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Cinq compétences fondamentales de leadership pour donner envie d’agir

CCinq compétences fondamentales de leadership pour donner envie d’agir

Le leadership ne se décrète pas, aussi crucial soit-il. Cinq compétences permettent à un manager de mobiliser les membres de ses équipes au service de clients toujours plus exigeants.

Le travail des managers de nos jours consiste à résoudre une équation délicate. Les enjeux sont aigus et nouveaux. Par exemple, le niveau de qualité de service demandé par le client continue à augmenter dans un environnement concurrentiel intense où les transformations technologiques s’accélèrent. En outre, les managers doivent tenir compte du fait que les salariés manquent d’une motivation suffisante pour y répondre pleinement : la plupart des enquêtes montrent, et en particulier en France, de faibles niveaux en termes de participation, de confiance, de satisfaction et de volonté de s’engager).

C’est ce qui amène de nombreuses entreprises à demander aux managers de faire en sorte que leurs collaborateurs coopèrent mieux. Or comme l’a montré Barnard dès 1938, le leadership du manager joue un rôle clé pour motiver les collaborateurs à coopérer. De quelles nouvelles compétences de leadership les managers ont-ils besoin dans ce contexte ? Comment peuvent-ils les acquérir ?

Nous avons mis en évidence cinq compétences essentielles pour que les managers donnent envie aux collaborateurs de donner le meilleur d’eux-mêmes et d’agir au service de buts communs. Chacune est fondée sur un courant spécifique de la recherche et de la pratique managériale.

La psychologie positive au service du leadership

Deux compétences sont issues des recherches en psychologie positive appliquées au leadership. Elles permettent de créer le contexte dans lequel les collaborateurs vont agir. La première consiste à poser les fondements de la coopération. Elle se décline en plusieurs pratiques, d’abord la mise en place d’une relation de confiance qui répond aux besoins primordiaux d’appartenance des salariés. Cela se fait par exemple en soignant l’accueil et l’inclusion des nouveaux recrutés afin qu’ils se sentent membres à part entière d’un collectif de travail. Une autre pratique déterminante consiste à partager régulièrement les buts communs et à clarifier leur adéquation avec les buts de chacun, ce qu’on appelle aussi « la vision », dont on a montré qu’elle était le moyen le plus efficace d’unir un groupe d’êtres humains.

Sur ces bases, une seconde compétence de leadership amène à construire un environnement favorable à l’action, en particulier en développant l’optimisme des personnes par l’utilisation des mécanismes découverts dans les expériences sur la puissance et l’impuissance acquise. Il s’agit de mettre en évidence le plus systématiquement possible les liens de cause à effet entre une action d’un collaborateur et ses conséquences. Après une réussite, il ne s’agit pas seulement de la célébrer, mais aussi de partager en profondeur avec toute l’équipe un retour d’expérience sur l’ensemble des comportements qui ont permis le succès, de façon à pouvoir les reproduire.

L’art du silence

Les deux compétences suivantes s’inspirent des travaux en psychologie sociale sur « l’empowerment » et la prise de décision collective ainsi que des pratiques de coaching de personnes et d’équipes. Une troisième compétence fondamentale de leadership fondamentale consiste à accompagner un collaborateur afin qu’il construise une décision et élabore un plan d’action de façon autonome et responsable dans sa zone de délégation face à des difficultés nouvelles pour lesquelles il n’y a pas de réponse standard. Cela implique de la part du manager d’utiliser des méthodes comme le modèle GROW et de faire appel à des pratiques dont l’importance est encore fortement sous-estimée en leadership : l’art du silence ou des questions puissantes qui ne visent pas la compréhension de ce que fait l’autre mais sa mise en action, comme lorsque l’on demande « comment vas-tu t’y prendre ? » plutôt que « peux-tu m’expliquer pourquoi tu as fait ça ? »

La quatrième compétence permet d’organiser et d’animer la prise de décision en équipe en donnant voix au chapitre à l’ensemble des parties prenantes, ce qui présente le grand avantage de limiter l’effet de conformité qu’on appelle la « pensée de groupe » (mieux connu sous le nom de « groupthink »). Cela passe par la capacité à bien intégrer au processus de décision une solide phase de divergence qui se nourrit de nombreux avis, même et surtout minoritaires, avant de converger vers une décision commune et de l’appliquer.

L’envie de coopérer même dans l’adversité

La dernière compétence a sa source dans les recherches en comportement organisationnel, en communication et en négociation. Grâce à elle, on donne envie aux collaborateurs de continuer à coopérer même dans l’adversité. Elle se décline en plusieurs pratiques. Par exemple il convient de savoir annoncer de mauvaises nouvelles de façon empathique et juste. Recevoir une information de façon sincère, dans les temps, en étant soutenu est en effet souvent au moins aussi important que son contenu. La pratique consistant à donner un feedback négatif de façon assertive et constructive est également utile en cela qu’elle peut, quand le retour est fondé, transformer la résistance en acceptation. Enfin on amène ses collaborateurs à savoir négocier de manière intégrative quand ils sont en désaccord en leur apprenant à se centrer sur les intérêts compatibles de chacun, qui sont sous-jacents, plutôt que sur des positions de surface inflexibles.

TedX.

Ces cinq compétences et l’ensemble de leurs pratiques associées permettent aux managers d’activer le pouvoir d’agir de leurs collaborateurs en incarnant un leadership ouvert, délégatif, responsabilisant, et facteur d’efficacité et d’épanouissement dans la réalisation des missions. Ces compétences et ces pratiques ont fait l’objet d’accompagnements et de formations de plusieurs milliers de managers dans les différents programmes de formation continue et de transformation managériale ainsi qu’en master et en Executive MBA par les auteurs au cours des dix dernières années. Des mesures d’impact, qui ont été présentées dans un autre livre, ont montré que lorsque les managers intégraient ces compétences et mettaient en œuvre les pratiques qui leur sont associées, les conséquences pour eux-mêmes ainsi que pour leurs collaborateurs et leurs entreprises étaient favorables en termes d’efficacité de l’action et de satisfaction des personnes.

Une expérience à vivre

La question du « comment » doit être également abordée. Selon Goldsmith, anciennement chercheur en leadership et aujourd’hui coach de dirigeants et essayiste célèbre, le plus grand défi pour les managers en termes de leadership n’est pas de comprendre leur pratique mais bien de pratiquer leur compréhension.

Le leadership est d’abord un art, une expérience à vivre. Il ne peut être acquis que par une mise en œuvre accompagnée qui se fait pas à pas, avec des allers et retours constants entre compréhension, essais sur le terrain, erreurs, émotions, partages avec des pairs, réflexion, écriture de l’expérience et retour à la pratique. C’est la raison pour laquelle sont présentés dans le livre « Leadership experience », en plus des théories qui fondent chaque pratique, un mode d’emploi, des conseils concrets et des témoignages pour tester celle-ci dans un objectif d’apprentissage et de progrès constant.The Conversation

 

> Les auteurs : Thierry Nadisic, Professeur en Comportement Organisationnel, EM Lyon Business School,

Thomas Misslin, Doctorant, Sciences de Gestion, Dauphine-PSL – Chef de projet, Executive Education, EM Lyon Business School

Cet article est republié sous licence Creative Commons.

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The Conversation

Les « mines urbaines », ou les ressources minières insoupçonnées de nos déchets électroniques | The Conversation

LLes « mines urbaines », ou les ressources minières insoupçonnées de nos déchets électroniques | The Conversation

Et si, plutôt que de développer de nouvelles infrastructures minières, on valorisait les gisements de métaux contenus dans les objets électroniques que nous n’utilisons plus (ordinateurs, smartphones, etc.) ? Il existe de très bonnes raisons de s’intéresser au potentiel de ces « mines urbaines », ou mines secondaires, par opposition aux mines « primaires » où l’on exploite directement les ressources du sol.

Celles-ci permettraient même de faire d’une pierre trois coups, en réduisant la quantité de déchets électroniques, en réduisant l’empreinte énergétique et les dégradations environnementales causées par l’industrie minière, et en préservant des ressources critiques stratégiques pour le continent européen. Mais aujourd’hui, ce potentiel reste encore largement sous-exploité.

Un enjeu stratégique pour l’Union européenne

Valoriser les déchets électroniques est intéressant, car cela permet de réduire, mécaniquement, leur quantité. Ils constituent aujourd’hui l’un des flux de déchets à la croissance la plus rapide, dégradent les écosystèmes et représentent un enjeu majeur de santé publique.

L’exploitation de ces ressources secondaires permet aussi de diminuer la pression sur les ressources primaires du fait de l’exploitation minière – et donc de réduire son impact environnemental élevé. En effet, le recyclage de certains métaux est moins énergivore que leur extraction minière. C’est le cas de l’aluminium : sa production par recyclage nécessite dix à quinze fois moins d’énergie que sa production primaire.

D’autant plus que plusieurs des métaux valorisés font partie de ressources critiques au niveau de l’Union européenne. Elles sont essentielles à l’industrie, en particulier dans un contexte de transition énergétique, et présentent un fort risque de tensions d’approvisionnement. À ce titre, l’Union européenne publie et met à jour régulièrement depuis 2011 la liste des métaux critiques qui devraient constituer des priorités de valorisation pour les mines urbaines.

La cinquième liste, publiée en 2023, identifiait 34 métaux critiques, dont les terres rares, le lithium, le cuivre ou le nickel. Malheureusement, on ne peut que constater le fossé entre les recommandations de l’Union européenne et les pratiques de valorisation des mines urbaines.

Un cycle de vie truffé d’obstacles au recyclage

En cause, des obstacles techniques, organisationnels, réglementaires et économiques à chaque étape du cycle de vie d’un objet, qui limitent son potentiel de valorisation. Dès la conception des objets, on peut identifier certaines pratiques qui limitent la recyclabilité des métaux, comme le recours aux alliages, ou encore l’hybridation des matières, notamment utilisée pour l’emballage de liquides alimentaires. La plupart des briques de ce type sont ainsi constituées de carton et de PolyAl, un mélange de polyéthylène (un type de plastique) et d’aluminium.

Or, pendant longtemps, on a récupéré et recyclé le carton des briques alimentaires, mais pas le PolyAl, produisant ainsi une situation de recyclage incomplet. Dans ce cas précis, les entreprises Tetra Pak et Recon Polymers ont fini par mettre au point un procédé de séparation, et ouvrir une usine de recyclage spécifique pour le PolyAl en 2021. Mais un grand nombre d’autres produits continuent à être difficiles à recycler, précisément parce que cet aspect n’a pas été pris en compte au moment de leur conception.

Les usages dispersifs, qui consistent à utiliser de petites quantités de métaux dans des produits pour en modifier les propriétés, sont une autre pratique qui pose problème pour le recyclage : des nanoparticules d’argent sont par exemple intégrées dans les chaussettes pour empêcher les mauvaises odeurs. Ou encore, quelques grammes de dysprosium, une terre rare, sont parfois utilisés pour booster les capacités magnétiques des aimants. Autant d’usages des métaux qui confisquent à jamais leur circularité.

Hibernation électronique dans les greniers

Une fois l’objet conçu et utilisé, le deuxième frein vient du consommateur, qui a tendance à stocker ses objets électroniques, qu’ils fonctionnent ou non, plutôt qu’à les déposer dans une filière spécifique pour qu’ils soient recyclés. Le phénomène est tel qu’on parle d’hibernation électronique. En 2009 déjà, une étude pionnière estimait qu’en moyenne, les foyers américains abritaient 6,5 objets électroniques en hibernation dans leur grenier, et ce chiffre n’a fait qu’augmenter de façon exponentielle au fil des années.

En 2021, une étude menée par Google identifiait sept obstacles principaux au recyclage des appareils électroniques par les consommateurs : le manque de sensibilisation aux options de recyclage existantes, les attentes d’une compensation financière ou sociale, la nostalgie, la volonté d’avoir un terminal de rechange en réserve, la volonté de récupérer des données sur le terminal, ou encore de supprimer des données, et enfin le manque de praticité des filières de réemploi ou de recyclage.

Principaux obstacles au recyclage des déchets électroniques pour les consommateurs

Principaux obstacles au recyclage des déchets électroniques pour les consommateurs. Google, Fourni par l’auteur

Une étude plus récente menée en Suisse nuance cependant ces résultats : 40 % des répondants affirmaient être prêts à se séparer de leur vieux téléphone portable pour une compensation inférieure à cinq dollars. Il serait toutefois intéressant de mener la même enquête dans des pays moins riches que la Suisse…

Le troisième point de blocage, enfin, concerne les systèmes de collecte et les infrastructures de recyclage. En France, pour la plupart des filières de déchets spécifiques (déchets électroniques, emballages, pneus, etc.), tout est centralisé par des éco-organismes, des organismes privés qui peuvent avoir une responsabilité organisationnelle – ils organisent concrètement les opérations de recyclage – ou financière, auquel cas ils s’occupent uniquement de la gestion financière de la filière. Ces éco-organismes sont régulièrement au cœur de controverses : des analyses indiquent que la valorisation matière des flux de déchets gérés par les éco-organismes est souvent sous-optimale, notamment à cause de leurs objectifs de rentabilité.

Les principaux freins à l’exploitation des mines urbaines

Les principaux freins à l’exploitation des mines urbaines. Fourni par l’auteur

Impliquer ingénieurs, designers, politiques et consommateurs

Pour accompagner les entreprises dans une démarche d’écoconception, il existe pourtant plusieurs initiatives, dont la démarche Cradle to Cradle, « du berceau au berceau », qui invite à considérer l’ensemble du cycle de vie des objets conçus, afin notamment de permettre leur recyclabilité.

Cependant, si on adopte une focale plus large, on ne peut ramener l’engagement des industriels en faveur du recyclage à une rationalité économique étroitement conçue. Cet engagement dépend de facteurs organisationnels, sociaux, voire anthropologiques qui, s’ils ne sont pas antinomiques avec la rationalité économique, appellent à penser le problème du non-recyclage de façon plus large.

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Il existe des leviers pour développer l’exploitation des mines urbaines avec, à la clé, des avantages économiques, environnementaux et géopolitiques.

  • Du côté des ingénieurs et des concepteurs de produits, cela passe par un design plus responsable, en prenant en compte l’entièreté du cycle de vie des produits au moment même de leur conception.
  • Du côté des consommateurs, cela implique une plus grande sensibilisation à la pratique du tri des flux de déchets spécifiques, notamment électroniques.
  • Les entreprises, pour leur part, doivent raisonner sur un temps plus long et pas seulement en fonction de la rentabilité à court terme, dans un contexte de volatilité du cours des métaux.
  • Les États, enfin, gagneraient à mettre en place des réglementations adaptées à la complexité du secteur, n’excluant pas des objectifs ambitieux de taux de recyclage spécifiques par type de métal, ainsi qu’une forme de planification territoriale pour mieux coordonner les flux.

La difficulté à tendre vers l’économie circulaire

Rappelons enfin que même dans le cas idéal d’une exploitation optimale du gisement que constituent les mines urbaines, avec des taux de recyclage élevés pour tous les métaux, nous serions toujours loin d’une situation d’économie circulaire. En effet, chaque année, la demande en métaux continue d’augmenter de manière très significative.

La recyclabilité et le recyclage effectif des métaux sont donc des conditions nécessaires, mais non suffisantes à la mise en place d’une économie véritablement circulaire. En effet, seule une décroissance des flux de matière et d’énergie dans l’industrie permettrait aux mines urbaines de se substituer en partie, et non de s’ajouter, à l’exploitation des gisements primaires.The Conversation

Autrice : Fanny Verrax, professeure associée en transition écologique et entreprenariat social,

EM Lyon Business School

Cet article est republié sous licence Creative Commons.

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Agriculture : passer d’une durabilité faible à une durabilité forte | The Conversation

AAgriculture : passer d’une durabilité faible à une durabilité forte | The Conversation

À l’été 2022, les Pays-Bas ont pris une décision forte en matière d’agriculture durable. Très impopulaire auprès des agriculteurs hollandais, elle consiste à réduire drastiquement les rejets d’azote et les émissions de gaz à effet de serre issus d’exploitations agricoles à proximité de zones naturelles protégées.

Elle va se traduire concrètement par la fermeture et le démantèlement de certaines exploitations et le renoncement à des exportations sur les marchés mondiaux. Si cette décision interpelle par sa radicalité, elle nous invite plus fondamentalement à comprendre les nouveaux enjeux qui se dessinent en matière d’agriculture durable.

 

Le plan néerlandais de réduction d’azote provoque la colère des producteurs. (Euronews, 2022).

DDes conceptions très différentes du développement durable

Le « développement durable », notion devenue incontournable quand on aborde les problématiques environnementales, ne semble présenter aucune ambiguïté dans sa définition ; il s’agit, comme le propose le rapport Brundtland de 1987, de :

« Répondre aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs. »

Popularisée depuis plus de 30 ans par l’ONU, plébiscitée par les entreprises et les ONG, cette notion semble stabilisée et opératoire. Elle est en réalité très controversée et renvoie à deux paradigmes dont les ambitions conduisent à des résultats très différents : la durabilité faible et la durabilité forte.

Ces deux aspects prennent leur source dans les travaux de deux économistes : Robert Solow pour la durabilité faible ; Herman Daly pour la durabilité forte. Dans les années 1980 et 1990, ils ont porté des positions très différentes en matière de développement durable.

LLa durabilité faible

Le développement durable faible consiste à trouver des compromis jugés satisfaisants à l’instant T et qui pénalisent à minima le bien-être des générations futures. Des dégradations de l’environnement naturel sont acceptées si elles permettent de maintenir ou de développer les performances du système économique.

Dans le paradigme de la durabilité faible, le capital économique est substituable au capital naturel et le développement technique et scientifique permettra aux générations futures de réparer ou de dépasser les dégradations de l’environnement naturel réalisées par les générations antérieures.

Schématisation des approches de durabilité forte et de durabilité faible.
Vincent Hély d’après Lourdel (2005)

Cela ne veut bien évidemment pas dire que toutes les dégradations de l’environnement naturel sont permises, mais que certaines d’entre elles sont jugées acceptables, car elles soutiennent un régime de développement économique et technologique dont les générations futures pourront pleinement bénéficier.

Il est ainsi acceptable de continuer à émettre du CO2 dans l’atmosphère sur la base d’énergies fossiles, car les performances de ce système permettent d’investir dans de nouvelles technologies qui à l’avenir seront beaucoup moins problématiques et vertueuses pour l’environnement. Le développement durable faible fait un pari sur l’avenir et les capacités du génie humain à solutionner les problèmes.

LLa durabilité forte

Le développement durable fort refuse la substitution entre le capital économique et le capital naturel. Il est à cet égard inenvisageable de compenser une perte de biodiversité ou la dégradation d’un service écosystémique par un surplus de valeur économique ou un nouveau dispositif technologique. Les éléments qui constituent l’environnement naturel ne doivent pas être dégradés afin d’être transmis en l’état aux générations futures.

Il n’est bien évidemment pas interdit de dégrader certaines ressources naturelles, mais cette dégradation ne doit pas dépasser certains seuils, qui permettent à ces ressources de se régénérer ou de se reproduire. Nous léguons aux générations futures un certain état du système Terre qui leur permettra de vivre dans un environnement naturel, ainsi que des biorégions qui auront des caractéristiques biophysiques identiques ou très proches de celles connues aujourd’hui.

Dans cette perspective, l’activité économique ne disparaît bien évidemment pas, mais elle doit s’insérer dans un tissu naturel et social qu’elle ne dégrade pas, voire qu’elle régénère. Dans cette logique, il convient de limiter l’utilisation des énergies fossiles afin de limiter le réchauffement climatique à 1,5 °C degré et de ne rien lâcher sur ce seuil dont le franchissement entraînerait une transformation considérable des conditions de vie pour les générations futures.

VVous avez dit « agriculture durable » ?

Le secteur agricole est aujourd’hui rattrapé par ces deux visions incompatibles du développement durable. S’il est sensible aux enjeux de développement durable depuis au moins 20 ans, le secteur agricole français a toujours été orienté par une conception faible de la durabilité.

L’objectif a toujours été de maintenir, voire d’accroître, les performances économiques, tout en cherchant à limiter les impacts négatifs sur l’environnement naturel. Cette trajectoire en matière de durabilité conduit à des performances questionnables, car sur les 9 limites planétaires identifiées par les travaux du Stockholm Resilience Centre, l’agriculture participe directement à la dégradation de 5 d’entre elles.

L’agriculture est ainsi directement responsable du changement climatique, de la perturbation des cycles de l’azote et du phosphore, de la perturbation du cycle de l’eau, de l’érosion de la biodiversité et de l’introduction de nouvelles entités dans la biosphère.

Ces limites planétaires correspondent à des processus biophysiques dont il ne faut pas perturber le fonctionnement, sous peine de voir toute la machinerie planétaire se transformer, conduisant à une très forte dégradation des conditions d’habitabilité de la planète Terre pour l’espèce humaine.

Représentation des neuf limites planétaires (traduit de Steffen et coll., 2015)

Steffen, W.,et al. « A safe operating space for humanity ». Nature 461, pp. 472–475

(cliquer pour zoomer)

La décision radicale des Pays-Bas est emblématique de cette compréhension d’une impasse en matière de trajectoire de durabilité de l’agriculture hollandaise. Les dirigeants politiques ont entériné le fait que leur modèle agricole conduit au dépassement des limites planétaires et qu’une nouvelle trajectoire de durabilité s’impose. La décision prise en 2022 marque ainsi le passage d’une conception de la durabilité agricole de faible à forte.

Dans cette perspective, les pratiques et les ambitions en matière de durabilité agricole ne sont plus les mêmes. Il ne s’agit plus de trouver le meilleur compromis entre les enjeux économiques, sociaux et environnementaux, mais bien de s’assurer que les pratiques agricoles n’ont pas d’impacts négatifs sur les différentes composantes de l’environnement naturel : l’eau, l’air, le sol et la biodiversité.

EEn marche vers une durabilité forte

En dépit des efforts en matière de durabilité, les compromis entre les objectifs sociaux, économiques et environnementaux observables sont à l’heure actuelle en France sont très largement insuffisants.

Le secteur agricole a un impact négatif sur des processus géophysiques essentiels à la survie de l’espèce humaine et il devra inévitablement apporter des réponses pour aller vers une neutralité, voire potentiellement une régénération.

La société civile et les responsables politiques imposeront des normes dans les années qui viennent qui s’inséreront dans le paradigme de la durabilité forte. Cet objectif implique une puissance remise en question de certaines pratiques agricoles, l’acquisition de nouvelles connaissances, le développement de nouvelles technologies et, bien évidemment, un financement d’une transition.

Cette transition passera également par un renoncement et un démantèlement, comme le montre l’exemple des Pays-Bas.The Conversation

 

Auteur : Bertrand Valiorgue, Professeur de stratégie et gouvernance des entreprises, EM Lyon Business School24 février 2023

Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Retrouvez l’article oarticle original :

The conversation

 

Le parcours MACsup

LLe parcours MACsup

MACsup : un projet collaboratif entre étudiants, enseignants-chercheurs et artistes

Le projet MACsup est une expérimentation lancée en 2017 par le Musée d’art contemporain de Lyon et ses trois partenaires universitaires historiques, l’Université Claude Bernard Lyon 1, l’École Centrale de Lyon et l’École normale supérieure de Lyon, accompagnés par les Pratiques artistiques amateurs de l’ENSBA. Basé sur une envie commune d’imaginer une rencontre originale entre les processus de recherche scientifique et de création artistique, MACsup est un projet coopératif, transdisciplinaire et privilégiant une pédagogie active qui associe des étudiants, des enseignants chercheurs et des artistes.

Une dizaine de séances de travail d’octobre à mars conduisent à un weekend de restitution public au musée d’art contemporain. Les échanges sont riches, les apprentissages multiples et tous témoignent d’une expérience unique et originale. Le public est au rendez-vous, enthousiasmé par cette rencontre avec l’enseignement supérieur et la recherche dans le cadre du Musée d’art contemporain.

La saison 1 a été conduite par les artistes Félix Lachaize et Thierry Boutonnier avec les projet BAC+couches de poussière et RUBISco.
Jan Kopp et Félix Lachaize ont animé la saison 2 en concevant avec leur groupe Sur le chemin des Poudingues et le Percefac ; les étudiants et chercheurs de l’INSA ont rejoint le projet.

MACsup a démarré sa troisième saison en octobre 2019 avec 3 artistes Jan Kopp, Nicolas Daubanes et Linda Sanchez et de nouveaux partenaires qui se joignent à l’aventure : l’Université Jean Moulin Lyon 3, l’EMLyon Business school et l’association Singa Lyon (insertion des migrants).

Contact pour plus d’informations.

Ce projet est rendu possible grâce au soutien de la Région Auvergne Rhône-Alpes, de la Ville de Lyon, de la DRAC, de l’Université de Lyon (IDEX- CDproIP), du CNRS, et des établissements et laboratoires impliqués dans le projet.

Démocratie alimentaire : de l’équité dans notre assiette !

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