MMT180 | Le jeu d’échecs comme révélateur d’une époque ©Vincent NoclinConcours international francophone lancé au Québec, Ma thèse en 180 secondes propose aux doctorants de présenter, devant un jury et un auditoire profane, leur sujet de recherche en termes simples et de façon vulgarisée. Chaque année, les regroupements universitaires participants présentent, après une finale locale, deux candidats à la demi-finale nationale.Les 12 doctorantes et doctorants de la finale locale Université de Lyon du concours international Ma thèse en 180 secondes ont enchanté le public venu nombreux le jeudi 20 mars 2025, dans le Grand amphithéâtre de l’UdL.Noémie Dumont, doctorante en Langues, Littératures, Cultures et Civilisations romanes à l’Université Jean Moulin Lyon 3 (École doctorale 3LA – Lettres, Langues, Linguistique, Arts / Laboratoire IHRIM), a décroché le 2e prix du jury et donc l’accès à la sélection régionale du concours pour tenter de participer ensuite à la finale nationale.Sa recherche porte sur le jeu d’échecs dans la péninsule ibérique à la Rennaissance (1475 – 1575). Elle nous explique : « Même si l’histoire du jeu en lui-même importe, je voulais surtout étudier l’histoire de ses représentations. Un jeu plonge toujours le joueur dans un univers particulier. Pour le jeu d’échecs, c’est principalement l’amour, la guerre ou la société idéale. Ces métaphores révèlent un tas de choses sur la société et les mentalités de l’époque. »> Regarder la vidéo :>> Pour plus d’informations, rendez-vous sur le site: Université jean moulin Lyon 3
LLibrairies françaises : un rôle culturel essentiel dans une économie instable Le Festival du livre de Paris 2025 a mis en lumière les défis auxquels font face les librairies françaises. Bien que l’impact du Covid semble s’estomper, le secteur souffre d’une rentabilité faible, avec une moyenne de seulement 1 %.Cette situation est accentuée par l’augmentation des charges (loyers, salaires, transport), créant un effet ciseau qui fragilise le modèle économique des librairies. Les grandes enseignes résistent mieux, mais les petites librairies, souvent indépendantes, sont plus vulnérables. Les prévisions pour 2025 sont pessimistes, avec des baisses d’activité attendues.En parallèle, les libraires continuent de jouer un rôle essentiel dans la diversité culturelle, en sélectionnant des livres au-delà des best-sellers et en soutenant des auteurs moins médiatisés. Malgré des ventes stagnantes et des tensions économiques, leur rôle de curation reste crucial pour préserver une offre littéraire variée, avec plus de 67 000 nouveautés vendues en 2023. Toutefois, l’avenir des librairies semble incertain face à ces multiples pressions économiques et structurelles.Une analyse à découvrir dans un article écrit par David Piovesan, Maître de conférences HDR en sciences de gestion, Université Jean Moulin Lyon 3.>> Lire l’article :THE CONVERSATION
LLa Première Guerre mondiale du point de vue des chevaux Retracer l’histoire du point de vue des animaux, tâcher de trouver des sources pouvant témoigner de leur vécu et de leur évolution. Telle est l’ambition du dernier livre supervisé par Éric Baratay aux éditions Tallandier.Dans ces bonnes feuilles que nous vous proposons, cet historien se penche sur la Grande Guerre qui, sur le seul front de l’Ouest, mobilisa pas moins de huit millions de chevaux. Indispensable pour la cavalerie, l’infanterie mais également l’artillerie, pour tirer canons, munitions, vivres et hommes, ils ont façonné l’évolution de cette guerre.Saviez-vous par exemple qu’en 1914 c’est le manque de chevaux des Français comme des Allemands qui a empêché qu’un camp ou l’autre réussisse à contourner son adversaire, ce qui a provoqué la fixation du front et quatre ans de guerre de tranchées.En examinant les écrits de poilus et des vétérinaires au front, Éric Baratay tâche ici de retracer la douloureuse mobilisation de ces millions de chevaux.Lors de leur réquisition, les chevaux éprouvent d’abord un stress psychologique et physique en perdant leurs repères habituels du fait d’une succession de lieux, de mains, de voix. Leur embarquement dans les wagons est souvent difficile ; ils résistent, hennissent, se sentent poussés, frappés, se font serrer les uns contre les autres. Les plus rétifs continuent à hennir, à frapper les parois ; beaucoup sont apeurés par les trains qui passent, éprouvés par les secousses, irrités par les congénères inconnus.Ils vivent un autre bouleversement lors de leur affectation, devant s’habituer à de nouveaux noms, de nouvelles voix et conduites, de nouveaux gestes et mots en divers patois changeant au gré des réaffectations, permissions, disparitions des hommes. Ainsi, les chevaux de trait affectés à la cavalerie se retrouvent avec un soldat sur le dos, rarement plus aguerri, tout aussi craintif, et ceux qui réagissent, hennissent, ruent, subissent alors des coups, entendent des cris, ce qu’ils connaissaient assez rarement auparavant s’ils viennent des campagnes.Escorte de prisonniers allemands par la cavalerie française, le 24 août 1914. | © William Heinemann, London, CC BYDans les services attelés, les chevaux doivent apprendre à travailler avec des congénères pour les solitaires d’autrefois ou de nouveaux partenaires pour les habitués à cet emploi. Ils sont assemblés selon leur taille, leur force, voire leur couleur, rarement selon leur caractère, que les hommes ne connaissent pas et ne cherchent pas. Des chevaux manifestent des incompatibilités d’humeur, obligent ces humains à les séparer jusqu’à ce qu’une répartition soit trouvée, qu’une paix plus ou moins durable s’installe. Lors des essais à tirer ensemble, beaucoup se heurtent, glissent, tombent, s’empêtrent dans les traits, s’épuisent. L’adaptation est remise en cause par les changements d’affectation et les arrivées de nouveaux partenaires, tels ces chevaux américains, que les alliés vont chercher à partir de l’automne 1914 pour compenser les pertes.D’autant que leur traversée de l’Atlantique s’avère un calvaire côté français, où l’on ne donne qu’une avance aux marchands américains, les laissant assurer le transport à moindres frais. Dès l’Amérique, les équidés choisis se retrouvent concentrés et mélangés dans des parcs puis entassés à 15 ou 20 dans des wagons, sans attache et sans surveillance interne. Les conflits, les coups, les chutes s’ajoutent au stress du voyage durant lequel ces animaux ne bénéficient guère d’arrêts le long d’un parcours de quatre à huit jours. Au port, ils sont de nouveau concentrés en enclos puis placés sur des barges et hissés par des grues sur des navires restés au large, une opération très stressante pour les équidés.Perturbés par le déracinement, les importants changements climatiques à l’échelle américaine, le bouleversement du régime alimentaire, beaucoup s’affaiblissent et contractent des maladies infectieuses, d’autant qu’ils ne bénéficient pas de désinfection des enclos et des wagons ou de contrôles épidémiologiques, encore peu usités côté français.À bord des navires, ces équidés se retrouvent entassés les uns contre les autres, en quatre rangées parallèles par étage, attachés de près, et comme ils ne font pas d’exercice dans des enclos ou de promenade sur le pont extérieur, qu’ils restent inactifs trois semaines au minimum, ils endurent des fourbures aiguës aux jambes. L’entassement est tel que des équidés se voient placés sur le pont extérieur où, malgré les couvertures mises sur eux ou les toiles tendues par-dessus, ils endurent de fortes variations de température, une humidité incessante, des courants d’air permanents, subissent d’importants refroidissements tout en devant résister aux tempêtes qui balaient l’endroit.Au moins, ces animaux ne souffrent-ils pas de l’atmosphère confinée des étages internes, de la chaleur moite, du gaz carbonique, des fortes odeurs que les équidés enfermés produisent mais qui les indisposent vivement, d’autant que l’aération, guère pensée, est très insuffisante, que les excréments, le fumier, les aliments avariés sont irrégulièrement évacués et ces ponts mal nettoyés par des équipages négligents, peu impliqués financièrement dans le maintien en bonne santé des bêtes, bien qu’ils pâtissent aussi de la situation. Les morts sont laissés au milieu des vivants tout au long du voyage parce qu’on n’a pas prévu de les évacuer à la mer ! Les rescapés ressentent évidemment les phéromones de stress dégagés par les agonisants puis les odeurs des cadavres.Chevaux et mulets souffrent souvent de la soif et de la faim, les marchands ayant trop peu prévu, les matelots s’évitant des corvées régulières, les aliments n’étant que de médiocre qualité. Ces équidés doivent souvent manger des aliments simplement jetés à terre, avalant en même temps la paille souillée, voire leurs excréments pour compenser la faim, mais les bêtes attachées trop court, incapables de baisser autant leur tête, sont forcées de jeûner. Beaucoup s’affaiblissent, contractent ou amplifient des maladies, mangent encore moins, respirent toujours plus mal, tombent au premier tangage, ont de plus en plus de peine à se relever, se blessent facilement lors des heurts avec d’autres ou contre les parois et lors de ces chutes, se fracturant des os ou se rompant des ligaments, contractant alors le tétanos ou la gangrène.À l’arrivée, les sorties sont souvent retardées car, dans nombre de navires, les rampes reliant les ponts ont été enlevées pour mieux entasser, d’autant qu’on ne prévoyait pas de promenade extérieure. Les équidés doivent attendre plusieurs jours que de nouvelles pentes soient installées, sur lesquelles ils se précipitent pour sortir de cet enfer. Les blessés et les malades ne pouvant pas les gravir attendent d’être sanglés puis soulevés à la grue. À terre, les chevaux, souvent des mustangs plus ou moins sauvages, achetés à moindre coût, se montrent rebelles à la discipline. Ils déconcertent autant leurs congénères européens, habitués au travail, que les conducteurs qui font alors pleuvoir les coups.Chevaux transportant des munitions à la 20ᵉ Batterie de l’Artillerie canadienne de campagne à Neuville | © Saint-Vaast, France.Archives du Canada, CC BYDes incompréhensions réciproquesCes incompréhensions sont nombreuses, d’autant que nombre de soldats n’ont jamais côtoyé de chevaux auparavant et que ces derniers ne sont pas habitués à de tels environnements. Nous avons vu que beaucoup d’équidés réquisitionnés refusent d’entrer dans les wagons ou les camions. Cela conduit les soldats à les qualifier de « bêtes », à se grouper jusqu’à six ou sept pour les forcer et à manier la violence. Or cette attitude des chevaux s’explique par leur vision, mieux connue de nos jours : étroite en hauteur mais très panoramique en largeur, d’un flanc à l’autre. Ils ont donc le sentiment d’être bêtement précipités contre un obstacle alors que la voie est libre autour ! D’autant qu’ils détectent mal l’intérieur noir des wagons, mettant du temps à accommoder leur vue à l’obscurité, et qu’ils rechignent logiquement à entrer dans cet inconnu… à la manière d’un automobiliste qui, par temps ensoleillé, freine devant une section très ombragée de la route formant un mur noir.Des soldats français essayant de tirer une mule épuisée hors de la boue d’un trou d’obus. | ©National Library of Scotland, CC BYUn autre exemple d’incompréhension concerne l’abreuvement des chevaux durant l’été 1914. Ils ne peuvent pas boire suffisamment, souvent une fois la nuit car les cavaliers limitent ces moments dangereux pour eux, et cela provoque une importante mortalité. On peut invoquer la guerre de mouvement, qui réduit les possibilités de nourrir et d’abreuver, et la négligence des hommes, qui est réelle, mais la situation est confortée par un aspect inconnu des humains et même des animaux : on sait maintenant que les chevaux connaissent une forme de déshydratation qui ne provoque pas une soif importante, ce qui signifie que ces chevaux de guerre n’ont sans doute pas suffisamment manifesté leur besoin.Auteur :Éric Baratay, Professeur d’histoire, Université Jean Moulin Lyon 3Cet article est republié sous licence Creative Commons.>> Lire l’article original :THE CONVERSATION
LLa dissuasion nucléaire française est-elle crédible face à la Russie ? | The Conversation L’arsenal nucléaire français (290 têtes déployées) est sous-dimensionné pour répondre à la menace russe (1 600 têtes déployées). À quelles conditions la France pourrait-elle assurer une dissuasion à l’échelle européenne, alors que la protection des États-Unis ne semble plus garantie ?Dès 2020, Emmanuel Macron a proposé une réflexion sur la dimension européenne de la dissuasion nucléaire française. En ce sens, il a proposé un dialogue stratégique ainsi que des exercices nucléaires conjoints entre les partenaires européens. Cinq ans plus tard, en février 2025, Friedrich Merz, futur chancelier fédéral, a répondu à cet appel, préconisant une extension du parapluie nucléaire français à l’Allemagne alors que les États-Unis de Donald Trump n’apparaissent plus comme un partenaire fiable pour protéger l’Europe.Mais la France a-t-elle les capacités de défendre l’Europe ? L’hypothétique déploiement du parapluie nucléaire français en Europe de l’Est permettrait-il de concrétiser l’autonomie stratégique de l’Europe, lui donnant les moyens de se défendre en toute indépendance ?La dissuasion nucléaire française face à la menace russeÀ l’origine, la France a développé son armement atomique pour répondre à la menace de l’invasion soviétique et pour éviter toute dépendance vis-à-vis des États-Unis. Selon une doctrine stable et régulièrement réaffirmée par le pouvoir politique, Paris utiliserait son arsenal stratégique par voie aérienne et sous-marine en cas d’attaque contre ses intérêts vitauxReste que, sans le soutien états-unien, le rapport de force apparaît largement défavorable à la France, laquelle dispose de 290 têtes nucléaires contre 1 600 têtes déployées (4 380 têtes avec les stocks) côté russe.Certes, la puissance explosive des ogives thermonucléaires, alliée à la portée balistique du missile mer-sol balistique stratégique français M51, permettrait de vitrifier les principales villes russes, dont Moscou.Mais à l’inverse, il suffirait aux Russes de « 200 secondes pour atomiser Paris », selon une estimation donnée à la télévision russe au sujet des missiles thermonucléaires Satan.Cette opération classique de communication renvoie à la perspective dite du « goutte à goutte » consistant à détruire les villes ennemies dans un échange atomique au coup par coup, dans lequel la Russie peut compter sur son immensité pour gagner à l’usure. C’est cette potentielle vitrification réciproque qu’il faut garder à l’esprit dans le pari mutuel de la dissuasion nucléaire.Afin de doper l’impact de la dissuasion nucléaire français, un partenariat pourrait être envisagé avec le Royaume-Uni. Puissance nucléaire depuis 1952, Londres ne possède plus que des missiles balistiques lancés par sous-marin et a décidé, depuis le Brexit, de renforcer son arsenal à 260 têtes nucléaires. Mais, bien que partageant des intérêts communs, ces deux puissances nucléaires européennes ne sont pas équivalentes.Contrairement au Royaume-Uni, qui est membre du groupe des plans nucléaires de l’Otan et dont les ogives sont conçues aux États-Unis, la France produit ses armes sur son propre territoire et n’est soumise à aucune obligation de l’Otan, ce qui donne à Paris une grande marge de manœuvre pour définir sa doctrine. Enfin, la France reste légitime pour parler au nom de l’Union européenne, dont elle fait politiquement partie depuis sa création.La force nucléaire française : une alternative à la dissuasion élargie des États-UnisLa France est devenue officiellement une puissance atomique dès 1960 en s’appuyant sur ses propres ressources, le soutien extérieur des États-Unis oscillant au gré des événements. Car l’apparition d’une force stratégique française indépendante a longuement contrarié Washington qui a cherché à la restreindre par des traités internationaux – comme le traité de 1963 limitant les essais nucléaires atmosphériques ou encore le Traité de non-prolifération (TNP) en 1968. Depuis 1974, officiellement, la force nucléaire française a un rôle dissuasif propre au sein de l’Otan, contribuant à la sécurité globale de l’Alliance en compliquant les calculs des adversaires potentiels.Il y a près de soixante ans, la mise en place de la riposte graduée par le président Lyndon Johnson avait renforcé les doutes sur la détermination de la Maison Blanche à s’engager pleinement dans la défense de l’Europe. Aujourd’hui, la volonté du président Trump de mettre fin au soutien de son pays à l’Ukraine confirme ces soupçons. Dès lors, des voix de plus en plus manifestes et insistantes plaident pour l’acceptation d’une force nucléaire française qui ne serait plus chimiquement pure, mais qui s’étendrait à l’échelle européenne.Le pré-positionnement du parapluie nucléaire français en Europe de l’EstLa demande du futur chancelier allemand Friedrich Merz rejoint la proposition française d’établir un dialogue engageant les Européens dans une démarche commune. Comme l’a rappelé le ministre des armées, la définition précise de l’intérêt vital relève de la seule responsabilité du président de la République française en fonction des circonstances. Pour autant, l’emploi de l’arme nucléaire pour protéger l’Europe implique une discussion stratégique pour définir la puissance à acquérir, les intérêts à défendre et le mode de commandement du feu nucléaire.Avancer vers le cadre d’une européanisation de la force nucléaire signifie augmenter les capacités de dissuasion et, donc, accroître l’arsenal français pour lui permettre de répondre aux menaces qui concernent l’ensemble des 27 États membres de l’Union européenne. Cela nécessite de constituer des stocks supplémentaires de matières fissiles et donc de réactiver les usines de production de Pierrelatte (Drôme) et Marcoule (Gard) démantelées en 1998, sacrifiées sur l’autel du désarmement unilatéral.Le dogme de la stricte suffisance doit également être questionné. Si aujourd’hui, 290 têtes nucléaires représentent la valeur que la France accorde à la défendre de son existence, ce prix paraît négliger l’échelle du continent européen, et la logique le confirme : les puissances nucléaires de taille continentale telles que les États-Unis, la Russie et bientôt la Chine déploient un arsenal à hauteur d’un millier de têtes thermonucléaires.La remontée en puissance prendra du temps et nécessitera un effort budgétaire pour son extension européenne au travers de l’augmentation du nombre de missiles et d’avions porteurs. Outre la construction de nouvelles infrastructures dans les pays européens partenaires, le coût pourrait dépasser 10 milliards d’euros annuels, sans compter les coûts indirects liés à la maintenance et à la logistique. Un temps long à prendre en compte d’autant que l’offre politique et stratégique d’une protection nucléaire élargie évolue au gré des circonstances.Alors que Berlin préférait jusqu’à présent que la France assume un rôle simplement complémentaire à la dissuasion élargie des États-Unis, l’abandon de l’Ukraine par ces derniers donne une prime à l’agresseur russe. Comme l’indique Emmanuel Macron, la France pourrait en réaction proposer un prépositionnement de ses forces nucléaires dans les pays d’Europe de l’Est avec l’idée de se substituer à terme aux États-Unis.Ce parapluie nucléaire français concrétiserait l’autonomie stratégique européenne à travers le déploiement d’avions de combat à capacité nucléaire, signe de la solidarité politique européenne et rendant plus difficiles les calculs de Moscou.La présence visible de ces avions en Europe de l’Est pourrait empêcher la Russie d’attaquer les pays en question avec des moyens conventionnels, une telle attaque risquant de provoquer une riposte nucléaire française au nom de l’Europe.Auteur :Benoît Grémare, chercheur associé à l’Institut d’Études de Stratégie et de Défense, Université Jean Moulin Lyon 3Cet article est republié sous licence Creative Commons.>> Lire l’article original :The Conversation
CCe que nos smartphones font au musée | The Conversation Passer devant une œuvre, sortir son téléphone, prendre une photo… Dans les musées, cette chorégraphie moderne domine les habitudes des visiteurs. Et si derrière ce geste mécanique se dissimulait une autre manière de dialoguer avec l’art ?Cet été encore, vous avez pesté. Maugréé, râlé même, contre ces grappes de touristes amateurs d’art brandissant obstinément leur Smartphone à bout de bras, et dont le seul loisir semble de surpeupler les musées en vous bouchant la vue par la même occasion. Ces deux étudiants en short et au sourire étrangement figé vous empêchent ne serait-ce que d’apercevoir le Poussin que promettait le dépliant et prennent une pose qui serait plus opportune, jugez-vous, à la sortie d’un pub qu’au cœur d’un musée. Le Rothko orangé qui clôt la série exposée dans cette autre salle où vous devinez la patte du curateur de l’exposition, soucieux d’embarquer le visiteur dans une narration cohérente, ne semble plus servir que de fond vaguement coloré à une séance de shooting pour un couple occupé à s’entre-photographier amoureusement.Voilà que la civilisation du loisir, unie comme un seul homme, a malignement comploté et choisi le même jour que vous pour venir admirer La Nuit étoilée, qu’illuminent en l’occurrence plus de flashes que d’éclats stellaires…Il faut se rendre à l’évidence : une foule de fans d’art a déboulé, rejouant en mode connecté la furieuse noce de Gervaise traversant le musée, pour envahir ce temple de l’art, ce gardien d’un patrimoine universel intangible, ce sanctuaire du goût (le bon). Comment peut-on, de dos forcément, ne pas même jeter un regard à de tels chefs-d’œuvre devenus purs prétextes à de fugaces selfies, ou ailleurs corrompre par l’interposition d’un écran la pureté de la relation esthétique, celle qui unit un œil et un tableau en une rencontre dont le sacré n’est pas absent ? On voit certes l’œuvre que l’on photographie, à travers l’optique de son Smartphone, concédez-vous, mais la contemple-t-on encore ? C’est dans les nymphéas de Monet que Narcisse semble désormais se noyer, non sans tendre désespérément le bras pour tenter de sauver in extremis son iPhone d’une immersion que chacun sait funeste, le sachet rempli de riz n’étant qu’une légende urbaine.Une nouvelle place du corps au muséeLe geste même, dans sa banalité, détermine de nouvelles techniques du corps, qui peuplent les salles d’exposition de bras coudés en bec de cygne indispensables à la stabilité requise par l’objectif portable. La main, bannie du musée où un tabou a instauré l’œuvre exposée comme intouchable, fait retour : d’abord prendre le cliché d’une tape légère sur l’écran, avec cette délicatesse qui signifie, dixit Barthes, « ne pas peser sur l’autre », puis les doigts qui glissent sur la surface de l’écran, s’écartent progressivement, pour zoomer. C’est déjà une littératie, une compétence numérique acquise, qui se manifeste.Le regard s’est lui aussi modifié, qui ne s’ancre plus uniquement dans l’œuvre, mais ne cesse de plonger vers l’écran du Smartphone, pour vérifier la qualité du cliché pris ou consulter la fiche Wikipédia du peintre, puis se redresser vers la verticalité de l’œuvre. Or, chaque trajet optique enrichit mon expérience, renouvelée chaque fois par le prisme d’un savoir nouveau. C’est un kaléidoscope de l’œuvre, nourri de versions progressivement augmentées, que dessine la pratique de la « photophonie » (photographie à l’aide de nos Smartphones).Une telle mobilité du regard semble d’ailleurs se substituer peu à peu au mouvement avant/arrière, « nouvelle distance », en laquelle le philosophe Gaëtan Picon lisant Zola décelait le propre de l’appréhension de l’art moderne.La petite fille à la robe bleuePhotographier sa fille en robe bleue devant une telle platitude lisse réintroduira un rien de figuratif, un peu de figuration au pays de l’abstraction, de familier au royaume de la radicale altérité : comme une possibilité de s’approprier, impurement peut-être, ce qui sans cela se déroberait.La continuité chromatique qui s’instaure, de l’œuvre à la fillette, est la métaphore en acte du transfert partiel de notoriété de l’œuvre vers le sujet qui prend la pose à proximité de ladite œuvre, pour un portrait, un « selfiegraphe ». L’Enfant bleu n’est plus représenté dans le cadre de la toile, comme dans le tableau de Thomas Gainsborough, mais s’en est détaché et se poste devant elle, parachevant un processus amorcé par Klein lui-même.Ce portrait inscrit bel et bien du temps, vibrant, car vécu sur un cliché qui, sans la présence de l’enfant, ne serait qu’une plate carte postale plongée, quasi anhistorique, dans le présent éternel où entend évoluer l’œuvre. L’inscription d’un visage, porteur à la surface de son épiderme, du passage du temps et inscrit lui-même dans une sociabilité, réintroduit une dimension temporelle aussi fiable que n’importe quelles métadonnées.Alors que le téléphone fixe, cantonné à la communication orale, reconnaissait volontiers à chacun un statut de sujet, parlant, et me liait, pour paraphraser Ricœur, à « quelqu’un qui comme moi, dit “je” », le Smartphone employé comme appareil photographique lie deux sujets qui peuvent s’entre-reconnaître en synchronie dans un « nous », familial en l’occurrence.Mais que devient alors le statut de l’œuvre, réduite à un fond coloré assimilant la scène à un vulgaire photocall ?L’œuvre, simple arrière-plan pour photo ?La photophonie semble empêcher la rencontre véritable, au profit d’un rapport superficiel, « digestif » avec l’art. Le musée d’art, le temps d’un tel cliché, croise en effet la route, de ces « musées du selfie » récemment apparus, à Manille d’abord, puis à Stockholm, musées « instagrammables » qui proposent aux visiteurs des pièces dénuées d’œuvres, mais tapissées de couleurs psychédéliques ou de smileys, comme autant de fonds tout-prêts pour les meilleurs selfies qui deviendront viraux sur les réseaux.Mais peut-on pour autant réduire ce geste, devenu pratique massive, à la quête d’un fond d’écran ou d’une photo de profil ? L’hypothèse retenue ici veut plutôt voir dans la photophonie en contexte muséal une expérience sensible et esthétique par et dans laquelle subjectivités et sociabilités se cherchent et se construisent.Apprivoiser des œuvres impressionnantesSi l’œuvre impressionne, elle qui a traversé les années en incarnant un patrimoine culturel que l’on veut croire intemporel, elle n’en inquiète pas moins d’être chargée précisément d’un tel capital symbolique. La contempler, surtout pour la première fois, méduse : la médiation par l’écran du Smartphone hérite donc d’un geste lointain de ce héros grec qui avait songé à polir son bouclier afin de renvoyer son propre regard pétrifiant à la gorgone.©Wladislaw Peljuchno | Unsplash, CC BYLe geste de photographier l’œuvre contribue de même à en domestiquer la puissance expressive, peut-être sans cela parfois inassimilable par le spectateur. La médiation par le portable permet une distance paradoxalement créatrice d’une inédite proximité. C’est ainsi l’évidence même du tableau, son aura, qui me deviennent supportables. Les manipulations ultérieures du cliché obtenu – par recadrage ou adjonction d’un filtre, par exemple – et leur partage avec une communauté on line, qu’autorise le caractère versatile et fluide de l’image numérique, conforteront d’ailleurs la photophonie comme pratique majeure d’appropriation culturelle. Le geste photophonique ressortit à une dynamique d’encapacitation du visiteur-spectateur.Quand « le sujet téléphonique », dans l’usage vocal originel, selon l’essayiste Frédérique Toudoire-Surlapierre « est d’abord un sujet consentant (obéissant) » puisque « répondre c’est accepter de se placer là où l’autre voulait que je sois pour lui », la pratique du portrait ou du selfie traduit à l’inverse une évolution assez radicale des rôles. Le sujet photophonique s’institue en effet lui-même, par l’égoportrait ou le choix d’un contexte, en l’occurrence d’une œuvre comme arrière-plan.« Choix et contrôle » déterminent en grande partie la qualité de l’expérience muséale. Le Smartphone, à chaque capture photophonique, offre précisément aux visiteurs la possibilité d’exercer ces deux actes de maîtrise de leur environnement, tout en stockant sur leur carte-mémoire une constellation de biographèmes, comme autant d’éclats autobiographiques constitutifs d’une identité plurielle, instable et problématique. La seule que nous puissions dire nôtre, assurément.Auteur : Gilles Bonnet, professeur de littérature française moderne et contemporaine, Université Jean Moulin Lyon 3Cet article est republié sous licence Creative Commons.>> Lire l’article original : The Conversation
CComment réussir sa relocalisation en France ? Entre 2009 et 2020, la France compte 144 relocalisations contre 466 délocalisations. Heureusement, certaines entreprises (re)transfèrent avec succès leurs activités dans l’Hexagone. Notamment la coopérative Atol et Lucibel, pionnière française du LED.En ce mois de janvier 2025, sept nouveaux projets ont été soutenus par France 2030 pour renforcer ou relocaliser la production de 42 médicaments essentiels. L’objectif : réduire la dépendance aux importations, notamment de Chine ou d’Inde où sont produits 60 % et 80 % des principes actifs pharmaceutiques.Aujourd’hui, le manque de foncier abordable, la hausse des prix de l’énergie, auxquels il faut rajouter le manque de main-d’œuvre disponible, constituent trois freins à la relocalisation. Certains industriels relèvent cependant ces défis. Ils font de la relocalisation une stratégie de développement rentable, proposant des produits Made in France en phase avec les attentes d’une grande partie des consommateurs.Dans une étude sur Lucibel et Atol, nous analysons les conditions de réussite d’une relocalisation : nouvelle conception des produits, des « process » et des procédés, nouvelle organisation de la production et de la chaîne logistique.Prix de l’éloignementAu début des années 2000, les entreprises à capitaux étrangers ont contribué à près du tiers de la production manufacturière chinoise. Après l’engouement pour la production à l’étranger, les sociétés françaises constatent une hausse de leurs coûts liée à l’éloignement. Parmi les raisons, on trouve la hausse des salaires locaux, la suppression des subventions, des aides fiscales ou des délais de livraison allongés.La distance créée d’autres complications. Pour éviter la contrefaçon, les malfaçons et les vols, des contrôles fastidieux sont mis en place. Enfin, les conditions de production peu éthiques nuisent à l’image de certaines entreprises qui relocalisent pour préserver leur réputation. Des produits délocalisés créent aussi des clients insatisfaits.144 relocalisations contre 466 délocalisationsOn dénombre 144 relocalisations contre 466 délocalisations entre 2009 et 2020. Elles concernent principalement l’industrie manufacturière, même si le Brexit a entraîné une petite dizaine de relocalisations dans le secteur bancaire et financier. En part de créations d’emplois, les relocalisations pèsent peu. Moins de 1 % des créations d’emplois sont industriel, alors que les délocalisations représentent 6,6 % des pertes d’emploi industriel. Une hausse des délocalisations début 2020 montre que la tendance à la relocalisation n’est pas acquise. Les entreprises rencontrent des obstacles majeurs pour revenir vers des circuits locaux : manque de foncier abordable, hausse des prix de l’énergie ou manque de main-d’œuvre disponible.Bien qu’elles soient encore relativement limitées, des initiatives françaises témoignent d’un effort coordonné pour soutenir la relocalisation. Elles incluent des aides financières directes et indirectes aux entreprises, ainsi que deux plans de financement. En 2010, la certification « Origine France Garantie » est lancée pour valoriser la production des entreprises françaises. Entre 2012 et 2014, le ministère du redressement productif développe des outils comme la plate-forme Colbert 2.0 pour réaliser les études de faisabilité des projets de relocalisation. Des événements annuels mettent en valeur la production française à l’instar des assises « Produire en France » en 2018 ou des « Rencontres du Made in France en 2024.Atol et Lucibel : des relocalisations réussiesCertains industriels comme la société coopérative des opticiens Atol ou le groupe Lucibel réussissent à relocaliser leur production en France de manière durable. Comment ? En imaginant des modes de production plus efficaces et moins coûteux.Pour améliorer sa compétitivité et se différencier de ses concurrents, Atol a créé des lunettes connectées assemblées dans son usine de Beaune. Ses composants électroniques sont fabriqués dans les Côtes–d’Armor. Le célèbre opticien a également inventé les lunettes « zéro vis », déformables sans soudures, proposant à ses clients une garantie à vie. Atol a automatisé la production en investissant dans la robotique et réorganisé le temps de travail, en passant à 2×8, puis à 3×8 pour réduire ses coûts et accroître la productivité.Fondée en 2008, Lucibel conçoit et fabrique des produits et solutions d’éclairage de nouvelle génération issus de la technologie LED. Le groupe est pionnier dans les nouvelles applications permises par la LED au-delà de l’éclairage : l’accès à Internet par la lumière (LiFi), des produits cosmétiques et des lumières d’intérieur. Parce qu’en France en 2008, peu d’industriels connaissent la technologie LED, c’est à Shenzhen que Lucibel construit sa première usine. Mais confronté à des problèmes de qualité, des vols de ses technologies et des délais de livraison allongés, il décide en 2014 de relocaliser sa production en Normandie.Innover, innover et encore innoverPour être rentable, un re-ingineering complet à la fois des « process » et des produits est réalisé. La production est organisée par îlots. Contrairement à la Chine où les ouvriers travaillaient à la chaîne, ils sont responsabilisés et deviennent plus polyvalents. Cette mesure leur permet d’avoir un travail plus varié, de pouvoir remplacer plus facilement un collègue absent. L’entreprise arrive ainsi à diviser par trois le temps homme passé sur chaque produit par rapport à la Chine, réalisant de conséquents gains de productivité.Les produits montent en gamme avec un positionnement « plus premium ». Les équipes R&D et fabrication sont désormais regroupées sur le même site.« On a pu aller vite sur ces sujets d’innovation, car on était en France. La colocalisation des équipes sur le même site à Barentin nous a permis d’être plus efficaces et de monter en puissance »,souligne Frédéric Granotier, le président-directeur général de Lucibel. Depuis, l’entreprise ne cesse d’innover avec 20 % de ses effectifs dédiés à la R&D.En relocalisant, ces entreprises gagnent en créativité, en efficacité et en innovation. Pour les pouvoirs publics, il semble alors pertinent de renforcer les aides en lien avec l’innovation et de favoriser la (re)construction de filières : renforcer la coopération technologique distributeurs/fabricants/fournisseurs en favorisant l’achat local.Auteur.ice.s : Catherine Mercier-Suissa, Professeure des Universités en sciences économiques, iaelyon School of Management – Université Jean Moulin Lyon 3 ; Daniel Suissa, Responsable pédagogique master management industriel, ESDES – UCLy (Institut Catholique de Lyon)Cet article est republié sous licence Creative Commons.>> Lire l’article original :The Conversation
LLa croissance durable des PME passe par un meilleur accompagnement humain : le cas du programme Elite Faire croître les PME européennes est impératif. Pourtant, les soutiens les plus efficaces ne sont pas forcément ceux qu’on imagine. Le programme Elite offre une approche et des outils originaux.La question de la croissance et du scale-up des PME européennes est un sujet d’actualité très discuté à la fois par les acteurs économiques, politiques et académiques. Comment permettre aux PME européennes de devenir exportatrices et compétitives à l’étranger ? Pendant longtemps, les PME allemandes ont été citées comme des modèles à suivre, mais face à la montée en puissance économique de nombreux pays comme l’Inde et la Chine, la pertinence de ce modèle est de plus en plus remise en question. S’agissant des obstacles rencontrés par les PME européennes depuis plusieurs décennies, de nombreux travaux de recherche conduits en sciences économiques et de gestion convergent vers les résultats suivants :l’accès aux ressources financières demeure une préoccupation essentielle ;la croissance des PME ne dépend pas des seules variables financières. Les questions d’organisation, de connaissances… ont même un effet autorenforçant.Multiplication des aidesFace à ces constatations, les acteurs publics nationaux et européens, ont multiplié les dispositifs d’aide destinés à stimuler la croissance et l’exportation des PME, le financement européen en cascade pour les entreprises, avec aussi des mesures orientées directement sur la question de la soutenabilité. On retrouve dans ces dispositifs, à la fois des mécanismes de financement (subventions, prêts, fonds de capital-risque). Simultanément, des mécanismes d’accompagnement des PME ont été développés, comme le font les chambres de Commerce en France avec le dispositif « Team France Export », qui propose une interface digitale pour guider les entrepreneurs.Il a été souvent mentionné qu’une des difficultés des PME est de se retrouver dans le maquis des dispositifs régionaux, nationaux ou européens, chacun jouant différents rôles parfois complémentaires. Au-delà de la question de la visibilité de ces dispositifs, et de leur accessibilité aux entrepreneurs, une question apparaît comme essentielle : quels sont les besoins réels des dirigeants de PME européennes pour s’orienter vers une croissance soutenable ?L’importance de l’humainNotre thèse est qu’au-delà de tous les dispositifs proposés, les entrepreneurs ont besoin d’un accompagnement « humain », c’est-à-dire d’une interaction continue sur un temps relativement long avec des individus, une équipe, ayant à la fois une vision globale, des compétences complémentaires et des réseaux pour les accompagner.Afin d’étayer cette thèse, nous avons conduit une étude et réalisé des entretiens auprès de l’équipe du groupe Elite issue de la place financière Euronext. Elite illustre selon nous, un exemple de ce qui peut être mis en place pour tenter d’accompagner des PME désireuses de croître et de faire face aux différents défis. Elite a été lancé en 2012 par la Bourse italienne, et est aujourd’hui intégré au Groupe Euronext. C’est un dispositif payant d’accompagnement des PME qui doivent remplir certaines conditions pour y accéder, généralement avoir un chiffre d’affaires supérieur à 10 millions d’euros.Un accompagnement globalL’originalité de ce programme est i) de s’interroger sur le mode de financement de l’entreprise le plus adapté à son stade de développement, ii) de ne pas se focaliser uniquement sur l’accès aux ressources financières mais de s’intéresser également aux connaissances et compétences que l’entrepreneur doit acquérir pour atteindre une croissance durable sur le long terme grâce à des formations ciblées, iii) et d’impliquer les entrepreneurs dans des ateliers (workshops), des événements de réseautage, des réunions et des échanges entre communautés industrielles et financières essentielles pour leur développement. Il s’agit donc de proposer un accompagnement global, et de dépasser ce qu’on entendait traditionnellement par l’intermédiation financière, via les banques ou via les marchés financiers.Nous avons conduit une série d’entretiens avec les membres de l’équipe d’Elite afin de mettre en lumière ce que nous appelons une nouvelle forme d’intermédiation de la part d’une place financière. Trois grands domaines d’action d’Elite ont été identifiés afin de mieux répondre aux défis rencontrés par les PME souhaitant croître de manière soutenable et durable.Le premier domaine concerne l’acquisition de nouvelles compétences et connaissances dans un processus dynamique. Dans un environnement très changeant, les entreprises doivent faire preuve d’anticipation, de réflexivité et de capacité à se transformer :« Nous sommes aussi une boîte à outils. Nous nous décrivons souvent comme une boîte à outils, pour l’entrepreneur, le PDG ou le directeur financier. Et ils sont libres de choisir les différents outils en fonction de leurs besoins » (chef du développement des produits).Roland Berger (cabinet de conseil privé).Le deuxième domaine : l’inscription dans des réseaux de manière agile et réactive ; celle-ci est devenue incontournable pour les PME.« Les compétences et la mise en réseau sont prioritaires. C’est notre premier objectif. Parce que, vous savez, tout le monde a besoin d’évaluer ses compétences ou d’en acquérir de nouvelles pour rester compétitif sur le marché ».Un accompagnement sur mesureEt enfin, faciliter l’accès à des financements alternatifs, comme l’émission de titres adossés à des actifs d’investisseurs institutionnels et éventuellement préparer les entreprises à accéder aux marchés de capitaux privés ou publics :« Nous mettons en avant le rôle et l’importance du reporting, de la transparence, de la structuration adéquate du plan financier et de l’importance de la soutenabilité. »La réussite des PME dans la trajectoire de croissance soutenable dépend le plus souvent des synergies entre ces trois domaines. Il est ainsi crucial d’adopter une approche holistique sur les actions à entreprendre et sur la manière d’agencer ces actions dans le temps et l’espace : « Les réalisations les plus importantes sont liées à la capacité de croissance de ces entreprises dans trois domaines en termes de management, d’emploi et de durabilité ». Elite propose aux entreprises engagées dans son programme un accompagnement avec une équipe dédiée. « Ainsi, chaque entreprise sait qu’une fois insérée dans le programme Elite, elle a un contact Elite personnel. Le dirigeant, le CEO, l’entrepreneur peut décrocher le téléphone, nous sommes là, pour eux, pour les questions de communication, de stratégie, etc., de sorte qu’ils soient très accompagnés ».Selon Elite, les entreprises bénéficiant de ce programme d’accompagnement affichent des performances supérieures sur trois critères : chiffre d’affaires, marge d’exploitation et création d’emplois. En moyenne, ces entreprises ont enregistré une augmentation annuelle de leur chiffre d’affaires de 11,8 ; %, contre 7,8 ; % pour l’échantillon de référence. Leur taux de marge atteint 17,1 ; %, nettement supérieur aux 12,4 ; % observés dans le groupe de comparaison. Enfin, elles ont vu leur taux d’emploi progresser de 15,5 ; %, bien au-delà des 0,8 ; % de l’échantillon de référence.Une nouvelle mission pour les places financièresPour assurer efficacement la croissance des PME, il est nécessaire de mettre en place un accompagnement global, que ce soit en termes de compétences, de formations, de réseaux et de financement. Cela est particulièrement important dans un contexte international extrêmement complexe et mouvant.Il est intéressant de noter que cette proposition émane de la place financière Euronext, qui, jusqu’à présent, était très focalisée sur les marchés financiers pour attirer les PME. Il semblerait que les places financières aient, à leur tour, intégré que l’accès aux ressources financières n’est pas le seul obstacle à la croissance soutenable des PME, et que d’autres variables doivent également être prises en compte. Quelques premières limites à ce programme peuvent être mentionnées. Premièrement, l’efficacité du programme reposant largement sur les interactions entre les entrepreneurs impliqués et l’équipe dédiée, comment conserver la qualité de cet accompagnement avec un nombre croissant d’entreprises ? Deuxièmement, Elite repose sur la coordination de nombreux intermédiaires spécialisés dans des domaines particuliers – banques, sociétés de conseil, cabinets juridiques. On peut s’interroger sur l’équilibre à trouver avec ces partenaires entre coopération et concurrence. Enfin, pour juger de l’efficacité d’un tel dispositif, il est nécessaire, dans une approche croisée, d’interroger les entreprises impliquées et de suivre leur évolution, afin d’évaluer l’impact réel du programme proposé.Autrices : Laurence Cohen, Maître de conférences en Finance, iaelyon School of Management – Université Jean Moulin Lyon 3 et Valérie Revest, Professeure des universités en sciences économiques, centre de recherche Magellan, iaelyon School of Management – Université Jean Moulin Lyon 3Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons.>> Lire l’article original :The Conversation
RRivalité des grandes puissances : vers une multiplication des domaines de confrontation Les États voient se développer des manifestations d’hostilité sur des terrains que la modernité rend précisément toujours plus critiques. L’École Normale Supérieure de Lyon – ENS de Lyon, vous invite à assister à une conférence traitant du sujet.La mondialisation du commerce, les innovations digitales ou numériques, sur les plans sociaux ou industriels, ont construit un monde de liaisons innombrables, aux nombreuses chambres d’écho, dans lesquelles la guerre se manifeste sous des formes larvées, du « soutien » distant de l’allié aux « rivalités » euphémisées.Ainsi dans ce contexte vague mais interdépendant, où guerre et paix se nuancent en un spectre nouveau, les opérations qui manifestent l’hostilité d’un État envers un autre se diffractent de même, se décomposent dans un ensemble de domaines. L’addition difficile des focales (technologiques, économiques, sociales…) dessine pourtant le « conflit complet », le profil hétéroclite de l’ennemi.Intervenant.e.s :Mme Muriel Domench, ex ambassadrice à l’OTAN,Le général Autellet, ex Major Général des Armées,M. Olivier Zajec, maître de conférences en sciences politiques. >> Pour plus d’informations, rendez-vous sur le site : ENS de Lyon
FFête des Lumières et sciences Cette année, pour célébrer son vingt-cinquième anniversaire, la Fête des Lumières rallume quelques-unes des œuvres les plus marquantes de son histoire. L’occasion de raviver nos souvenirs et de les transmettre entre générations.> Parmi les événements proposés, des œuvres mêlant art et sciences :Laniakea horizon24©DRLe cosmos est à portée de main ! Dix ans exactement après sa première présentation au même endroit, Laniakea horizon24 est de retour pour célébrer les 25 ans de la Fête des Lumières. Son titre, aussi énigmatique qu’enchanteur, est emprunté à la langue hawaïenne et signifie « horizon céleste immense ». Une belle entrée en matière pour cette création inspirée par les travaux de l’astrophysicienne lyonnaise Hélène Courtois, qui a cartographié l’univers.Cette carte stellaire se retrouve à la fois au sol, avec une voie lactée en suspension constituée de 1 000 sphères lumineuses, et sur la façade de l’immeuble où sont projetées des images de méga-galaxies. Un big bang d’émotions ! La Manu fait son cinéma©DRPour la troisième année consécutive, la Fête des Lumières invite les étudiants de la licence pro « Conception et management en éclairage » de l’IAE Lyon (l’école de gestion et management de l’université Lyon 3) à montrer l’étendue de leurs talents. L’année 2025 marquera les 130 ans du cinématographe, c’est donc le 7e art que les étudiants ont choisi de célébrer sur le campus de la Manufacture des Tabacs.Trois soirs durant, la façade de la cour sud devient le théâtre de ces expérimentations étudiantes qui donnent vie aux célèbres briques rouges du bâtiment. Les techniques du cinéma et les émotions qu’il procure, ainsi que sa dimension patrimoniale ont inspiré l’écriture de cette création. >> Pour le programme, rendez-vous sur le site : fête des lumières
LLugdunum 197. Histoire et archéologie d’une bataille romaine Plongez au cœur de l’histoire romaine en explorant les découvertes archéologiques liées à cette bataille emblématique.À l’occasion de la parution du livre collectif consacré à l’histoire et l’archéologie de la bataille de Lugdunum et trois ans après l’exposition « EnQuête de pouvoir », au musée, cette conférence propose de revenir sur l’ultime affrontement militaire des guerres civiles de 193-197 apr. J.-C. et sur les apports des dernières recherches scientifiques relatives à cet événement majeur de l’histoire de Lyon et de l’Empire romain.Intervenant : Patrice Faure, professeur en histoire romaine à l’Université Jean Moulin Lyon 3.>> Pour en savoir plus, rendez-vous sur le site :Lugdunum – Musée et Théâtres romains