MMobillité et écologie : comment concilier les enjeux économiques et sociaux ? ©trianglePollution : limiter la mobilité est-ce une solution ? Le transport a-t-il réellement un impact sur le changement climatique ? Dans ce deuxième podcast dont le triptyque est consacré à la mobilité, pollution, et transition écologique…nous allons tenter d’éclaircir ces questions.Pour cela, nous nous entretenons avec Maxime HURE, Maître de conférences HDR en science politique à l’université de Perpignan (CDED Centre du droit économique et du développement) et chercheur associé au laboratoire Triangle. > Écoutez le podcast :https://popsciences.universite-lyon.fr/app/uploads/2025/04/tri3-2_maxime-hure.wav> Lire la retranscription des propos de l’interview :Nous avons vu précédemment que limiter la mobilité pourrait réduire les émissions de CO2, cependant, cela n’engendrerait-il pas une atteinte à la liberté de circulation ?Maxime Huré – Alors ce que l’on peut dire, c’est que cette limitation de la mobilité, ce n’est pas encore une voie choisie par les pouvoirs publics, mais on se rend compte que c’est une des possibilités offertes pour baisser les émissions de CO2 dans le secteur des transports et de la mobilité.Pourquoi ce n’est pas une voie choisie aujourd’hui par les pouvoirs publics, parce qu’il est important de noter que dès lors que ces pouvoirs publics essayent d’encadrer ou de contraindre les pratiques individuelles de mobilité, sans intégrer pleinement la dimension sociale inhérente à chaque déplacement, cela engendre des mouvements sociaux et des réactions individuelles visant à défendre effectivement un mode de vie, la liberté de circuler ou encore la liberté de choisir son mode de déplacement. On pense ici par exemple aux mobilisations des Gilets Jaunes fin 2018, début 2019.© PixabayEst-il vrai que le transport a un impact considérable sur ce changement climatique, comment expliquez-vous ce fort impact des transports en France et de ce fait quelles solutions pourrait-on envisager ?M.H. Oui tout à fait, alors sur ce point, on peut même rappeler que la grande majorité des individus vivent la mobilité comme une contrainte, et surtout ils n’ont pas forcément beaucoup de choix pour se déplacer. En France, ils le font bien souvent en automobile, même majoritairement. Dans d’autres pays, notamment ceux qui affrontent des situations de grande pauvreté, la mobilité quotidienne, elle est encore plus contraignante et se résume pour beaucoup à des déplacements à pied dans un périmètre de quelques kilomètres.Donc finalement les choix d’utiliser des modes de déplacement relativement polluants et sur de grandes distances, bien souvent pour les loisirs, reposent en réalité sur un très faible nombre d’individus à l’échelle mondiale, c’est-à-dire sur les populations les plus favorisées disposant de revenus importants. Ensuite, ce débat, il peut renvoyer à la manière de réguler et de gouverner nos sociétés. Doit-on choisir, par exemple, une régulation par le marché, c’est-à-dire par les fluctuation des cours des matières premières et de l’énergie, comme c’est un peu le cas actuellement, mais qui agissent comme une contrainte auprès des individus ? Doit-on y ajouter un amortisseur social pour les populations les plus touchées par ces variations ? Ou même doit-on davantage s’appuyer sur la régulation politique à l’échelle européenne, nationale ou locale pour encadrer les mobilités ?Donc, à travers des mécanismes d’intervention ou de non-intervention de la part des femmes et des hommes politiques, il s’agit bien de réfléchir à la manière de faire société et à la question d’un avenir commun qui permettent aux générations futures de trouver leur place.Et quel serait alors l’impact économique ou encore l’impact social ?M.H. Les discours et les représentations de la modernité dans la période de l’après-guerre et pendant les Trente Glorieuses ont assimilé finalement la notion de liberté à celle de déplacement automobile. De ce fait, une grande partie de nos activités économiques et sociales qui s’est organisée autour du système automobile, dans un pays où la production industrielle automobile relève d’une histoire assez particulière. Donc cette démocratisation de l’automobile a accompagné le progrès social, mais elle a aussi créé ce que Gabriel Dupuy appelle « la dépendance automobile », c’est-à-dire un système où les individus sont dépendants de la voiture pour accéder aux activités et aux services du quotidien.De la même manière, une partie de nos activités sociales s’est organisée autour des loisirs longue distance au tournant des années 1980-1990, en s’appuyant sur des discours positifs attribués au développement touristique international et à la mondialisation culturelle. Cette transformation a propulsé l’aviation comme un moyen de transport moderne et relativement accessible avec l’avènement des compagnies dîtes Low Cost.Donc ces évolutions ont structuré de manière décisive nos sociétés, et même l’aménagement du territoire et les modes de vie.Cependant, tout cela a un impact…qui est d’avantages de pollution…M.H. Oui, la massification de l’utilisation de l’automobile et de l’avion a généré des effets négatifs, comme l’augmentation des pollutions et des émissions de CO2, ce que les économistes nomment les « externalités négatives ».À l’échelle individuelle, nous sommes devenus des hyper-mobiles pour reprendre le terme d’Yves Crozet car nous nous déplaçons toujours plus, toujours plus loin et toujours plus vite. Cette situation pousse certains experts et chercheurs à remettre en cause aujourd’hui cette course à la vitesse. Mais limiter ou restreindre les déplacements individuels dans le cadre de notre système économique et social actuel et même au regard de notre aménagement de l’espace pourrait potentiellement être perçu comme une nouvelle contrainte forte pour de nombreux individus, de nombreux ménages. Donc il faut nous interroger sur les solutions à imaginer.Faut-il plutôt envisager des incitations à l’autolimitation ou à la sobriété pour reprendre un mot à la mode aujourd’hui ? Dans quelle mesure une relocalisation des activités à grande échelle, y compris touristiques, pourrait accompagner de nouveaux comportements de mobilité ? Quid encore des effets du télétravail et des transformations liées au numérique ? Ce que l’on peut dire c’est que ces questions stimulantes occupent une réflexion importante de nombreux chercheurs en sciences sociales aujourd’hui.Précédemment : Mobilité : ses enjeux dans la France d’aujourd’hui> À suivre…Notre troisième et dernier podcast concernant le thème de la pollution et mobilité abordera le thème de la diminution du CO2 avec les progrès technologiques, les nouveaux modèles de vie …Rendez-vous jeudi prochain !>> Pour en savoir plus :Triptyque – Laboratoire Triangle
MMobilité : ses enjeux dans la France d’aujourd’hui ©trianglePollution, mobilité, transition écologique…autant de mots qui abreuvent notre quotidien, et auquel ce triptyque est consacré. Dans ce premier podcast nous allons d’abord essayer de comprendre la mobilité en France aujourd’hui. Qui l’organise et pourquoi le transport à un réel impact sur la transition écologique ?Pour cela, nous allons nous entretenir avec Maxime HURE, Maître de conférences HDR en science politique à l’université de Perpignan (CDED Centre du droit économique et du développement) et chercheur associé au laboratoire Triangle. > Écoutez le podcast :https://popsciences.universite-lyon.fr/app/uploads/2025/04/tri3-1_maxime-hure.wav> Lire la retranscription des propos de l’interview :D’abord, pour comprendre la mobilité des personnes en France , tentons de comprendre qui, aujourd’hui l’organise ? Et selon vous, est-ce judicieux, pourquoi ?Maxime Huré – La mobilité des personnes en France est organisée par les pouvoirs publics qui financent la construction des infrastructures comme les routes, les chemins de fer, les aménagements cyclables et piétons, etc… Ces pouvoirs publics élaborent aussi les réglementations et organisent la gestion des services publics de transport, le plus souvent en partenariat avec des opérateurs privés. Alors la particularité française – mais que l’on retrouve également dans d’autres pays européens – réside dans le fait que les compétences des politiques de mobilité sont réparties entre plusieurs niveaux institutionnels : l’Union Européenne, l’État, les régions, les départements, les intercommunalités et les communes. Cette répartition des compétences en France fait suite aux réformes de décentralisation engagées dans les années 1980 et permettent aux échelons locaux d’être à l’initiative de nombreux projets et innovations et de gérer des compétences très élargies. Alors concrètement, pour vous donner un exemple, concernant la gestion des transports à Lyon : les transports collectifs urbains (TCL) sont gérés par le Sytral qui regroupe la Métropole de Lyon et d’autres partenaires, les politiques en faveur du vélo en ville ou encore certaines voiries sont gérés par la métropole de Lyon. En revanche, si vous prenez un TER (Train Express Régional), il s’agit d’une offre de transport pilotée par la région Auvergne-Rhône-Alpes, en partenariat avec SNCF, y compris pour les lignes ferroviaires qui desservent la métropole de Lyon. Cette fragmentation institutionnelle et politique constitue en soit un objet d’analyse des politiques publiques et soulève de nombreuses problématiques en fonction de chaque contexte territorial.© PixabayEst-il vrai que le transport a un impact considérable sur le changement climatique ? Comment expliquez-vous, ce fort impact des transports en France ? Et, de ce fait, quelles solutions pourrait-on envisager ?M.H. – Il est vrai que la mobilité des personnes et le transport de marchandise si on agrège les deux, représentent 32% des émissions de CO2 en France en 2022. Il s’agit du secteur qui émet le plus de CO2, devant l’agriculture, l’industrie et le bâtiment. Et ce pourcentage en plus ne tient pas compte des émissions de l’aviation, liées aux vols internationaux au départ ou à destination de la France. Donc le problème est que nous n’arrivons pas à diminuer de manière significative ces émissions de CO2 dans les transports, notamment pour atteindre les objectifs de la stratégie nationale bas carbone (SNBC) visant à réduire de 28% les gaz à effet de serre d’ici 2030.Pourquoi ?M.H. – Cette situation s’explique par de multiples raisons qui relèvent à la fois des difficultés à transformer un système de mobilité lié à notre modèle économique et qui renvoient aussi à des valeurs et des habitudes difficiles à faire évoluer. Par ailleurs, on observe un décalage entre les objectifs de l’action publique et les mesures prises pour atteindre ses objectifs.Cette situation, elle crée un décalage avec les discours vantant la mobilité durable, verte ou propre, pour faire référence à des travaux menés par mes collègues Hélène Reigner, Thierry Brénac et Frédérique Hernandez. Donc, pour le moment, ce que l’on peut dire, c’est que ni l’électrification des véhicules, ni le développement des transports collectifs, assez importants quand même, ni même les récentes politiques en faveur du vélo en ville n’ont permis de diminuer significativement les émissions de CO2 dans le secteur des transports. Et même on peut dire que ces émissions continuent à progresser, c’est là où c’est inquiétant.Alors autre chose, il ne faut pas raisonner uniquement en termes d’objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre, mais aussi poser la question sociale de la mobilité et donc celle des inégalités qui renvoit à une question politique sous-jacente. La seule baisse notable par exemple des émissions de CO2 en France lors de ces vingt dernières années, elle est intervenue en 2020, suite aux restrictions de déplacement imposées pendant la pandémie de la COVID-19.Mais cela pose de nombreuses questions : Quels sont les effets de cette période de restriction sur notre système de mobilité ? La réduction de nos déplacements est-elle la seule voie possible pour atteindre les objectifs de réduction des émissions de CO2 ? Qu’est-ce que cela impliquerait pour les populations et les différents milieux sociaux concernés ? Donc dans un monde aux ressources, même de plus en plus limitées, faut-il organiser une régulation, un rationnement des mobilités et à quelle échelle : individuelle ou à l’échelle des territoires, celle des entreprises peut-être aussi ? Cette dernière question est au cœur d’un projet de recherche que nous avons mené avec des collègues du Lab’urba et du laboratoire LVMT à Paris, en partenariat avec le Forum Vies Mobiles.> À suivre…Le deuxième podcast tentera de répondre à la question : comment concilier la dimension écologique des mobilités et leurs enjeux sociaux et économiques …Rendez-vous jeudi prochain !>> Pour en savoir plus :Triptyque – Laboratoire Triangle
LL’histoire des espèces vivantes Partager avec le grand public l’histoire des espèces vivantes, des chercheurs à l’origine du projetIl a été initié par trois chercheurs, Bastien Boussau, Sylvain Charlat et Damien de Vienne qui ont contacté le SYTRAL avec l’idée de réaliser des vidéos distrayantes et informatives sur la théorie de l’évolution. Ils font partie du Laboratoire de Biométrie et Biologie Evolutive (LBBE), un laboratoire du CNRS et de l’Université Claude Bernard Lyon 1, qui associe la biologie évolutive à l’informatique et aux mathématiques. Ils vous présentent 20 points communs entre les espèces vivantes.Le SYTRAL a rapidement accepté cette proposition originale et a pris en charge toute la réalisation visuelle des vidéos, les chercheurs se focalisant sur la sélection d’exemples intéressants et sur l’exactitude des informations transmises.Ce projet est à découvrir sur le site pointscommuns.fr et en vidéos dès le mois de juin 2018 dans les Transports en Commun Lyonnais (réseau i-TCL).Pour lire la totalité de l’article, rendez-vous sur le site Université Claude Bernard Lyon 1