat deviennent très claires, comme par exemple actuellement notre composition de ménage est questionnée, ce qui a une forte influence sur la somme des allocations des habitant.e.s qui y ont le droit.Khrystyna : Où peut commencer et où doit s’arrêter le droit au logement à votre avis?Steven : Si on accepte l’idée de l’Etat, alors il paraît évident que celui ci doit veiller à ce que ses citoyens aient un logement. Ce doit être un droit fondamental. La ville de Vienne avec plus de 35% de son parc immobilier y parvient presque.Si on considère que les individus peuvent se créer, se trouver leurs solutions de logement. alors il faut les laisser faire, les aider. Et c’est à mon sens là que l’on trouvera les plus belles réalisations. L’habitat mobile, les yourtes et les occupations sont des logements ! Il n’y a pas à entraver leur développement sous prétexte qu’ils ne répondent pas aux standards imposés par les promoteurs et les bourgmestres qui délivrent – ou pas – les permis.Koen : Je ne travaille plus, j’habite !Khrystyna : Comment on compose un espace commun ? Est-ce que ça passe par la définition des règles?Steven : Un espace commun est un espace où tout le monde peut passer ou à envie d’y aller. Nous avons la chance d’avoir une seule cage d’escalier pour notre grande maison de 65 habitants. C’est un lieu où on se croise en permanence, on se voit, on sait s’y l’autre est dans le bâtiments ou s’il va bien.Notre ASBL (Association Sans But Lucratif) gère aussi un site avec des maisons. Là bas, il n’y a que la rue pour se croiser. Ce n’est pas suffisant comme espace commun. Surtout qu’à Bruxelles l’hiver est griset on ne reste pas dans la rue pour boire des cafés. Du coup, les habitants sont dans leurs maisons et il y a moins d’espaces pour favoriser l’esprit de groupe.L’architecture est donc un élément essentiel pouvant rendre possible ou pas le partage.Koen : Le fonctionnement de notre occupation est très politisé, il est mis en place pour que soit possible de prendre des décisions collectives, d’être transparent… Chez nous, nous devons confronter les conflits, ils ne passent pas sous le radar et, bien qu’il y en a qui ne veulent pas (parfois par conviction), ce fonctionnement demande de l’engagement. C’est une des beautés du lieu, mais c’est aussi très énergivore. En effet, il y a des règles qui se mettent en place de manière pragmatique et je les apprends chaque jour en faisant des trucs. Par contre ce n’est pas du tout donné de les faire respecter ou de réagir si les règles n’ont pas été suivies.Khrystyna : Votre projet c’est une revendication de valeurs communes de votre micro-société. Est-ce qu’il y a une forme d’exclusion de ceux qui ne suivent pas des règles posées comme communes / produites en commun ?Steven : Pour se faire virer du 123 il faut vraiment le chercher. La solidarité y est très forte et le compromis fait parti de la culture belge. En principe, s’il y a acte de violence, cela entraine exclusion.Ce n’est jamais plaisant. Si on ne parvient pas à virer la personne sur le champs alors il faut avoir recours à la voie judiciaire et ça prends beaucoup de temps. Les personnes qui se retrouvent expulsées sont souvent fragiles mais dans une logique mentale destructrice et nihiliste. Le groupe peut le subir physiquement et psychiquement.On héberge parfois des personnes très marginalisées. Pour certain c’est une aide inouïe et pour d’autres c’est un échec. Si un collectif super bienveillant ne parvient pas à soutenir quelqu’un, alors il faut vite que la personne trouve une autre bouée. Car rester c’est s’enfermer encore plus loin.Nous faisons collectivement ce que l’on peut pour s’entraider et aider les autres mais parfois on y arrive pas et même il arrive que l’on devienne l’objet de haine ou de paranoïa. Dans ces cas, à notre grand regret, on a recours à l’expulsion pour se protéger.Koen : Je comprends le 123 comme un lieu inclusif. Idéalement il y a de la place pour tou.t.e.s, aussi pour des gens et des comportements compris comme asociaux. Dans la vie de tous les jours par contre ce n’est pas toléré et pose problèmes. Parfois des habitant.e.s sont expulsé.e.s de la communauté à cause des problèmes qu’ils et elles causent. L’expulsion a été une de mes premières expériences qui m’a bouleversé le plus. Cependant, comme je l’ai dit juste en haut, ce n’est pas donné de faire suivre les décisions prises selon le protocol commun de la maison, et il arrive que des individus résistent, restent même dans un environnement hostile et se haïssent parfois eux-mêmes. Ils bénéficient d’un soutien d’une source inattendue : l’Etat qui protège leur domicile et empêche un collectif à se débarrasser vite fait des individus « problématiques » que l’Etat a lui-même contribué à marginaliser et exclure…Khrystyna Gorbachova
HHabiter la Ville, Habiter le Monde Le cycle 6 des Rencontres des Savoirs 2017 – 2018 s’est achevé le 3 avril dernier autour de « Le développement du numérique peut-il rendre la ville durable sociale et citoyenne ? », mais chercheurs et citoyens continuent de s’interroger ensembles sur cette thématique…Les Rencontres Scientifiques Nationales de Bron (RSNB), projet participatif par les différentes formes d’échanges entre les habitants et les chercheurs, débutent en mai toujours autour du débat « Si on parlait de la ville, durable, sociale et citoyenne… ? »Le mercredi 30 mai se dérouleront la restitution des ateliers citoyens menés tout au long de l’année avec les chercheurs et les enfants. Le jeudi 31 mai aura lieu un grand débat en présence de deux invités de renom, Bernard Blanc et Olivier Frérot, une soirée participative à laquelle le public est invité à participer, à (s’)interroger, à livrer ses points de vue !Un partenariat entre l’IFSTTAR et la Ville de Bron.Soiré du 31 mai :Intervenants : Olivier Frérot et Bernard BlancSoirée animée par : Valérie Disdier, directrice d’Archipel, Centre De Culture Urbaine.En savoir plus