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RRecourir au vaccin ? Les clés pour comprendre. Partie 1: du principe à la conception d’un vaccin

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Article #1 du dossier Pop’Sciences « De la variole à la Covid, les vaccins…« 

Deux millions. Ce chiffre représente, d’après l’Organisation mondiale de la santé, le nombre de vies sauvées chaque année grâce la vaccination dans le monde. En protégeant chaque personne vaccinée contre une infection, l’administration d’un vaccin est bénéfique sur le plan individuel. Elle l’est aussi sur le plan collectif en réduisant le nombre de personnes susceptibles de disséminer la maladie.
Mais comment un vaccin agit-il sur notre corps ? Et comment le conçoit-on ?

Hélène Dutartre, chercheuse au Centre International de Recherche en Infectiologie (CIRI) et Nathalie Davoust-Nataf, chercheuse au Laboratoire de Biologie et de Modélisation de la Cellule (LMBC) nous apportent leur éclairage. Toutes deux animent le groupe « Microbes, Immunité & Vaccination » associant scientifiques et enseignants lyonnais.

Un article de Caroline Depecker, journaliste scientifique
pour Pop’Sciences – 2 juin 2021

Une maladie infectieuse est provoquée par l’invasion dans notre organisme d’un microbe pathogène* (la plupart du temps un virus*, une bactérie* ou un parasite*) qui se multiplie et entraîne une réaction forte de nos cellules. Celles-ci peuvent être gravement endommagées, détruites, ou libérer des substances toxiques.

Le principe du vaccin : entraîner notre corps à faire face à un pathogène invasif

Pour éviter l’infection, la vaccination dite « préventive » consiste à mettre l’organisme en bonne santé en contact avec une version inactivée ou atténuée du pathogène, ou encore avec l’un de ses composants : on apprend ainsi au système immunitaire* à reconnaître l’intrus et à élaborer un système défensif, spécifique de celui-ci. Le bénéfice d’un vaccin repose sur le fait que l’on immunise la personne sans l’infecter avec le microbe responsable de la maladie ciblée, qui peut être dangereuse. Une fois entraîné, l’organisme gardera « la mémoire » des défenses qu’il a mobilisées face au vaccin : celles-ci seront sollicitées rapidement et neutraliseront efficacement le pathogène, en cas de confrontation réelle ultérieure. En Europe, ce recours aux vaccins pour leur action prophylactique* a été démocratisé avec les travaux d’Edward Jenner sur la variole* à la fin du 18e siècle.

En dehors de cette action préventive dans le cadre des maladies infectieuses, un vaccin peut être utilisé en immunothérapie : il n’est pas conçu cette fois-ci pour protéger un individu contre une infection future, mais pour l’aider à lutter contre une maladie déjà présente, en stimulant le système immunitaire que la maladie a ralenti. Cette approche d’immunothérapie* est développée depuis les années 1980-90 dans le cadre d’essais cliniques, en cancérologie et dans la lutte contre le virus du Sida (le VIH).

Le système immunitaire : une batterie d’armes défensives prête à s’activer

Face à un pathogène, reconnu comme agresseur par notre organisme, le système immunitaire* réagit en déclenchant une multitude de réactions. La première réponse est immédiate et non spécifique au microbe : elle met en jeu des moyens de défense qui se situent au niveau de la peau, de la sueur, des larmes, de la salive et provoque, outre une inflammation locale, la libération d’agents bactéricides et virucides. C’est ce que l’on appelle l’immunité innée.

Deuxième système de défense, plus lent à se mettre en œuvre : l’immunité adaptative. Les soldats qui en font partie appartiennent à trois régiments :
– les lymphocytes* B qui produisent les anticorps* empêchant le pathogène d’entrer dans les cellules
– les lymphocytes T tueurs, des cellules spécialisées dont le rôle est de détruire les cellules infectées,
– enfin, les lymphocytes T auxiliaires. Sorte de chefs-d’orchestres, ces globules blancs organisent la réponse immunitaire et commandent l’action des deux bataillons de lymphocytes précédents.

Si un virus ne peut plus entrer dans la cellule, il ne peut plus alors se répliquer*. Si la cellule dans laquelle il se trouve est détruite, il ne peut plus alors en infecter d’autres.


Que penser de la réaction vaccinale et des effets secondaires ?

Parole donnée à Nathalie Davoust-Nataf, vaccin (1/5) : la réaction au vaccin est un bon signe

 Concevoir un vaccin : une démarche ancienne, avant tout empirique

On doit donc à Edward Jenner, un médecin anglais du 18e siècle, la première expérience scientifique de la vaccination. A cette époque, la variole, avec ses pustules hautement contagieuses, faisait des ravages partout en Europe, notamment chez les jeunes enfants. En 1796, le médecin remarque que les fermiers ayant contracté la vaccine, une forme de variole affectant les vaches mais bénigne pour l’Homme, sont protégés de la variole. Il a alors l’idée d’inoculer chez James Phipps, le jeune fils de son jardinier, du pus prélevé sur une fermière infectée par la vaccine après avoir trait une vache. Quelques jours plus tard, il lui transmet une version affaiblie de la variole pour s’assurer si l’enfant est bien protégé : celui-ci résiste à la maladie.

Edouard Jenner en train de vacciner un enfant, peinture sur huile

Edward Jenner vaccinant un enfant, peinture sur huile de E. Hillemacher, 1884 @ Wikimedia Commons

« Connaître l’efficacité d’une méthode vaccinale repose beaucoup sur l’observation et l’expérimentation, c’est une démarche avant tout empirique, commente Nathalie Davoust-Nataf. Lorsque la vaccination a été utilisée pour la première fois, les scientifiques n’avaient pas nos moyens modernes d’analyse pour connaître le pathogène et la maladie qu’il induit : pas de séquençage génétique, ni de biologie moléculaire ou de microscopie électronique… La notion de pathogène n’avait même pas été arrêtée. Et c’est dans cette définition, ancienne, que se trouvent encore aujourd’hui les grands principes nécessaires à la fabrication d’un vaccin ».

Cette définition est émise en 1890 sous la plume de Robert Koch, médecin allemand, célèbre pour avoir découvert huit ans plus tôt la bactérie à l’origine de la tuberculose*. Il émet quatre postulats permettant d’identifier un agent infectieux. Deux d’entre eux stipulent que « le micro-organisme doit pouvoir être isolé et croître en milieu de culture pur (c’est-à-dire en ne contenant que ce seul microbe) et qu’il induit la maladie lorsqu’il est réintroduit chez un animal sensible ».

cellules de culture virale issues de rein de singe

Cellules Vero, utilisées comme lignée de culture virale @ 2021 William Parker

« Les deux étapes clés et délicates, dans la mise au point d’un vaccin, sont l’isolement du pathogène au laboratoire et sa multiplication en milieu de culture (étape d’amplification), illustre Hélène Dutartre. Une fois franchies, deux solutions :

– on peut tout d’abord utiliser le pathogène de façon industrielle tel que. Après inactivation par une méthode, thermique ou chimique, on obtient un vaccin qu’il faut ensuite tester en conditions réelles ». Cette stratégie, la plus ancienne, a fait ses preuves : c’est d’ailleurs celle qu’a adoptée la Chine pour produire ses vaccins Sinovac ou Sinopharm contre la Covid-19.

– « ou alors, on extrait le génome du pathogène amplifié, qu’on séquence ensuite pour construire des vaccins plus élaborés, comme les vaccins à vecteur viral, les vaccins à protéines recombinantes ou à ARN », complète l’infectiologue de Lyon.

…….La suite : Recourir au vaccin -Partie 2- Des différentes techniques vaccinales à l’évaluation de leur efficacité

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