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Philippe Connes, la recherche dans le sang | Visage de la science

PPhilippe Connes, la recherche dans le sang | Visage de la science

Le 29 septembre, Philippe Connes, spécialiste de la rhéologie du sang et de l’étude de la drépanocytose au Laboratoire Interuniversitaire de Biologie de la Motricité (LIBM), a été récompensé par la médaille Fahraeus1. Cette distinction honore ses recherches novatrices à la frontière entre biophysique, physiologie et médecine. Les travaux de Connes ouvrent de nouvelles perspectives thérapeutiques pour les patients atteints de drépanocytose.

À bien des égards, le sang n’est pas qu’un simple liquide. Sa fonction de transport de l’oxygène, vital au bon fonctionnement de notre organisme, repose notamment sur d’étonnantes capacités à s’écouler efficacement dans les artères, les veines et la microcirculation. Une mauvaise circulation du sang dans l’organisme est d’ailleurs source de nombreuses complications (maladies cardiovasculaires, ischémies, thrombose…). C’est pourquoi ses propriétés d’écoulements sont de plus en plus étudiées, ce qui constitue aujourd’hui un domaine de recherche à part entière, la « rhéologie du sang ».

« Historiquement, les traitements cliniques des maladies du sang ont fait abstraction de la rhéologie du sang », rappelle Philippe Connes. Issu d’un parcours en STAPS2, ce chercheur est devenu spécialiste des propriétés rhéologiques du sang et de l’étude de la drépanocytose au Laboratoire Interuniversitaire de Biologie de la Motricité (LIBM). L’objectif de ses recherches dans ce domaine : comprendre comment des variabilités de la rhéologie du sang participent à la variabilité clinique de la drépanocytose.

En effet, cette maladie génétique héréditaire qui affecte les globules rouges présente de nombreuses manifestations cliniques, avec des gravités variables. Un constat que Philippe Connes a pu observer de près, lorsqu’il était chercheur en Guadeloupe, à l’université des Antilles. À l’époque Maître de conférences des Universités, puis chercheur Inserm, il a commencé à collaborer avec des médecins du CHU pour étudier cette maladie.  « Pour lancer une étude clinique, j’ai assisté pendant un an à toutes les consultations cliniques des patients drépanocytaires pour expliquer notre projet. J’ai énormément appris au contact des patients et des médecins » se rappelle-t-il.

La drépanocytose présente des perturbations importantes de la rhéologie du sang. En particulier car la maladie affecte le globule rouge. Longtemps considéré comme un simple « sac d’hémoglobine », il joue en réalité un rôle essentiel dans les propriétés rhéologiques particulières du sang. « Contrairement à l’eau, il n’y a pas une seule viscosité du sang. Cette dernière dépend des contraintes que l’on applique au liquide. Plus elles sont fortes, plus la viscosité du sang diminue ». C’est ce que l’on appelle un fluide rhéofluidifiant. Une propriété d’autant plus importante que le sang doit circuler efficacement dans des canaux très fins pour délivrer l’oxygène aux tissus.

Les propriétés rhéofluidifiantes du sang sont notamment liées à la capacité des globules rouges à se déformer – ces derniers pouvant ainsi circuler même dans les vaisseaux les plus petits de l’organisme –, et à leur capacité à s’agréger ou se désagréger.

Or, la drépanocytose est une maladie du globule rouge ayant pour origine une mutation génétique qui affecte l’hémoglobine. Cette protéine qui transporte l’oxygène au sein du globule rouge va polymériser en condition désoxygénée chez les patients drépanocytaires, provoquant une perte de déformabilité et d’élasticité, ainsi qu’un fragilité importante.

Plus fragiles, la durée de vie des globules rouges chez ces patients est d’environ 20 jours, au lieu de 120 jours chez une personne normale. « Cette condition met le système de production des patients à rude épreuve pour essayer de compenser cette perte plus rapide des globules rouges », souligne Philippe Connes.

Cette maladie se révèle donc extrêmement complexe à étudier, nécessitant des approches pluridisciplinaires pour mieux comprendre la variabilité des manifestations cliniques observées.

Nommé Professeur des universités en 2014, et fort de son expérience de collaborations avec des CHU, Philippe Connes a contribué à structurer une communauté scientifique à Lyon dans le domaine de la rhéologie du sang et des maladies rares du globule rouge. En 2017, les Hospices Civils de Lyon ont ainsi obtenu une labélisation d’un centre de référence constitutif des maladies rares du globule rouge et de l’érythropoïèse, structuré autour de quatre acteurs. Son équipe « Biologie Vasculaire et du Globule Rouge » au LIBM (UCBL), un laboratoire de diagnostic des maladies de l’hémoglobine et du globule rouge la drépanocytose (P. Joly, Hospices Civils de Lyon), l’IHOPe et l’hôpital Mère-Enfant (Y. Bertrand/K Halfon-Domenech, Hospices Civils de Lyon) et le service de médecine interne de l’hôpital Edouard Herriot (A. Hot, Hospices Civils de Lyon).

Pour l’intéressé, cette dynamique réunissant recherche fondamentale, clinique et translationnelle est essentielle pour travailler sur ces pathologies cliniques. L’étude de la rhéologie du sang et du globule rouge permet d’amener de nouvelles perspectives pour les cliniciens. « Le taux d’hématocrite constitue un critère clinique pour évaluer la viscosité du sang. Or, quand on fait les mesures de viscosité, les deux paramètres ne sont pas systématiquement corrélés. On oublie souvent la rhéologie du sang ou la mesure directe de la viscosité du sang », abonde Philippe Connes.

Avec un parcours atypique, ses recherches en rhéologie du sang, à la frontière entre biophysique, physiologie et médecine, ont vocation à aider les cliniciens à utiliser d’autres critères et des traitements plus pertinents pour les patients drépanocytaires, espère l’intéressé. Une contribution scientifique aujourd’hui reconnue internationalement. Le 29 septembre, Philippe Connes a ainsi reçu la médaille Fahraeus décernée par la Société Européenne d’Hémorhéologie Clinique et de Microcirculation.

Le lien qu’il cultive depuis plus de 15 ans avec les médecins joue pour beaucoup dans cette réussite, reconnait le lauréat. Bien plus qu’une opportunité scientifique, pour ce chercheur le contact avec les médecins est aussi une motivation. « Au-delà du fait de mieux connaitre la maladie, le fait de voir que le médecin fait appel à la recherche et collabore avec nous, ça donne du sens à notre travail. C’est là que ça devient magique et excitant » !

Les manifestations cliniques de la drépanocytose

La drépanocytose a la particularité de se manifester différemment d’un patient à l’autre mais aussi chez le même patient en fonction des différentes périodes de la vie. Les complications de cette maladie se présentent chez les patients sous forme chronique (ulcères aux jambres, insuffisance rénale, hypertension pulmonaire, anémie, douleurs, fatigue et retard de croissance…) ou bien sous forme aigüe (priapisme, crise vaso-occlusive douleureuse,accident vasculaire cérébral).

D’après une étude de l’Inserm (2015), la drépanocytose est la maladie génétique la plus fréquente en France, avec 1 cas pour 765 naissances en région parisienne, mais la fréquence est encore plus élevée dans les départements d’Outre mer (1 cas pour 465 naissances).


1. Fahraeus : Éminent chercheur médical suédois. Il a mené des recherches pionnières sur le sang, notamment la découverte du taux de sédimentation des érythrocytes et l’utilisation de l’ultracentrifuge. Ses contributions notables incluent les effets Fåhræus et Fåhræus–Lindqvist. Professeur à l’Institut Karolinska et à l’Université d’Uppsala, membre de la Royal Swedish Academy of Sciences, il a reçu la médaille Poiseuille en 1966.

2. STPAS : Sciences et Techniques de la Prévention des Activités Sportives, est un parcourt universitaire qui focalise sur l’application des principes scientifiques pour prévenir les blessures et améliorer les performances sportives. Ces programmes forment des professionnels compétents dans la promotion de la sécurité et du bien-être des athlètes tout en optimisant leurs capacités.

>> Pour en savoir plus rendez-vous sur le site :

Université Claude Bernard Lyon 1

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CORTEX Mag