PParlez-nous de… féminismes polonais À l’occasion de la parution de l’anthologie Devenir-sœur. Repères dans un siècle de féminismes polonais (Paris, Michalon, 2024), Mateusz Chmurski et Hélène Martinelli évoqueront la genèse de l’ouvrage, les enjeux de sélection et de traduction des textes, pour mettre en évidence la nécessité de raconter les différentes histoires des féminismes nationaux et régionaux. S’il s’agit de s’intéresser à une histoire d’anthologie en particulier, d’autres initiatives comparables peuvent être convoquées – tels le récent film d’Ada Grudzinski, Pologne : Les Femmes, le pape et le parti (2024) ou le nouveau volume consacré aux féminismes en Europe centrale et orientale : Texts and Contexts from the History of Feminism and Women’s Rights. East Central Europe, Second Half of the Twentieth Century, Budapest-Vienne-New York, CEU Press, 2024. La discussion, modérée par Marie Fabre, n’entend toutefois pas se limiter au cas polonais ou centre-européen, mais permettre au contraire de s’interroger sur les dynamiques à l’œuvre dans les féminismes et les histoires nationales et internationales du féminisme aujourd’hui. En savoir plus ici
LLyon en révolte(s) | Les Nocturnes de l’Histoire Les Nocturnes de l’Histoire : Lyon en révolte(s) – S’opposer et contester entre Saône et Rhône de la Grande Rebeyne à mai 68La Grande Rebeyne de 1529 aussi bien que les révoltes des Canuts des années 1830 ou le siège de 1793 appartiennent aux lieux de mémoire de la ville et s’inscrivent dans les récits autant que dans la topographie urbaine comme un véritable patrimoine lyonnais.Dans le cadre des Nocturnes de l’Histoire, cette manifestation propose une réflexion sur les crises et révoltes dont Lyon a été le théâtre de la fin du Moyen Âge à nos jours. Que ce soit pour des motifs socio-économiques, religieux, politiques ou plus simplement pour survivre en période de crise de subsistance, la société lyonnaise a été coutumière de ces « émotions » collectives qui participent à forger son identité et à son histoire.Il sera question ici de privilégier quelques études de cas pour permettre de comprendre les motivations, mais aussi les formes de la révolte, les discours qu’elles ont générés et la mémoire qui les accompagne encore de nos jours.Intervenants : Fabien Salesse , professeur agrégé d’histoire-géographie à Lyon ; enseigne en préparation aux concours des Instituts d’études politiques. Ses travaux de recherche portent sur les guerres de Religion en France au XVIe siècle, notamment en Auvergne.Pierre-Jean Souriac, maître de conférences en histoire moderne – Faculté des Humanités, Lettres et Sociétés Université Jean Moulin Lyon 3.Pour en savoir plus :Bibliothèque Diderot
DDe Vive Voix #23. Cristian Fulas L’Europe : le centre et ses margesNourri par l’espace culturel français et européen, l’écrivain roumain au style proustien Cristian Fulaş crée, dans le roman Iochka, un personnage hors normes qui traverse le temps sous différents régimes de pouvoir, de la Seconde Guerre mondiale à nos jours. Les gens simples et anonymes comme ce personnage de maréchal-ferrant qui donne le titre au livre, ne sont que « des chiffres dans l’engrenage du monde, des êtres sans visage et sans gloire ». L’isolement spatial de la montagne les place dans une marge géographique, à la limite de Braşov, dans les Carpates roumaines, là où l’âpreté de la vie est contrebalancée par l’amitié et l’amour qui donnent sens et unité à une communauté qui sait encore respecter les coutumes ancestrales.La dichotomie centre-marge se poursuit dans La Pire Espèce, où le narrateur imagine, dans une prose au rythme intense, une journée dense à l’intérieur du cercle du pouvoir même. Dans un monde hyperconnecté où l’accumulation et la domination sont les objectifs premiers de différentes strates de la société, les gens ne sont que des chiffres pouvant être utilisés à des fins personnelles.L’énorme travail de traduction de Florica et Jean-Louis Courriol permet de transmettre aux lecteurs l’authenticité du message et de l’image du monde que l’auteur a essayé de nous faire parvenir, avec sa diversité, dans une Europe à plusieurs vitesses. Finalement, la littérature lit la vie, comme un « miroir du monde ». Avec la présence deJuliane Rouassi, Docteure en Littérature comparée, chercheuse associée EHIC – UR 13334Florica Courriol et Jean-Louis Courriol, traducteurs du roman. En partenariat avec :PartenairesConsulat général de Roumanie à LyonInstitut culturel roumainEn savoir plus ici
DDe Vive Voix #22 | Rita Carelli Il s’agit de la touchante histoire d’Ana, une petite fille qui doit habiter avec son père archéologue, en pleine forêt, dans un village indigène après la mort soudaine de sa mère. Entre les souvenirs de son existence antérieure et des passages de sa vie adulte à Paris où elle fait ses études, Ana doit apprendre à maîtriser le nouveau quotidien chez les autochtones dont la cosmogonie et les coutumes la fascinent.Une rencontre avec Rita Carelli, actrice, réalisatrice et écrivaine brésilienne. Elle est notamment connue pour être la plume du penseur et dirigeant autochtone Ailton Krenak ainsi que pour ces livres pour enfants et pour son roman Terre Noire, publié en français en 2024 chez les Éditions Métailié.Intervenants :Bruno Anselmi Matangrano, Maître de Langue de Portugais, ENS de Lyon ; Docteur ès Lettres, Université de Sao Paulo ;Mélusine O’Connor, étudiante de Master 2 en Études Hispaniques, ENS de Lyon.Pour en savoir plus :Bibliothèque Diderot
PParlez-nous de… Gadda et Mussolini S’inscrivant dans le sillon du plus célèbre pamphlet Eros et priape, Les Mythes du Baudet, inédits en français, en constituent en quelque sorte le laboratoire à la fois linguistique et psychanalytique ; un libelle dans lequel éclate la prodigieuse fureur gaddienne contre le mythe factice du fascisme et de son baudet de représentant : Mussolini.Une traduction inédite en français : I miti del somaro en édition bilingue annotée et commentée.Intervenants : Jean-François Lattarico, professeur des universités en études italiennes, Université Jean Moulin Lyon 3, membre du laboratoire IHRIM UMR 5317.Animé par : Stéphanie Lanfranchi, maîtresse de conférences en études italiennes, ENS de Lyon, membre du laboratoire Triangle UMR 5206. Pour en savoir plus :Bibliothèque Diderot
PPasseuses de mémoires : littératures et mémoires (post-)communistes des femmes dans les Balkans La Bibliothèque Diderot de Lyon accueillera le séminaire inter-laboratoires 2024-2025 : L’espace littéraire de Berlin à Vladivostok, pour la troisième séanceRéunissant les chercheurs des universités lyonnaises et grenobloises qui consacrent leurs travaux aux littératures d’Europe centrale et orientale, et de Russie.>> Programme(Dé)confiscation de mémoire ? Les écrits de femmes des camps communistes en YougoslavieLa conférence se propose d’étudier les témoignages littéraires des femmes ayant été détenues dans les camps communistes en Yougoslavie. En examinant l’étiologie, les mécanismes et les étapes de la confiscation de la mémoire carcérale des femmes yougoslaves, nous analyserons comment l’écriture s’est transformée en un moyen de récupérer cette mémoire, et comment les textes sont devenus des lieux privilégiés de sa préservation. Pour mieux appréhender ce paysage littéraire ambigu, nous soulèverons la question de l’impact de la censure et de l’autocensure dans le processus de l’étouffement des voix des femmes. En outre, dans ce contexte spécifique, l’écriture ne se limite pas à être une réponse à la carence de la trace écrite, mais elle représente également un impératif face à l’absence totale de traces matérielles des camps féminins. Ainsi, en plus de les qualifier de « passeuses de mémoire », nous accorderons à ces femmes le statut de « déconfiscatrices ».> Intervention de Andjela Radonjic, doctorante en études slaves (Eur’ORBEM – Sorbonne Université)Pour une approche féministe de la (post)mémoire. Grand-mères et petites-filles dans les œuvres d’Anilda Ibrahimi, Marica Bodrožić et Melinda Nadj AbonjiDans son ouvrage, The Generation of Postmemory, Marianne Hirsch (Marianne Hirsch, The Generation of Postmemory: Writing and Visual Vulture After the Holocaust, New York, Columbia University Press, 2012, p. 98) invite à penser la postmémoire « en féministe » : pour ce faire, elle invite à considérer avec plus d’attention la place de la fille (au sens de daughter) dans les modalités de fabrication et de transmission de la mémoire familiale. Dans cette communication, je propose de mettre au travail la proposition de Hirsch en analysant les relations entre grand-mères et petites-filles dans les œuvres de trois autrices contemporaines des migrations balkaniques : Anilda Ibrahimi, Melinda Nadj Abonji et Marica Bodrožić. Je m’intéresserai particulièrement aux modalités de transmission mémorielle que les grand-mères incarnent, et dont les autrices se font le relais par et dans l’écriture. Je me pencherai d’abord sur le travail de mise en récit des traumatismes familiaux et collectifs, que j’analyserai à la lumière des théories féministes du care ; puis je m’intéresserai aux liens qui se tissent entre les mort-es et les vivant-es à travers une analyse de la figure traditionnelle de la pleureuse ainsi qu’aux transformations littéraires dont elle est l’objet.> Intervention de Lola Sinoimeri, doctorante en littérature comparée (LEGS – Paris 8 Vincennes-Saint Denis ; Eur’ORBEM – Sorbonne Université)>> Pour en savoir plus, rendez-vous sur le site : Bibliothèque Diderot
VVers une science sociale du vivant ? | Sciences en résonance Vers une science sociale du vivant (Éditions La Découverte, 2025), dernier ouvrage de Bernard Lahire, est l’occasion de faire dialoguer à la bibliothèque du site Monod, Sciences humaines et Biosciences, en présence de Bernard Lahire et de François-Xavier Dechaume-Moncharmont, écologiste du comportement animal.Dans cet ouvrage et le précédent, Les structures fondamentales des sociétés humaines, (Éditions La Découverte, 2023), Bernard Lahire pointe la difficulté qu’ont les Sciences humaines à se mettre d’accord sur un cadre commun et à formuler des lois ou à mettre en évidence des invariants permettant d’étudier les sociétés humaines les plus diverses, contrairement aux Sciences de la vie ou de la matière. Il s’appuie sur la comparaison entre sociétés humaines et sociétés non humaines et montre comment des propriétés générales du vivant se déclinent dans le cas de l’espèce humaine, en tant qu’espèce sociale.Intervenants :Bernard Lahire, sociologue, directeur de recherche CNRS au Centre Max Weber ;François-Xavier Dechaume-Moncharmont, écologiste du comportement animal, professeur des universités au Laboratoire d’Écologie des Hydrosystèmes Naturels et Anthropisés – LEHNA, Université Claude-Bernard Lyon 1.Rencontre organisée : dans le cadre du cycle Sciences en résonanceAnimée par : Pablo Jensen, directeur de recherche CNRS au Laboratoire de Physique et l’Institut rhônalpin des systèmes complexes – IXXI – et vulgarisateur.> Pour en savoir plus : Sciences en résonance
ŒŒuvres théâtrales de Marina Tsvetaeva : mythes européens et questions de la traduction La Bibliothèque Diderot de Lyon accueillera le séminaire inter-laboratoires 2024-2025 : L’espace littéraire de Berlin à Vladivostok – Séance 2>> ProgrammeLe Phénix ou La fin de Casanova : œuvre palimpseste ou Casanova était-il une femme ?Dans son article « Tvetaeva : le cycle dramatique de Casanova » Hélène Henry apporte un éclairage précieux sur les deux pièces écrites par Marina Tsvetaeva en 1918-1919 à Moscou, Une Aventure (Prikliučenie) et Le Phénix (Feniks). Il s’agira de prolonger l’analyse d’Hélène Henry en s’appuyant sur les travaux d’autres chercheurs, comme Véronique Lossky, sur Les Carnets de Tsvetaeva, sur sa Correspondance avec Boris Pasternak pour tenter de comprendre ces textes palimpsestes dans lesquels « l’androgynie des personnages est manifeste » et où la multiplicité des hypostases interroge sur la notion d’Amour chez Tsvetaeva, car pour elle l’Amour est une notion. La figure de Casanova à laquelle s’identifie Tsvetaeva est-elle celle d’un Homo eroticus (pour reprendre le titre de l’ouvrage de Claude Elsen), ou bien d’une femme pour laquelle l’amour est une forme idéalisée de l’érotisme et de l’esprit, d’un désir fixé non pas sur une femme ou sur un homme, mais sur la femme ou sur l’homme. Le désir sans illusion d’un Homo eroticus guidé par « le démon de la lucidité », esclave néanmoins de l’instant, de la diversité et du semper infidelis.> Intervention de Gayaneh ArmaganianAriane ou l’immortel féminin de Marina Tsvetaeva. Réécriture d’un mytheAriane (Ариадна) est le premier volet d’une trilogie inachevée de Marina Tsvetaeva, intitulée La colère d’Aphrodite (Гнев Афродиты). La pièce de théâtre, conçue en 1923-1924 et publiée à Paris en 1927, est une réécriture du mythe antique et une actualisation de ses symboles. La présente étude analyse l’interprétation qu’en fait Tsvetaeva. Le centre de gravité se déplace de Thésée vers Ariane pour mettre en lumière un archétype de la femme. Les instincts archaïques du masculin et la force obscure du refoulé, incarnés par le Minotaure, sont domptés par la puissance de l’amour. Le labyrinthe est une construction architecturale très élaborée qui reflète la complexité de l’œuvre. La forme du long poème permet de déployer les ramifications de la légende, elle est étayée par une structure visuelle et une instrumentation sonore, dynamisées par la langue. Le fil d’Ariane pourrait être une métaphore de la culture dans l’espace russe et européen : signe de continuité et d’enchevêtrement, il évoque la libre circulation d’un imaginaire féminin et amoureux.> Intervention de Caroline BérengerRendre à la poésie traduite le rang d’une œuvre d’art. Traduire Ariane de TsvetaevaFaut-il traduire les vers en vers ? – telle est la question à laquelle sera consacrée la communication de Florian Voutev. Après une brève rétrospective sur les deux tendances opposées dans la traduction de textes versifiés, il prendra position dans cette polémique littéraire, en tant que traducteur de poésie russe. Il argumentera en insistant sur l’importance de la reconstitution des schémas métriques et rimiques de l’original. Ses considérations théoriques seront étayées d’exemples de sa traduction de la pièce de théâtre Ariane de Marina Tsvetaeva, publiée par Vibration Éditions en 2024.> Intervention de Florian Voutev>> Pour en savoir plus, rendez-vous sur le site : Bibliothèque Diderot de Lyon
NNuits de la lecture 2025 : Dan Bozhlani La Bibliothèque Diderot de Lyon vous invite à veiller lors de cette soirée des Nuits de la lecture avec Dan Bozhlani. Cette soirée a pour but de présenter le premier roman en français de l’écrivain albanais du Kosovo. Le français étant une langue chère à son cœur. Cela marque une étape importante dans son parcours littéraire, car c’est la deuxième fois qu’il publie dans une langue qui n’est pas la sienne.Plus encore, l’organisation d’un tel événement à la Bibliothèque Diderot de Lyon revêt une importance symbolique particulière pour Dan Bozhlani, puisqu’il a rédigé son livre dans les salles de travail de cette bibliothèque.Le roman met en scène un écrivain raté, en proie à un voyage introspectif, hanté par l’ombre de ses livres inachevés. Ce moment sera l’occasion d’échanger sur les apports littéraires et philosophiques de l’œuvre, notamment en explorant l’importance de la littérature et la quête d’identité. L’auteur, présent à cette rencontre, interagira avec le public. Les lecteurs présents proposeront également une analyse du roman.La soirée se poursuivra avec des prestations artistiques et musicales>> Pour en savoir plus:Bibliothèque Diderot de Lyon
FFranz Kafka, un écrivain allemand entre tradition juive et modernité pragoise La Bibliothèque Diderot de Lyon et l’Université Grenoble Alpes ouvre le bal de leur séminaire inter-laboratoires 2024-2025 L’espace littéraire de Berlin à Vladivostok avec la première séance du programme!;Pour avoir toute la programmation 2024-2025 du séminaire : ici > Le Programme de la journée : « Was habe ich mit Juden gemeinsam ? » Franz Kafka, écrivain de la tradition juive interrompue. Marie-Odile Thirouin.L’essai de Philippe Zard sur les judaïsmes apocryphes (De Shylock à Cinoc, Classiques Garnier, 2017) éclaire d’un jour nouveau la vocation de Kafka à la grande littérature, dans la situation historique qui était la sienne – celle d’un écrivain juif issu de la bourgeoisie germanophone pragoise, dans un contexte bilingue et binational largement sécularisé. Ce contexte a disparu au fil des catastrophes du XXe siècle, vite remplacé par divers contextes imaginaires plaqués sur l’œuvre de Kafka par une critique parfois peu scrupuleuse. Outre le vide laissé par la disparition violente du monde juif des pays tchèques, le caractère fragmentaire de l’œuvre de Kafka a favorisé ce type d’interprétations hasardeuses. Or depuis les années 1990, l’accès aux archives tchèques et la refonte éditoriale complète de l’œuvre de Kafka en ont profondément renouvelé l’approche critique, comme en témoigne l’ouvrage de Philippe Zard. Ce renouvellement ne consiste pas à expliquer l’œuvre par la biographie de l’auteur, ni à la réduire à sa dimension juive. Il permet, d’une part, de se débarrasser des contextes inventés et, d’autre part, de remettre à leur juste place les interrogations de Kafka quant à son identité juive brouillée, interrogations qui ont pris de l’ampleur avec le temps. Des exemples concrets, tirés des romans et nouvelles comme du Journal de Kafka, donneront une idée de la manière dont cet héritage juif morcelé informe discrètement l’œuvre de l’écrivain.« Der Klang meines Deutsch » : l’écriture post-monolingue chez Franz Kafka. Myriam Geiser.Franz Kafka grandit à Prague, ville appartenant jusqu’en 1918 à la Monarchie autrichienne des Habsbourg. En tant que juif germanophone, il parle le « Prager-Deutsch », l’allemand de Prague, c’est-à-dire un allemand aux contours perméables, sujet à des influences linguistiques diverses. Comme l’a montré Marek Nekula dans une étude minutieuse des « langues de Kafka » (Franz Kafkas Sprachen – « in einem Stockwerk des innern babylonischen Turms », 2003), les interférences perceptibles dans ses écrits relèvent autant du contexte plurilingue immédiat dans lequel l’auteur évolue que de ses propres stratégies poétiques et stylistiques (« Selbststilisierung »). Son rapport à la langue allemande (qu’il qualifie de ‘langue maternelle’) est complexe et doit être interrogée en lien avec son ethos d’écrivain juif. En atteste une réflexion sur « l’impossibilité d’écrire en allemand, l’impossibilité d’écrire autrement, l’impossibilité d’écrire, l’impossibilité de ne pas écrire », formulée dans une lettre à son ami Max Brod datant de 1921. Pour Yasemin Yildiz (Beyond The Mother Tongue, 2012), ce dilemme est relié à une crise moderne plus généralisée du « paradigme du monolinguisme » (postulant l’idée d’une corrélation étroite entre origine, langue et identité). Selon elle, l’écriture littéraire de Franz Kafka – d’expression exclusivement germanophone – relève d’une « condition post-monolingue » basée sur la coexistence de plusieurs langues et l’abandon du concept de l’identité monolingue. Face aux multiples interrogations quant à son appartenance aux univers juif, tchèque, allemand, Kafka définit sa « germanité » propre (Maïa Hruska), et revendique par là sa place légitime dans le monde littéraire allemand. Ma contribution souhaite mettre en lumière la façon dont cette conscience post-monolingue introduit une prise de distance et une réflexivité permanente dans le processus même d’écriture. La position décentrée de son œuvre fait de Kafka l’un des parrains d’une littérature germanophone transculturelle, comme l’affirme par exemple Narvid Kermani, né en 1967 en Allemagne de parents iraniens : « il n’y a pas de plus grande responsabilité pour moi que d’appartenir à la même littérature que le juif pragois Franz Kafka » (Zwischen Koran und Kafka : West-östliche Erkundungen, 2014).>> Les intervenantes : Myriam Geiser, maîtresse de conférences en études germaniques à l’université Grenoble Alpes (ILCEA4)Marie-Odile Thirouin, maître de conférences honoraire en littérature comparée à l’université Lumière Lyon 2 >> Pour en savoir plus, rendez-vous sur le site : Bibliothèque Diderot