Pop’Sciences répond à tous ceux qui ont soif de savoirs, de rencontres, d’expériences en lien avec les sciences.

EN SAVOIR PLUS

Comment améliorer l’efficacité des vaccins ?

CComment améliorer l’efficacité des vaccins ?

L’arrivée des vaccins à ARN messager et leur utilisation massive face au SARS-CoV-2 ont apporté de nouvelles données sur la qualité de la réponse immunitaire. Selon l’immunologue Stéphane Paul, il pourrait être plus efficace de combiner différents types de vaccins, mais aussi de les administrer autrement…

Explications dans ce podcast issu de la série La parole à la science du CNRS.

Intervenant : Stéphane Paul, professeur d’immunologie à l’Université Jean Monnet, praticien hospitalier au CHU de Saint-Étienne, responsable d’équipe au Centre international de recherche en infectiologie à Lyon, et membre du comité scientifique Vaccins Covid-19.

Quand les variants bousculent l’effort vaccinal

QQuand les variants bousculent l’effort vaccinal

Article #9 du dossier Pop’Sciences « De la variole à la Covid, les vaccins… »

Sous l’effet du variant Delta, plus contagieux, l’épidémie repart en France, à tel point que l’exécutif parle désormais d’une quatrième vague. Dans cette course de vitesse entre variants et vaccins, en sortirons-nous gagnants ? L’histoire n’est pas écrite mais l’issue positive est inexorable. Qui dépend de la vitesse à laquelle nous nous immunisons.

Un article de Caroline Depecker, journaliste scientifique
pour Pop’Sciences – 24 juillet 2021

«Nous sommes entrés dans une quatrième vague du virus», a lancé le porte-parole du gouvernement Gabriel Attal au sortir d’une conférence de presse consacrée au pass sanitaire, lundi 19 juillet dernier, expliquant que «la dynamique de l’épidémie est extrêmement forte, avec une vague plus rapide et une pente plus raide que toutes les précédentes». Le tableau de bord Covid-19 communiqué par les autorités à cette date concorde : le nombre de nouveaux cas quotidiens dépasse la barre symbolique des 10 000, reflétant l’augmentation de 133% du taux d’incidence au cours des 7 derniers jours (108 personnes infectées par semaine pour 100 000 habitants). En cohérence, le taux de reproduction R du virus est de 1,6, traduisant la reprise épidémique.

Celle-ci s’explique par la progression du variant Delta qui, à la date du 22 juillet, représente 80% des nouvelles contaminations en France, d’après le dernier bulletin de la Haute autorité sanitaire (HAS).

taux de présence du virus Delta en France le 23/07/21

Présence de la mutation L452R (Delta) en France mi-juillet © HAS

Un variant Delta plus contagieux que tous les autres

Ce variant est apparu en Inde et s’est propagé lors de la terrible vague de coronavirus qui y a sévi au mois d’avril. Il est présent aujourd’hui dans 80 pays environ, d’après la plateforme de collaboration génomique Gisaid, et progresse rapidement un peu partout dans le monde. Quasi inexistant en France mi-mai (il représentait 0,2% des prélèvements analysés), le variant Delta supplante progressivement le variant Alpha, majoritaire dans notre pays, car il est 40% à 60% plus contagieux que ce dernier, qui présentait lui-même une contagiosité 50% plus élevée que le virus d’origine ayant déclenché la maladie.
Cité par le quotidien Le Temps, Francis Balloux, spécialiste de l’évolution des virus à l’University College de Londres souligne que, sans la circulation du variant Delta, « les Etats-Unis et l’Europe seraient probablement sortis de la pandémie. Le taux de vaccination et les conditions climatiques ne permettraient plus la transmission d’un variant moins contagieux ».

Variant détecté en Angleterre (Alpha), dans le sud de l’Afrique (Beta), au Brésil (Gamma) ou en Inde (Delta), le virus de la Covid-19 mute sans surprise. En effet, ses mutations suivent un cheminement naturel dont l’objectif est d’assurer simplement sa survie. Elles aboutissent à l’apparition de lignées de virus différentes qui, au gré des avantages sélectifs apportées par les modifications génomiques, arrivent à perdurer, sans poser de problème particulier. Au total, quelques dizaines de lignées du coronavirus existeraient ainsi dans le monde.


Comment apparaissent les mutations et peut-on les contourner ?

Parole donnée à Michèle Ottmann, vaccins (4/5) : adapter les vaccins à l’évolution des virus

—————————————————————

L’affaire se complique quand les mutations présentes sur la lignée sont susceptibles d’affecter :
– la transmissibilité du virus (la facilité avec laquelle il se propage),
– la gravité de la maladie,
– la capacité du mutant à échapper à l’immunité (conférée par une infection antérieure ou par la vaccination),
– ou encore la possibilité d’échapper aux tests diagnostics.
C’est le cas des mutations E484K, E484Q et L452R portées, dans différentes mesures, par les quatre variants cités plus haut. Ce qui leur vaut d’ailleurs d’être qualifiés de « variants préoccupants » par la HAS (ou « VOC, variants of concern par l’OMS).

Ces variants préoccupants contournent-ils la vaccination ?

La bonne nouvelle, c’est que l’efficacité des vaccins disponibles en France aujourd’hui (à savoir Comirnaty® de Pfizer/BioNTech, ARNm-1273® de Moderna, Vaxzevria® de AstraZeneca et celui de Janssen) reste très largement conservée contre les variants Alpha, Beta et Gamma (petit bémol avec le vaccin d’AstraZeneca qui induirait une protection insuffisante contre le variant apparu au Brésil).
Pour ce qui est du variant Delta, objet des attentions du moment, les nouvelles sont plutôt rassurantes de ce point de vue. Une étude menée par Public Health England a conclu ainsi qu’avec deux doses de vaccin Pfizer/BioNTech, une personne est protégée à 88% contre les symptômes du variant Delta. Avec le vaccin AstraZeneca, la protection semble moindre, de l’ordre de 60%.

Y’aura-t-il une fin à la phase pandémique ? Une question d’immunité collective

Oui, c’est l’espoir qu’on peut former. Commentés par le magazine Sciences et Avenir en avril dernier, des travaux de chercheurs américains permettent d’envisager une banalisation du SARS-CoV-2 au fur et à mesure que la population s’immunise, que cela soit par la vaccination ou l’infection. De pandémique, le virus deviendrait endémique et saisonnier, épousant le comportement de ses cousins « cornonavirus du rhume ». Cité dans le même article, Bruno Lina, responsable du Centre national de référence des virus respiratoires à Lyon et membre du conseil scientifique Covid, qualifie ce scénario d’« inexorable ». Tout en reconnaissant qu’aucun « calendrier n’existe » pour en prédire l’arrivée.

Pour que le virus de la Covid-19 s’assimile à un rhume ou à une grippe saisonnière, il faut que la population s’immunise.  Elle l’est, pour l’instant de façon insuffisante. En France, au 23 juillet, seuls 48% des personnes ont rempli le schéma vaccinal complet. Face à l’expansion nouvelle du variant Delta, l’objectif à atteindre a alors été rehaussé à 80% (non plus 60%) dans l’espoir d’atteindre l’immunité collective sensée nous permettre de mettre fin à l’épidémie.

En mai dernier, dans The Conversation, Ed Feil, professeur en microbiologie à l’université de Bath (Royaume-Uni) précise le rôle joué par la contamination dans la dynamique d’apparition des variants. Pour lui : « la probabilité d’événements évolutifs rares conduisant à l’émergence de nouveaux variants préoccupants augmente avec le nombre de personnes infectées ». Vacciner le plus rapidement possible reste donc une priorité.
Il ajoute que, s’il est difficile de prévoir comment pourrait évoluer le SARS-CoV-2, « il est impératif de maintenir le nombre de cas aussi bas que possible partout dans le monde, car les nouveaux variants ne respectent aucune frontière ». Autant d’un point de vue géographique qu’évolutif, notamment en ce qui concerne l’adoption d’une virulence accrue.

PPour aller plus loin

 

 

Des essais cliniques vaccinaux toujours d’actualité pour la Covid-19, à Lyon et ailleurs

DDes essais cliniques vaccinaux toujours d’actualité pour la Covid-19, à Lyon et ailleurs

Article #8 du dossier Pop’Sciences « De la variole à la Covid, les vaccins… »

Au-delà des enseignements de la pharmacovigilance, les connaissances scientifiques sur les vaccins contre le coronavirus progressent à travers l’initiative Covireivac, à laquelle participent le CHU de Saint-Etienne et les Hospices civils de Lyon.
Ce projet
a été lancé en octobre 2020. Il contribue à la mise en œuvre d’essais cliniques pour les vaccins Covid toujours en cours de développement : une centaine, dont ceux de Sanofi-Pasteur.

Un article de Caroline Depecker, journaliste scientifique
pour Pop’Sciences – 13 juillet 2021

« L’année dernière, en examinant les dossiers des 4 vaccins utilisés en France contre la Covid-19, nous avons vite constaté que leurs données (celles relatives à l’efficacité entre autres) étaient difficilement comparables, les essais cliniques ayant été réalisés dans des conditions différentes, se souvient Stéphane Paul, professeur en immunologie au Centre hospitalier universitaire (CHU) de Saint-Etienne et membre du comité vaccins Covid-19. De plus, les données d’immunologie (production des anticorps, immunité innée, mémoire immunitaire …) étaient parcellaires ».

Ainsi, pour éclairer la stratégie vaccinale française, la première mission confiée à Covireivac a été d’étudier finement et de comparer la capacité des vaccins à produire une réponse immunitaire, et ce, à long terme.

95 candidats-vaccins afin de lutter contre la pandémie

Pilotée par l’Inserm, la plateforme Covireivac coordonne les travaux de 32 centres hospitaliers universitaires et de 11 laboratoires d’immunologie chargés de suivre, depuis février 2021, des essais cliniques vaccinaux.

50 000 Français se sont portés volontaires pour y participer : un projet sans précédent dans notre pays. Les participants sont tous vaccinés et suivis pendant deux ans. Les résultats permettront de décider de la nécessité, ou pas, de réaliser à l’avenir des rappels de vaccin en fonction de l’âge et/ou du statut immunitaire.

« Ils permettront aussi d’assurer une meilleure surveillance des vaccins, en identifiant des problématiques spécifiques comme, par exemple, l’apparition de processus inflammatoires chroniques », note Stéphane Paul.  

Doses de vaccin en attente d’essais cliniques. / ©Mat Napo sur Unsplash

La seconde mission de Covireivac est de contribuer à l’effort international visant à produire de nouveaux vaccins contre la covid-19. Car il existe encore 95 candidats vaccins en cours de développement à l’échelle mondiale, dont une trentaine sont engagés dans la dernière phase de tests sur l’homme. « L’État français soutient financièrement le développement de vaccins portés par des entreprises de l’Hexagone. A ce titre, Covireivac devrait bientôt être impliqué dans des essais cliniques avec la société nantaise Valneva, et avec Sanofi-Pasteur », précise l’immunologiste, chef d’équipe au Centre international de recherche en infectiologie (CIRI) de Lyon.

Sanofi annonce 2 vaccins et un centre d’excellence pour la technologie ARNm

Le géant pharmaceutique basé à Marcy l’Étoile, près de Lyon, développe deux candidats-vaccins contre la Covid-19. Son projet le plus avancé est un vaccin à base de protéine recombinante, une technologie que la firme maîtrise et commercialise depuis cinq ans dans le cas de la grippe saisonnière. Ce premier vaccin est développé en partenariat avec GlaxoSmithKline (GSK), qui fournit l’adjuvant nécessaire à la formulation du produit. Le 17 mai, Sanofi a annoncé par communiqué de presse, avoir des résultats positifs de phase 2 suffisants pour continuer le développement du vaccin en phase 3, dernière étape avant sa demande d’autorisation de mise sur le marché. Après avoir essuyé un revers en 2020, ayant occasionné plusieurs mois de retard, le laboratoire prévoit le lancement commercial au dernier trimestre 2021.

Sanofi développe par ailleurs un second candidat-vaccin de type ARN messager avec la société de biotechnologie américaine Translate Bio. Les premiers essais sur l’homme (phases 1-2 combinées) sont encourageants. Alors que cet autre projet ne devrait pas être finalisé avant l’année prochaine, le laboratoire a confirmé le 29 juin son intérêt pour ces vaccins de dernière génération en annonçant la création d’un centre d’excellence totalement dédié à la recherche sur la technologie ARN, entre ses sites de Cambridge (États-Unis) et de Marcy-l’Étoile. Il y consacrera 2 milliards d’euros d’ici à 2025.

Des vaccins destinés aussi à l’exportation

Les vaccins français sont dits de « deuxième génération » : ils arriveront après les autres. Ils s’adresseront avant tout, au moment de leur mise sur le marché, à des populations déjà largement vaccinées. Leur conception repose ainsi sur une problématique différente de celles des premiers vaccins : ils doivent nous aider à lutter contre les variants. A la manière d’un rappel, leur rôle sera-t-il de « rebooster » le système immunitaire et de faire remonter notre taux d’anticorps ?  Ou seront-ils conçus spécifiquement en fonction d’un ou de plusieurs variants préoccupants (les vaccins ARN disposent-ils de cette facilité) ? Seront-ils moins réactogènes que leurs prédécesseurs ? Ces questions alimentent les réflexions des fabricants.

Réception au Bénin de vaccins Covid-19 via l’initiative Covax. / ©Flickr

Parmi les futurs nouveaux vaccins, il ne faut pas oublier que certains d’entre eux contribueront à la production de doses destinées aux pays pauvres. Car l’accès aux vaccins est nettement inégal au plan mondial.

Abritant 9% de la population mondiale, les populations des pays à faibles revenus sont très peu vaccinées. Début juillet, ils avaient pu administrer 0,3 % des doses distribuées dans le monde (3,3 milliards de doses), contre 31% pour les pays à revenus élevés (dont les pays d’Europe, les USA, la Chine, etc.) qui eux, regroupent 16% de la population de la planète. Cet approvisionnement vers les zones déficitaires en vaccins passera par le mécanisme financier Covax. Le prix de vente du vaccin doit alors rester abordable : développer de tels vaccins, typés « 1re génération » paraît à priori moins intéressant financièrement.

Carte montrant la distribution inégale des doses de vaccins Covid à travers le monde

Nombre de doses administrées dans le monde en date du 21 juillet 2021.

Comment vacciner le monde ?
Parole donnée à Anne-Marie Moulin, vaccins (5/5) : l’accès universel aux vaccins

—————————————————————

L’étude de phase 3 du vaccin à base de protéine recombinante adjuvantée de Sanofi-Pasteur, la toute dernière avant la demande d’autorisation, vient de débuter. Elle prévoit le recrutement de plus de 35 000 participants dans un large panel de pays.

« Les protocoles inscrits dans l’étude montrent que l’industriel envisage les deux stratégies possibles pour ce sérum : le destiner à être une dose de rappel efficace contre les variants, ou en faire un vaccin de première vaccination, commente Stéphane Paul. Un choix qui sera fait à la lumière des résultats de fin d’année ».

Et vraisemblablement après négociations avec les autorités qui ont investi énormément d’argent public dans la société depuis l’année dernière.

ARN messager : de la Covid-19 à la grippe

Si le géant pharmaceutique lyonnais commercialise son premier vaccin « classique » pour lutter contre la pandémie, il n’est pas sûr que son deuxième projet contre la Covid, à ARN messager, soit utilisé à gros volumes dans ce contexte. Il constitue sans doute une preuve de faisabilité, et il faut aller voir plus loin. Sanofi est en position de leadership dans le développement de vaccins contre la grippe. Or, plusieurs laboratoires et entreprises de biotechnologie – dont Moderna – se sont déjà lancés dans la course avec l’ARN messager. Il s’agirait, cette fois-ci, de ne pas se laisser distancer sur ce marché qui représente 40% des revenus dans la division vaccins du groupe français. Sanofi prévoit de développer six candidats-vaccins avec la technologie ARN messager d’ici 5 ans : l’un au moins sur influenza (virus de la grippe).

PPour aller plus loin

Un an pour fabriquer les vaccins Covid : une prouesse qui s‘explique

UUn an pour fabriquer les vaccins Covid : une prouesse qui s‘explique

Article #7 du dossier Pop’Sciences « De la variole à la Covid, les vaccins… »

A la mi-juillet, 53% des Français ont reçu leur 1re dose de vaccin contre la Covid-19. Sereins quant à leur sécurité ? Pas forcément. Le désir est grand de retrouver le chemin de la « normalité », mais le doute subsiste face à ces vaccins dont l’arrivée sur le marché a été fulgurante. Cette prouesse s’explique cependant, et n’a laissé aucune place à l’improvisation ou à la légèreté.

Un article de Caroline Depecker, journaliste scientifique
pour Pop’Sciences – 13 juillet 2021

Sept à dix ans, c’est le temps requis généralement par l’industrie pharmaceutique pour développer un médicament. Pour les vaccins Covid, il en a été tout autre. 11 mois se sont écoulés en effet entre la publication de la séquence du génome* du virus SARS-CoV-2 par les Chinois, en janvier 2020, et la première vaccination contre la maladie. Le 8 décembre, la britannique Margaret Keenan recevait la première dose de vaccin Pfizer/BioNTech, en dehors de tout essai clinique. Avait-t-on grillé des étapes dans la conception des vaccins ? Il n’en est rien.

Des processus réglementaires revisités pour accélérer l’évaluation des dossiers

Face à l’urgence sanitaire, l’année 2020 a été marquée par une collaboration plus intense que la normale dans le monde de la recherche, ainsi que dans le dialogue avec les autorités. L’organisation permettant aux pouvoirs publics de valider la mise au point des vaccins a été profondément bouleversée. Cette réorganisation fut l’élément central permettant d’accélérer l’accès aux vaccins.

Les étapes de développement et de tests d’un médicament sont menées d’ordinaire de façon séquentielle. Les preuves amenées par les scientifiques et les industriels sont soumises à évaluation : la validation d’une étape conditionne le passage à celle qui suit et ce, jusqu’à la phase finale, la production des doses.
En pleine pandémie, les processus habituels sont chamboulés (voir schéma ci-dessous). Au lieu de se succéder, les différentes étapes sont conduites en parallèle. Lors des phases cliniques (1, 2 et 3), des patients d’un groupe tests sont inclus dans le groupe suivant pour gagner encore un peu de temps.

Enchainement des phases d’évaluation lors des vaccins Covid / ©EMA

« On a encore appliqué la « rolling evaluation, c’est-à-dire une évaluation des essais au fil de l’eau », explique Stéphane Paul, professeur en immunologie au Centre hospitalier universitaire (CHU) de Saint-Etienne et membre du comité vaccins Covid-19.

Dans ce cas de figure, les industriels transmettent régulièrement leurs données cliniques et réglementaires, par paquet, aux autorités qui étudient ainsi le dossier, petit bout par petit bout et peuvent in fine délivrer une autorisation d’urgence. Et si le vaccin s’avère prometteur, les fabricants lancent sa production à grande échelle avant même les conclusions définitives des essais ». Ce fonctionnement repensé est bien expliqué par l’Agence européenne du médicament (EMA) sur son site. Prévu par l’Organisation mondiale de la santé (OMS) en cas d’épidémie majeure, il avait déjà été mis en œuvre pour lutter contre le virus Ebola en 2014.

Le contexte pandémique a encore joué un rôle d’accélérateur dans l’obtention des données. Lors des études cliniques de phase 3, il s’agit de réaliser des essais en double aveugle : 20 000 personnes d’un bras placebo reçoivent de l’eau sucrée tandis qu’on administre le vaccin à 20 000 autres volontaires. Puis, on compte le nombre de cas graves, ou d’hospitalisations, naissant dans les deux populations. Ceux-ci sont majoritaires dans le bras placebo. Lorsque le nombre de cas est suffisamment important pour que le calcul permettant de déterminer l’efficacité du vaccin est jugé fiable statistiquement, on arrête l’essai. Or, en 2020, la circulation du virus était importante. L’immunologiste de commenter brièvement : « Si le rythme d’infection est élevé, les cas apparaissent rapidement et l’étude s’arrête de même. C’est globalement…arithmétique.»

Dix milliards de dollars au bas mot

Les États ont mis la main à la poche pour les vaccins. / ©GRStocks sur Unsplash

Autre facteur clé expliquant la disponibilité rapide des vaccins  : le soutien financier des États auprès des laboratoires et des sociétés privées. Lorsque le développement d’un vaccin se fait de façon linéaire, chaque étape validée rassure les investisseurs. Avancer dans une étape, alors que la précédente n’a pas livré la totalité de ses résultats fait prendre des risques. Surtout lorsqu’il s’agit de passer aux premiers tests sur l’homme, pour lesquels il faut des lots de vaccins de grade pharmaceutique, très onéreux à produire.

« A ce stade, les investissements sont énormes. L’aide internationale a offert des garanties aux laboratoires pour aller de l’avant, sans savoir ! et ainsi de minimiser leurs risques », complète Stéphane Paul. On estime à 10 milliards de dollars le financement public et à but non lucratif dédié, en 2020, à la recherche et au développement des candidats-vaccins pour lutter contre la pandémie. Cette somme est probablement sous-estimée vu la rareté des données sur le sujet. Les millions de doses précommandées très tôt par les gouvernements, avant même la finalisation des vaccins, ont constitué un autre signal fort donné aux industriels.

Enfin, lancées dans la course pour concevoir un vaccin contre le SARS-CoV-2, les entreprises se sont largement appuyées sur les connaissances accumulées sur le SARS-CoV-1, responsable de l’épidémie de syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS) en 2002-2004. Avec comme certitude de devoir cibler la protéine Spike, elles ont concentré leurs efforts à développer la technologie dans laquelle elles étaient expertes. Certaines, comme Moderna, n’attendait que le moment propice pour tester à grande échelle une solution technologique facile à adapter : les vaccins à ARN* messager. Cette stratégie vaccinale n’avait pu être testée au-delà des essais cliniques de phase 1 jusqu’à cette date.

En France : 4 vaccins, 2 technologies et un « bouclier » vaccinal

Hôpital des Yvelines / ©NicolasDuprey – Flickr

15 vaccins différents sont distribués aujourd’hui un peu partout dans le monde. 4 le sont en France : 2 d’entre eux sont basés sur la technologie à ARN (le vaccin Comirnaty de Pfizer/BioNtech et le Spikevax de Moderna) et 2 sur l’emploi de vecteur viral (Vaxzevria d’AstraZeneca et le vaccin Janssen Covid-19). Comprise entre 67 et 94 %, leur efficacité globale à prévenir les formes sévères du Covid-19 et les hospitalisations font de ces vaccins un outil privilégié permettant de protéger les personnes les plus fragiles et notre système hospitalier.
Et, depuis le début des campagnes vaccinales, les études s’accumulent pour dire que les vaccins réduisent la transmission du virus. Dans une dernière étude, des chercheurs en santé publique de l’université de Yale ont calculé que le risque d’être infecté, et donc de transmettre le virus SARS-CoV-2 est abaissé de 88% avec le vaccin Cominarty. Cette évaluation a été faite grâce au suivi épidémiologique de la population israélienne, avant que le variant Delta ne fasse irruption dans le pays. Dans le cas de cette dernière souche, plus contagieuse, la baisse de contagiosité serait moindre : de l’ordre de 64%.

Présentée le 12 juillet par Emmanuel Macron comme un « bouclier » nous protégeant des variants et de futurs confinements, la vaccination rapide des populations pourrait jouer un rôle majeur dans la gestion de la pandémie Covid.

Ces vaccins ont donc franchi avec succès les différentes phases d’évaluation clinique attestant de leur efficacité et sécurité. Mais l’affaire n’est pas si simple. Parce que les molécules d’ARN messager sont en quelque sorte « des copies » de l’ADN* contenu dans le noyau de nos cellules, d’aucuns se sont interrogés sur la capacité des vaccins ARN à modifier notre génome. Les scientifiques ont apporté les arguments infirmant cette inquiétude.

Faisons le point sur la sécurité des vaccins ARNm
Parole donnée à Altan Yavuz, vaccins (3/5) : Que savons-nous de la sécurité des vaccins ARN messager ?

—————————————————————

On sait en outre que les vaccins à matériel génétique, à ADN, sont commercialisés depuis vingt ans en vaccination animale (chez le cheval, les saumons d’élevage, les poulets et les chiens) sans qu’aucun effet indésirable majeur n’ait été rapporté. Ces propos suffisent-ils pour être pleinement rassuré ?

15 ans de recul sur les vaccins ARNm dédiés à la lutte contre le cancer

« Non, si ce sentiment existe, il est juste. Il y a des choses qu’on sait et des choses qu’on ne sait pas, reconnaît Stéphane Paul. Si on inclue les volontaires ayant reçu les premières doses de vaccins Covid, et qui font toujours l’objet d’un suivi, on a aujourd’hui un an et demi de recul sur les vaccins Covid à ARN messager. Et aucun signal d’alerte rencontré. On a également plus de 15 ans de recul sur d’autres vaccins à ARN messager comme ceux étudiés pour le traitement des cancers. Mais nul ne peut affirmer que d’ici à 5 ans, rien n’apparaisse ».

Le chercheur, chef d’équipe au Centre international de recherche en infectiologie (CIRI) de Lyon, envisage l’hypothèse d’une recrudescence de maladie auto-immunes. Une leçon tirée du passé. Alors que le nombre de personnes vaccinées, de plusieurs milliards, augmente, « ce risque serait au final forcément extrêmement faible. Dans le cas contraire, nous aurions vu émerger des signaux rapidement ». Le recul sur les vaccins à adénovirus est lui un peu plus important car ce type de vaccins est déjà utilisé contre Ebola.

Vaccinadrome Covid aux Etats-Unis @Unsplash

« Nous restons très vigilants, attentifs aux rapports émis par le dispositif de pharmacovigilance renforcée ».

Ce n’est qu’après sa mise sur le marché, alors qu’un médicament est largement prescrit, que peuvent être observées des effets indésirables rares. Leur surveillance est internationale et permet de sécuriser l’emploi des médicaments en vie réelle. Chaque pays se voit délégué une partie de ce suivi. En France, celui-ci est coordonnée par l’Agence nationale de sécurité des médicaments (ANSM) qui recueille les observations des patients et des professionnels de santé, ainsi que les déclarations obligatoires des fabricants sur la survenue de ces effets indésirables.

Pharmacovigilance renforcée pour davantage de réactivité

Dans le cadre de la Covid-19, des mesures ont été adoptées afin de rendre le dispositif de pharmacovigilance plus réactif : augmentation de la fréquence des rapports des fabricants (mensuels et non semestriels), rappels par SMS de la démarche de signalement, analyse en temps réels des signaux, etc.

Dans un souci de transparence, l’ANSM publie sur son site une synthèse hebdomadaire des données collectées depuis décembre dernier.

D’après son rapport du 2 juillet :
– les effets secondaires graves (ayant nécessité une consultation médicale ou une hospitalisation) concernent 0,03 % des personnes vaccinées (15 500 cas pour 50 988 000 injections),
– un lien est possible entre le vaccin Cominarty (Pfizer) et le risque rare de myocardite (inflammation de la membrane du cœur), les cas signalés ayant toujours évolué favorablement,
– il existe un risque très rare de développer une thrombose atypique et des troubles de la coagulation avec le vaccin Vaxzeria (AstraZeneca), pour les moins de 50 ans.
Dans chaque cas, les mesures de prévention sont expliquées.

Après un semestre de vaccination, les informations accumulées reflètent un rapport bénéfice/risque nettement en faveur de la vaccination. Nul ne peut dire qu’elle sera la liste finale des effets non attendus en lien avec les vaccins. Les réseaux de surveillance ont toutefois été largement consolidés pour les capter rapidement et s’y adapter.

PPour aller plus loin

 

Vaccination en 2021 : de la variole à la Covid-19

VVaccination en 2021 : de la variole à la Covid-19

Au moment où les vaccins font la Une de l’actualité, les débats reprennent de l’ampleur, accompagnés de doutes et de craintes de la part de nos citoyens. Cette conférence vise à informer le public sur la vaccination afin qu’il puisse dissocier l’information scientifique relevant de résultats de recherche des fausses informations et ainsi se forger un avis éclairé.

Les intervenants lyonnais et strasbourgeois aborderont l’historique du vaccin, son principe et ses perspectives, mais également les questions de santé publique qui en découlent.

Intervenants :

  • Laurent Mailly, ingénieur de recherche Inserm à l’Institut de recherche sur les maladies virales et hépatiques, Institut de Recherche sur les Maladies Virales et Hépatiques – Univ. de Strasbourg /Inserm
  • Emilie Crouchet, post-doctorante à l’Institut de recherche sur les maladies virales et hépatiques, IRMVH- Université de Strasbourg /Inserm
  • Stéphane Paul, professeur des universités-praticien hospitalier, chef du service « Immunologie-Suivi des biothérapies » au CHU de Saint-Etienne, responsable de l’équipe GIMAP au Centre de Recherche en Infectiologie de Lyon (Université de Lyon1/Inserm/CNRS/ENS de Lyon), membre du comité scientifique Vaccin Covid19

Un dispositif de tchat permettra aux internautes de poser leurs questions.

Suivre la conférence

PPour en savoir plus

De la variole à la Covid, les vaccins : entre peurs, espoirs et raison | Un dossier Pop’Sciences, juin 2021

La méfiance vaccinale : une attitude aux multiples facettes

LLa méfiance vaccinale : une attitude aux multiples facettes

Article #6 du dossier Pop’Sciences « De la variole à la Covid, les vaccins…« 

L’adhésion aux vaccins est un point capital conditionnant le succès d’une campagne vaccinale.  Sans elle, les doses de vaccins restent inemployées, les couloirs des vaccinodromes peu fréquentés. La France ne jouit pas d’une bonne réputation : elle est souvent présentée comme l’endroit où la méfiance vaccinale est la plus importante au monde. Pour mieux comprendre cette caractéristique française, le poster interactif ci-dessous vous propose d’en explorer différents aspects.

Un travail réalisé par 4 étudiantes du Master Information et Médiation Scientifique et Technique (IMST) de l’Université Claude Bernard Lyon 1, dans le cadre d’un projet tutoré par Pop’Sciences.

 

 

 

Bronchiolite du nourrisson : un vaccin innovant en cours de développement sur Lyon

BBronchiolite du nourrisson : un vaccin innovant en cours de développement sur Lyon

Article #3 du dossier Pop’Sciences « De la variole à la Covid, les vaccins…« 

En pointe dans la recherche contre les maladies infectieuses respiratoires, VirPath, le laboratoire de virologie et de pathologie humaine de Lyon, rattaché au Centre International de Recherche en Infectiologie, est un laboratoire qui innove. Il est à l’origine de la création de Vaxxel, une start-up qui s’est lancée en 2019 dans la course aux vaccins contre les pathogènes responsables de la bronchiolite du nourrisson et de pneumopathies sévères chez les séniors.
Comment développer un candidat vaccin du laboratoire jusqu’au premier essai clinique ? L’exemple de la jeune pousse lyonnaise.

Un article de Caroline Depecker, journaliste scientifique
pour Pop’Sciences – 2 juin 2021

un métapneumovirus vu en microcopie électronique

Métapneumovirus (hMPV) vu en microcopie électronique @ E. Errazuriz-Cerda /UCBL ; J.Dubois/Vaxxel ; M. Rosa-Calatrava/VirPath

Le métapneumovirus humain (hMPV) et le virus respiratoires synclinal humain (hVRS) sont deux virus respiratoires cousins qui provoquent chaque année, respectivement 17 et 33 millions de cas d’infections aigues des voies respiratoires, surtout chez les jeunes enfants et les personnes âgées. Aujourd’hui, aucun traitement thérapeutique efficace, ni vaccin, n’existe sur le marché pour lutter contre ces infections virales qui sont à l’origine de la bronchiolite du nourrisson et représentent la première cause de mortalité infantile à l’échelle mondiale. Mais des résultats expérimentaux, obtenus en 2018 par le laboratoire VirPath(a), pourraient changer la donne : immunisées à l’aide d’un virus hMPV vivant atténué, des souris ne développent aucun symptôme de maladie si on
leur inocule ensuite le virus sauvage, c’est-à-dire le virus présent naturellement dans l’environnement. Vérification avait été faite auparavant, par les chercheurs, que les souris vaccinées à l’aide de ce virus atténué ne développaient aucune pathologie et produisaient bien des anticorps neutralisants vis-à-vis de ce dernier. Avec cette dernière expérience, les scientifiques tenaient leur preuve de concept préclinique : ils avaient entre les mains un candidat vaccin contre la bronchiolite. Restait maintenant à le développer.

L’aboutissement de 10 années de recherche et d’innovations

« L’origine du candidat vaccin remonte aux années 2010, se souvient Manuel Rosa Calatrava, directeur de recherche Inserm et co-directeur du laboratoire VirPath. Nous avions initié alors un travail sur le hMPV en collaboration avec Guy Boivin, directeur d’un laboratoire de recherche similaire au nôtre au CHU de Québec (Canada). Ce scientifique avait isolé, chez un patient, une souche virale dont les capacités à se répliquer et à infecter les cellules étaient particulièrement efficaces, ce qui avait attiré son attention ».

tissu respiratoire humain nasal vu sous microscope

Epithélium respiratoire humain reconstitué d’origine nasal vu en microscopie électronique @ E. Errazuriz-Cerda/UCBL ; M. Rosa-Calatrava/VirPath

Au cours de leurs travaux communs, les équipes des deux laboratoires enchaînent les étapes : après avoir décrit la souche clinique virale, qui répond au « doux nom » de C-85473, ils en manipulent le génome de sorte à pouvoir la modeler à façon. Puis ils éliminent deux de ses gènes, activés lorsque le virus se réplique. Suite à cette opération, la virulence du virus hMPV génétiquement modifié diminue considérablement : il ne se multiplie que très peu dans les organismes vivants. Parallèlement aux expériences conduites sur les souris, les scientifiques observent aussi que le virus atténué stimule bien toujours la production de molécules médiatrices de l’immunité, mais non celles témoignant d’un processus inflammatoire, lorsqu’on le soumet à des tests impliquant des tissus respiratoires humains reconstitués [vidéo ci-dessous ].

Le métapneumovirus isolé et génétiquement modifié dans sa version non pathogène constitue la base virale nécessaire à la fabrication d’un vaccin : ce qu’on appelle une plateforme vaccinale. Baptisée « Metavac® », elle a fait l’objet de plusieurs dépôts de brevet, propriétés des différentes tutelles de VirPath et du laboratoire québécois, et a impulsé la création de Vaxxel en 2019. « Au sein du laboratoire, nous privilégions une stratégie partenariale, non seulement avec le monde académique, mais également avec de nombreux acteurs socio-économiques, explique Manuel Rosa-Calatrava. Cette politique de valorisation de la recherche et de transfert technologique vers la clinique et l’industrie constitue « l’ADN de VirPath » [voir encadré]. C’est grâce à elle qu’est née Vaxxel ».
L’année de sa création, la start-up porteuse du projet de vaccin contre les pneumovirus a été lauréate du concours i-Lab(b) visant à soutenir les meilleures initiatives issues de la recherche scientifique publique en matière d’innovation. Un label Deep Tech qui a procuré à la jeune pousse visibilité et début de financement (270 000 € via Bpifrance) pour aborder la course d’endurance dans laquelle elle venait de se laner.

Produire des virus de qualité pharmaceutique

« Nous avons réalisé, en 2021, une première levée de fonds de 700 000 €, commente Denis Cavert, directeur général de Vaxxel. Ce qui nous permet de démarrer le développement du candidat vaccin ».  Pour ce spécialiste des vaccins, qui cumule quinze ans d’expérience chez Sanofi et Baxter, la première étape importante consiste « à préparer la banque de cellules maîtresse à partir de laquelle seront préparés les différents lots de virus, à chaque fois à l’identique. Début 2022, nous devrions avoir obtenu auprès des autorités réglementaires la certification que notre banque cellulaire est de qualité et de sécurité suffisantes ». En effet, en tant que médicament, un vaccin se doit d’être fabriqué selon les normes très strictes de l’industrie pharmaceutique. On estime ainsi à 70% le temps consacré aux centaines de contrôles qualité obligatoires lors du processus de fabrication d’un vaccin.
En 2020, Vaxxel a acquis la propriété de la lignée cellulaire DuckCelt®-T17 auprès de Transgène, une entreprise de biotechnologie connue pour ses innovations en matière de vaccins thérapeutiques. Intérêt de cette lignée de cellules de canard qui se cultive en suspension et sans sérum : elle permet la multiplication des métapneumovirus en fermenteur* et son mode de production peut aisément être transposé du stade pilote à l’échelle industrielle.

fermenteur de laboratoire permettant de cultiver des cellules

Une laborantine prélève des virus de leur milieu de culture (fermenteur) @ Visée.A

L’ambition de Vaxxel : accompagner le développement de Metavac® jusqu’à la fin de l‘essai clinique de phase 1, au cours duquel des tests seront réalisés sur un petit groupe de personnes pour vérifier la bonne tolérance au médicament et récolter quelques éléments sur sa capacité à stimuler le système immunitaire (pour les vaccins pédiatriques, le premier essai clinique est d’abord réalisé sur des adultes). Ces tests pourraient commencer dès la fin 2023, pour une période de six mois environ. Pour mener à bien son programme, Vaxxel bénéficie des espaces, des équipements, du savoir-faire du laboratoire VirPath et de l’accompagnement de la société Transgène.

Des essais cliniques d’ici 3 ans ? L’enjeu d’un marché à 5 milliards d’€

Avant d’atteindre son objectif final, deux étapes clés sont prévues à court terme pour la start-up :
– qualifier le grade pharmaceutique de la production virale issue de la lignée DuckCelt®-T17
– vérifier la bivalence de la plateforme virale, c’est-à-dire montrer qu’elle est susceptible de prévenir aussi les infections dues à un deuxième virus respiratoire : le hVRS.

En effet, si la souche C-85473 de métapneumovirus a subi des opérations d’ingénierie génétique qui ont permis d’en atténuer la virulence, elle s’est vue dotée de nouveaux gènes la conduisant à exprimer un antigène *(c) du virus synclinal humain (hVRS), le second virus responsable de la bronchiolite du nourrisson, lorsqu’elle se réplique*. La startup doit ainsi vérifier sur modèle animal que Metavac® apporte une protection face au hVRS. Si c’est bien le cas, la preuve de concept de la bivalence du vaccin sera apportée : le vaccin pourrait prévenir les infections causées par les deux virus respiratoires.

virus VRS de la bronchiolite

virus VRS vu sous microscope (taille réelle 200 nm) @ US CDC

Il existe une dizaine de projets de vaccin contre le VRS actuellement, tous au stade de phase 1. Si l’impact du hMPV sur la santé, auprès des tout petits notamment, est moindre par rapport à celui du hVRS, la concurrence y est moins rude. On compte un seul autre projet de vaccin en cours de développement contre le métapneumovirus humain (essai clinique de phase 1).  « La bivalence pourra constituer un argument de poids face aux industriels du vaccin lorsqu’il s’agira de les convaincre de prendre le relais pour le développer », commente Denis Cavert, si les résultats sont, comme attendus, au rendez-vous de 2024. S’ensuivraient alors les essais de phase 2 (tests permettant de définir les doses) et phase 3 (définition de l’efficacité du vaccin), puis, la phase d’industrialisation et de commercialisation du médicament.

Que représente le coût global du développement du candidat vaccin tel que celui de la start up lyonnaise ? « 9 millions d’€… environ », répond Denis Cavert. Une somme que le directeur général compte trouver grâce à des financements publiques nationaux et européens, et auprès d’institutions comme la fondation Melinda Gates. Un jeu qui en vaudrait la chandelle : l’estimation qu’il fait du marché auquel s’adresse son vaccin est de 5,7 milliards d’€ par an. L’équivalent d’un médicament « blockbuster » dans le jargon de l’industrie pharmaceutique.

———————————–

Notes :
(a) VirPath est un laboratoire sous tutelles de l’Institut national de recherche médicale (Inserm), de l’Université Claude Bernard Lyon 1, du Centre national de recherche scientifique (CNRS) et de l’Ecole nationale supérieur de Lyon (ENS Lyon)
(b) I-Lab est un concours organisé par le ministère de l’Enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation en partenariat avec Bpi France
(c) L’antigène produit par le vaccin vivant atténué est la protéine F qui permet au hVRS de fusionner avec les cellules qu’il infecte

—————————————————————

         Encart

         Valoriser, innover, créer de la valeur : l’ADN de VirPath

Les scientifiques de VirPath, reclus dans leur laboratoire et la tête dans les étoiles ? Cette image naïve du chercheur n’a pas lieu d’être au sein des locaux du laboratoire lyonnais. Au cœur de la stratégie portée par son co-directeur, Manuel Rosa-Calatrava : mener une recherche intégrée avec des partenaires issus du monde académique et des milieux socio-économiques, y compris à l’international avec, pour objectif, la valorisation des travaux de recherche académique et leur transfert technologique vers la clinique et l’industrie pharmaceutique. Ainsi, depuis sa création, VirPath a constitué un portefeuille de 20 familles de brevets dont plusieurs ont déjà été licenciés.

portrait de Julia Dubois et Manuel Rosa-Calatrava

Manuel Rosa Calatrava et Julia Dubois, fondateurs de Vaxxel @ Visée.A

L’émergence de Vaxxel, est un bel exemple illustrant la politique volontariste du laboratoire lyonnais : trois de ses quatre fondateurs sont les chercheurs à l’origine du vaccin innovant soit, Manuel Rosa-Calatrava, Guy Boivin et Julia Dubois, la jeune virologue dont les travaux de doctorat (menés en co-tutelle entre l’université de Lyon 1 et l’université Laval de Québec) sont à l’origine de la plateforme vaccinale Metavac®.

Trois start-up et une plateforme de recherche

« C’est dans cette démarche de création de valeurs et grâce à plusieurs financements, comme ceux de l’Agence nationale de la recherche (ANR) et de la région Auvergne-Rhône-Alpes, ainsi qu’au soutien appuyé des filiales de l’Université Claude Bernard Lyon 1 (Lyon Ingénierie Projet et EZUS) et de Pulsalys, l’incubateur et accélérateur Deep Tech de la région, que nous avons fondé trois start-up : Signia Therapeutics qui repositionne des médicaments pour de nouvelles indications thérapeutiques anti-infectieuses (notamment contre le SARS-CoV-2), VirHealth, spécialisée dans la désinfection microbiologique, et enfin Vaxxel ».

Parmi les outils créés par le laboratoire : VirNext, une plateforme de recherche technologique et contractuelle répondant aux besoins des industriels de la santé. Depuis janvier 2020, VirNext a permis d’évaluer plus de 200 molécules et anticorps dans différents modèles précliniques y compris animaux, et d’optimiser des vaccins viraux candidats. C’est avec cette plateforme qu’a été menée la première étude européenne d’évaluation d’épurateurs d’air en atmosphère contaminée par le SARS-CoV-2. Créatrice de valeurs scientifiques, technologiques et économiques, VirNext a rendu possible la pérennisation de plus de 20 emplois directs ces cinq dernières années.

PPour aller plus loin

Recourir au vaccin ? Les clés pour comprendre. Partie 2: des différentes techniques vaccinales à l’évaluation de leur efficacité

RRecourir au vaccin ? Les clés pour comprendre. Partie 2: des différentes techniques vaccinales à l’évaluation de leur efficacité

Article #2 du dossier Pop’Sciences « De la variole à la Covid, les vaccins…« 

Deux millions. Ce chiffre représente, d’après l’Organisation mondiale de la santé, le nombre de vies sauvées chaque année grâce la vaccination dans le monde. En protégeant chaque personne vaccinée contre une infection, l’administration d’un vaccin est bénéfique sur le plan individuel. Elle l’est aussi sur le plan collectif en réduisant le nombre de personnes susceptibles de disséminer la maladie.
Mais quels sont les différents techniques vaccinales existantes ? Et comment sait-on si elles fonctionnent ?

Hélène Dutartre, chercheuse au Centre International de Recherche en Infectiologie (CIRI) et Nathalie Davoust-Nataf, chercheuse au Laboratoire de Biologie et de Modélisation de la Cellule (LMBC) nous apportent leur éclairage. Toutes deux animent le groupe « Microbes, Immunité & Vaccination » associant scientifiques et enseignants lyonnais.

Un article de Caroline Depecker, journaliste scientifique
pour Pop’Sciences – 2 juin 2021

 

Les différents types de vaccins

Le vaccin cherche à stimuler l’immunité adaptative. Pour cela, l’astuce consiste à présenter la « carte d’identité » du pathogène, soit la partie de celui-ci que les défenses de l’organisme reconnaissent comme la signature de l’intrus : son antigène*. Celui-ci prend généralement l’aspect d’une protéine, parfois aussi celle d’un sucre complexe.

Il existe plusieurs méthodes pour présenter cette carte d’identité-antigène à l’organisme :
– les premières à avoir été mises au point, bien connues, dominent. Ce sont les vaccins vivants atténués et les vaccins entiers inactivés ;
tandis que d’autres sont plus novatrices. Elles comprennent les vaccins en sous-unités protéiques, les vaccins recombinants encore appelés « à particules pseudo-virales » et les vaccins à vecteur viral ;
la dernière génération de vaccins, apparue sur le marché de la santé humaine l’année dernière avec la pandémie Covid, comprennent les vaccins à base de matériel génétique, dits « à ARN* ».

En quoi cela consiste ?

 1. vaccin vivant atténué – Ou – vaccin inactivé 
– l’activité d’un virus est réduite grâce à l’insertion de mutations – Ou – le virus est rendu inerte grâce à des traitements  chimique ou thermique
– exemples : vaccin combiné contre la rougeole, oreillons et rubéole (ROR), vaccins Covid Sinovac et Sinopharm

2. vaccin à sous-unité protéique 
– il s’agit d’un antigène artificiel
– exemples : vaccin contre l’hépatite B, vaccin Covid Novavax

 

3. vaccin recombinant ou particule pseudo virale

– plusieurs protéines artificielles miment la forme du virus
– exemples : vaccin contre le papillomavirus humain

 

 

 


4. vaccin à vecteur viral 

– un virus vecteur non pathogène contient l’ADN* permettant la production de l’antigène
– exemples : vaccin contre Ebola, vaccins Covid Astrazeneca, Sputnik, Janssen

 

 

 

 


5. vaccin à ARNm

– l’ARN messager d’un antigène est mis dans une vésicule
– exemples : vaccins Covid Moderna et Pfizer

Note crédits : ces infographies ont été réalisées par Marine Tronchon, Emile Dorchies, Amandine Chantharath et Antonin Chenel, dans le cadre d’un projet d’étude en médiation scientifique (licence de biologie, ENS Lyon) portant sur réalisation d’un jeu de plateau (The Vaccinator) sensibilisant à la vaccination.

Toutes ces approches possèdent des inconvénients et des avantages en matière de coût, de sécurité ou de difficulté de mise en œuvre.

La composition d’un vaccin

Le vaccin est un médicament particulier. En effet, il s’adresse généralement à des gens en bonne santé pour un bénéfice individuel. Mais, comme pour tout médicament, la formulation d’un vaccin comprend des produits autres que le principe actif, qui ici est l’antigène. Dans la liste des ingrédients accompagnant l’antigène, outre de l’eau (ou une solution saline), on trouve en quantité limitée et très contrôlée :

– des traces d’antibiotique dans certains cas. Elles constituent des reliquats de l’antibiotique utilisé pendant la phase de production afin d’éviter les contaminations bactériennes et qui est normalement éliminé lors du processus de fabrication.

– des conservateurs et/ou des stabilisants (ex : saccharose, formaldéhyde, alcool…). Ces composés maintiennent la qualité du vaccin dans le temps et préviennent l’apparition de champignon ou bactérie indésirable

– un adjuvant. Cette substance n’est pas systématique. Elle est ajoutée pour augmenter l’efficacité de certains vaccins (exemple des vaccins protéiques) en stimulant la réponse immunitaire. Parmi les adjuvants connus, on retrouve le phosphate de calcium, le squalène (huile issue du foie des requins) et les sels d’aluminium. L’association entre les sels d’aluminium, utilisés depuis les années 1920, et la survenue d’une maladie rare, la « myofasciite à macrophages », chez des adultes prédisposés génétiquement a été suspectée à partir des années 2000. A ce jour, cette hypothèse n’a pas été confirmée.

Déterminer l’efficacité du vaccin à prévenir la maladie

L’expérimentation tient une part fondamentale dans l’approche vaccinale, aussi « quelles que soient les connaissances acquises au laboratoire sur le pathogène et sur les mécanismes cellulaires mis en jeu, quelle que soit la technique utilisée pour mettre au point le vaccin et ses promesses au laboratoire, on ne saura jamais sa véritable efficacité tant qu’on ne l’aura pas testé sur l’être humain, commente Nathalie Davoust-Nataf. Il faut vacciner un grand nombre d’individus pour le savoir …»

Avant qu’un vaccin puisse être mis sur le marché, il doit passer la phase cruciale des essais cliniques : ces derniers se déroulent en trois phases successives au cours desquelles des personnes, réparties dans des groupes de tailles croissantes (plusieurs dizaines de milliers pour la dernière phase), se font vacciner. Pendant ces essais, les cliniciens testent la bonne tolérance au vaccin (sa non toxicité), sa capacité à déclencher une réponse immunitaire efficace (par exemple la production d’anticorps), le dosage adéquat, le nombre de rappels éventuels, enfin, l’efficacité avec laquelle le vaccin prévient la maladie.

virus du Sida (VIH) @Flickr

Poliomyélite, rougeole, oreillons, fièvre jaune. Pour chacune de ces maladies infectieuses, invalidantes voire mortelles, il existe un vaccin. Pour d’autres, les recherches de solutions vaccinales semblent tourner court. « Si on prend l’exemple du HIV, force est de constater que l’effort de recherche énorme déployé depuis 30 ans pour mettre au point un vaccin préventif n’a pas abouti… pour l’instant, explique Hélène Dutartre. Toutes les technologies vaccinales connues ont été essayées, des combinaisons prometteuses tentées, mais la conclusion de chacun des essais vaccinaux s’est révélée négative. Nous en avons tiré des informations précieuses bien sûr, mais on semble avoir un temps de retard sur cette pathologie, à chaque fois ». Bien que n’ayant pas permis l’atteinte de son objectif premier, la recherche sur le vaccin HIV continue. Et s’il était besoin de remotiver les scientifiques arpentant ce domaine, les nombreuses retombées positives de leurs travaux, dans le cadre de la réponse à la Covid-19, sont autant de signes encourageants à persévérer.

Dans le cas de la Covid-19, les chercheurs associés à l’industrie pharmaceutique ignoraient dans quelle mesure la stratégie de vaccin qu’ils poursuivaient allait aboutir. Le développement du premier candidat-vaccin anti-Covid de Sanofi Pasteur, à base de protéine recombinante, a été ainsi retardé en raison « d’une réponse immunitaire insuffisante observée chez les personnes de plus de 50 ans », a annoncé l’industriel en décembre 2020. Pour lutter contre la Covid-19, la quinzaine de vaccins ayant reçu une autorisation de mise sur le marché, au cours du premier semestre 2021 à l’échelle de la planète, reposent sur quatre technologies différentes : « C’est une chance inespérée d’avoir pu bénéficier aussi rapidement de plusieurs vaccins pour lutter contre le SARS-Cov-2. Dans notre communauté de chercheurs, passionnés par la question vaccinale, un doute subsistait : et si la course au vaccin n’aboutissait pas ?  Pour notre bonheur, il en fut tout autre ! », concluent, souriantes, les deux scientifiques de Lyon.

PPour aller plus loin

Recourir au vaccin ? Les clés pour comprendre. Partie 1: du principe à la conception d’un vaccin

RRecourir au vaccin ? Les clés pour comprendre. Partie 1: du principe à la conception d’un vaccin

Article #1 du dossier Pop’Sciences « De la variole à la Covid, les vaccins…« 

Deux millions. Ce chiffre représente, d’après l’Organisation mondiale de la santé, le nombre de vies sauvées chaque année grâce la vaccination dans le monde. En protégeant chaque personne vaccinée contre une infection, l’administration d’un vaccin est bénéfique sur le plan individuel. Elle l’est aussi sur le plan collectif en réduisant le nombre de personnes susceptibles de disséminer la maladie.
Mais comment un vaccin agit-il sur notre corps ? Et comment le conçoit-on ?

Hélène Dutartre, chercheuse au Centre International de Recherche en Infectiologie (CIRI) et Nathalie Davoust-Nataf, chercheuse au Laboratoire de Biologie et de Modélisation de la Cellule (LMBC) nous apportent leur éclairage. Toutes deux animent le groupe « Microbes, Immunité & Vaccination » associant scientifiques et enseignants lyonnais.

Un article de Caroline Depecker, journaliste scientifique
pour Pop’Sciences – 2 juin 2021

Une maladie infectieuse est provoquée par l’invasion dans notre organisme d’un microbe pathogène* (la plupart du temps un virus*, une bactérie* ou un parasite*) qui se multiplie et entraîne une réaction forte de nos cellules. Celles-ci peuvent être gravement endommagées, détruites, ou libérer des substances toxiques.

Le principe du vaccin : entraîner notre corps à faire face à un pathogène invasif

Pour éviter l’infection, la vaccination dite « préventive » consiste à mettre l’organisme en bonne santé en contact avec une version inactivée ou atténuée du pathogène, ou encore avec l’un de ses composants : on apprend ainsi au système immunitaire* à reconnaître l’intrus et à élaborer un système défensif, spécifique de celui-ci. Le bénéfice d’un vaccin repose sur le fait que l’on immunise la personne sans l’infecter avec le microbe responsable de la maladie ciblée, qui peut être dangereuse. Une fois entraîné, l’organisme gardera « la mémoire » des défenses qu’il a mobilisées face au vaccin : celles-ci seront sollicitées rapidement et neutraliseront efficacement le pathogène, en cas de confrontation réelle ultérieure. En Europe, ce recours aux vaccins pour leur action prophylactique* a été démocratisé avec les travaux d’Edward Jenner sur la variole* à la fin du 18e siècle.

En dehors de cette action préventive dans le cadre des maladies infectieuses, un vaccin peut être utilisé en immunothérapie : il n’est pas conçu cette fois-ci pour protéger un individu contre une infection future, mais pour l’aider à lutter contre une maladie déjà présente, en stimulant le système immunitaire que la maladie a ralenti. Cette approche d’immunothérapie* est développée depuis les années 1980-90 dans le cadre d’essais cliniques, en cancérologie et dans la lutte contre le virus du Sida (le VIH).

Le système immunitaire : une batterie d’armes défensives prête à s’activer

Face à un pathogène, reconnu comme agresseur par notre organisme, le système immunitaire* réagit en déclenchant une multitude de réactions. La première réponse est immédiate et non spécifique au microbe : elle met en jeu des moyens de défense qui se situent au niveau de la peau, de la sueur, des larmes, de la salive et provoque, outre une inflammation locale, la libération d’agents bactéricides et virucides. C’est ce que l’on appelle l’immunité innée.

Deuxième système de défense, plus lent à se mettre en œuvre : l’immunité adaptative. Les soldats qui en font partie appartiennent à trois régiments :
– les lymphocytes* B qui produisent les anticorps* empêchant le pathogène d’entrer dans les cellules
– les lymphocytes T tueurs, des cellules spécialisées dont le rôle est de détruire les cellules infectées,
– enfin, les lymphocytes T auxiliaires. Sorte de chefs-d’orchestres, ces globules blancs organisent la réponse immunitaire et commandent l’action des deux bataillons de lymphocytes précédents.

Si un virus ne peut plus entrer dans la cellule, il ne peut plus alors se répliquer*. Si la cellule dans laquelle il se trouve est détruite, il ne peut plus alors en infecter d’autres.


Que penser de la réaction vaccinale et des effets secondaires ?

Parole donnée à Nathalie Davoust-Nataf, vaccin (1/5) : la réaction au vaccin est un bon signe

 Concevoir un vaccin : une démarche ancienne, avant tout empirique

On doit donc à Edward Jenner, un médecin anglais du 18e siècle, la première expérience scientifique de la vaccination. A cette époque, la variole, avec ses pustules hautement contagieuses, faisait des ravages partout en Europe, notamment chez les jeunes enfants. En 1796, le médecin remarque que les fermiers ayant contracté la vaccine, une forme de variole affectant les vaches mais bénigne pour l’Homme, sont protégés de la variole. Il a alors l’idée d’inoculer chez James Phipps, le jeune fils de son jardinier, du pus prélevé sur une fermière infectée par la vaccine après avoir trait une vache. Quelques jours plus tard, il lui transmet une version affaiblie de la variole pour s’assurer si l’enfant est bien protégé : celui-ci résiste à la maladie.

Edouard Jenner en train de vacciner un enfant, peinture sur huile

Edward Jenner vaccinant un enfant, peinture sur huile de E. Hillemacher, 1884 @ Wikimedia Commons

« Connaître l’efficacité d’une méthode vaccinale repose beaucoup sur l’observation et l’expérimentation, c’est une démarche avant tout empirique, commente Nathalie Davoust-Nataf. Lorsque la vaccination a été utilisée pour la première fois, les scientifiques n’avaient pas nos moyens modernes d’analyse pour connaître le pathogène et la maladie qu’il induit : pas de séquençage génétique, ni de biologie moléculaire ou de microscopie électronique… La notion de pathogène n’avait même pas été arrêtée. Et c’est dans cette définition, ancienne, que se trouvent encore aujourd’hui les grands principes nécessaires à la fabrication d’un vaccin ».

Cette définition est émise en 1890 sous la plume de Robert Koch, médecin allemand, célèbre pour avoir découvert huit ans plus tôt la bactérie à l’origine de la tuberculose*. Il émet quatre postulats permettant d’identifier un agent infectieux. Deux d’entre eux stipulent que « le micro-organisme doit pouvoir être isolé et croître en milieu de culture pur (c’est-à-dire en ne contenant que ce seul microbe) et qu’il induit la maladie lorsqu’il est réintroduit chez un animal sensible ».

cellules de culture virale issues de rein de singe

Cellules Vero, utilisées comme lignée de culture virale @ 2021 William Parker

« Les deux étapes clés et délicates, dans la mise au point d’un vaccin, sont l’isolement du pathogène au laboratoire et sa multiplication en milieu de culture (étape d’amplification), illustre Hélène Dutartre. Une fois franchies, deux solutions :

– on peut tout d’abord utiliser le pathogène de façon industrielle tel que. Après inactivation par une méthode, thermique ou chimique, on obtient un vaccin qu’il faut ensuite tester en conditions réelles ». Cette stratégie, la plus ancienne, a fait ses preuves : c’est d’ailleurs celle qu’a adoptée la Chine pour produire ses vaccins Sinovac ou Sinopharm contre la Covid-19.

– « ou alors, on extrait le génome du pathogène amplifié, qu’on séquence ensuite pour construire des vaccins plus élaborés, comme les vaccins à vecteur viral, les vaccins à protéines recombinantes ou à ARN », complète l’infectiologue de Lyon.

…….La suite : Recourir au vaccin -Partie 2- Des différentes techniques vaccinales à l’évaluation de leur efficacité

PPour aller plus loin

Comment sont élaborées les recommandations vaccinales ?

CComment sont élaborées les recommandations vaccinales ?

Faut-il autoriser ou interdire tel vaccin contre Covid-19 ? A qui ouvrir en priorité la vaccination ? Comment organiser la campagne de vaccination ? Depuis le début de la crise sanitaire, les décideurs politiques sont amenés à faire des choix quotidiens en matière de santé. Dans un contexte d’urgence, où les données évoluent au jour le jour et se diversifient au cours du temps, l’exercice se révèle d’autant plus complexe. Et difficile pour les citoyens de s’y retrouver. Les lenteurs de la campagne de vaccination observées depuis le mois de janvier n’ont d’ailleurs pas manqué de susciter nombre d’interrogations, voire d’incompréhensions.

Entre les motivations des décideurs et la recherche d’un compromis qui intègre les données scientifiques disponibles, décortiquer ces prises de décisions n’est pas simple. D’autant que, de la commercialisation d’un vaccin jusqu’à son administration dans les centres de vaccination, une multitude d’acteurs sont amenés à se prononcer à différentes étapes essentielles du processus. Mais qui sont justement ces différentes parties prenantes des décisions en matière de vaccination ? Et comment ces décisions sont-elles élaborées ?

C’est justement ce qui intéresse Hans-Martin Späth, chercheur au laboratoire P2S (Parcours Santé Systémique), qui a étudié en particulier l’élaboration des recommandations vaccinales contre la grippe saisonnière. Ses travaux montrent comment l’information scientifique disponible n’exerce pas le même poids chez les décideurs selon le pays, soulignant notamment des différences culturelles.

A lire sur sciences pour tous   

PPour aller plus loin

Lire le dossier Pop’Sciences consacré aux vaccins :

De la variole à la Covid, les vaccins : entre peur, espoirs et raisonCaroline Depecker, journaliste scientifique, Pôle éditorial Pop’Sciences, Juin 2021